Quatre Français parmi les 59 derniers joueurs du plus gros tournoi du monde
Main Event 10 000 $ (Fin du Day 6)
Malo Latinois, là-haut sur sa montagne
22,375 millions (89,5 BB)
Tandis qu'autour de lui, tout le monde est occupé à "bag" ses jetons et savourer sa qualification pour le Day 7, Malo Latinois accorde un rappel à son public, se retrouvant une dernière fois de plus dans un gros coup. Ignorant la cohue autour de lui, il se concentre pour déceler le moindre tell chez son adversaire. La tension est palpable, les caméras sont braquées sur lui. Mais à l’image de sa journée où tout a semblé lui sourire, le Français joue un dernier tube pour le plus grand bonheur de ses supporters venus donner de la voix. “Vamos ! C’est ça Malo !”, crient-ils en le voyant s'emparer des jetons.Cette fois c'est fini, Malo peut enfin souffler : c’est avec un tapis colossal de 22,375 millions, 90 blindes, qu’il reviendra croiser le fer samedi à midi, pour le Day 7. À chaud, il semble avoir du mal à réaliser. “Ça me parait complètement fou. C’est tellement d’émotions. Tu ne peux pas savoir à quel point je suis heureux. Ce n'est vraiment pas simple mentalement. Mais, cette sensation lorsque tu montes des jetons, elle est indescriptible.” Sur son nuage au sortir d’une journée quasi parfaite où il a multiplié son tapis par quatre en dix heures de jeu - alors qu'il était déjà gros -, Malo garde néanmoins la tête sur les épaules, conscient du chemin qui lui reste à parcourir sur ce tournoi si spécial.
“Je suis super content de mon jeu. Hormis un petit moment où j’ai perdu quelques jetons, je n’ai fait que monter. Maintenant, il reste encore soixante joueurs. Le plus dur reste à venir. On est certes proche du but... mais il reste encore beaucoup de temps. Il ne faut surtout pas vendre la peau de l’ours avant de l’avoir tué", philosophe-t-il. “Maintenant, il faut se reposer et rester focus pour être prêt demain". Rendez-vous est pris ! - VictorP
Jean Lhuillier, le braqueur à l’anglaise
5,2 millions (21 BB)
“On est quoi là, au Day 8000, c’est ça ?”. Jean Lhuillier a la blague facile, tandis qu'il reprend peu à peu ses esprits après une nouvelle guerre de dix heures, qui l’a vu réaliser un improbable come-back. “Je me suis battu comme jamais. Pendant tout le tournoi, j’ai toujours eu le double de l'average, le triple de l'average… Et puis en deux heures, je suis tombé à 7 blindes”, rappelle le joueur, qui mettait un genou à terre après ce flip perdu avec deux Dames contre As-Roi.
Pour autant, le grinder de Nottingham n’a rien lâché et a montré qu’il était aussi à l’aise en tant qu’énorme tapis qu’en "short-stack ninja". “Je sais changer de vitesse, j’ai mes petites techniques qui me permettent de gratter des jetons. Attends, je te montre ce que j'ai écrit sur chaque joueur, poursuit Lhuillier qui me sort alors l’appli Notes de son iPhone, bourrée d’énormes pavés défilant sur plusieurs pages. J’écris plein de trucs spéciaux, comme la vitesse à laquelle les mecs regardent leurs cartes, s’ils les regardent plusieurs fois… Ça me permet d’orienter mes décisions, et de prendre ou d’esquiver des spots”, explique Lhuillier, affirmant que chaque détail compte.
Le palier franchi sur les dernières minutes lui permet également de battre son record de gains en live… Acquis ici même l’an dernier lors de la finale du 1 500 $ Freezout où nous le découvrions à peine. "Quand je vois l'échelle des gains, je me dis que ça fait déjà beaucoup. Et ça peut être encore plus. Tu me diras, j’ai déjà pris ça la dernière fois que je suis venu, donc ça reste des sommes habituelles...” plaisante encore le joueur, qui reviendra demain avec ce même esprit ambitieux, détaché et positif pour continuer à "crush”. - Fausto
Eliott Kessas, “récréa déter”
9,325 m. (37 BB)
Quand beaucoup de joueurs extériorisent la pression après avoir franchi la ligne d’arrivée de ce Day 6, Eliott Kessas, lui, reste de marbre. Il range son sac avec une sérénité troublante et se présente aux journalistes avec cette même attitude posée et concentrée qu’il avait à table quelques minutes plus tôt. Et pourtant, avec un stack de final de 37 BB dix heures après avoir repris le tournoi en position compliquée (22 BB), le Franco-Californien a largement de quoi exulter.
"Je ne sens pas la pression. J’essaie de rester dedans. Dans le tournoi, dans mon match. Si tu te dis que t’es à 59 left du Main Event, tu deviens fou en fait”, déclare le joueur, qui savoure l’expérience sans pour autant quitter des yeux son objectif. "Si je dézoome, c’est kiffant, oui. Mais je ne suis pas là pour kiffer, je suis là pour gagner”.
On a presque l’impression que le plus récréatif du quatuor est en fait le plus sérieux et le plus déterminé. "On me voit comme un récréatif, mais j’ai beaucoup étudié le jeu. Ça fait quand même quinze ans que je suis dans le poker. Je sais ce que je fais” assure le spécialiste du Main Event, l’un des seuls tournois qu’il joue chaque année. Trois ITM en quatre ans, bien que celui-là soit incomparable de longueur et d’intensité. Et s’il ne se présente que très rarement sur les tournois live, Eliott dispose de toutes les armes nécessaires pour frapper un gros coup. - Fausto
Malcolm Franchi : "Du côté tight de la force"
5,15 millions (21 BB)
"Très longue, cette journée, très très longue ! La plus longue du tournoi !" Mais, Malcolm Franchi, on a joué cinq niveaux de deux heures sur ce Day 6, exactement pareil que lors des cinq journées précédentes ! Le parisien rigole. "Oui, sauf qu'aujourd'hui je n'ai jamais eu plus de trente blindes. Et encore, quand j'ai eu trente blindes, ça a duré vingt minutes, même pas !" C'est effectivement un bel exploit à mettre son crédit : parti à midi avec 15 BB, Franchi est parvenu à maintenir sa place dans l'orchestre français malgré une partition compliquée à déchiffrer. Sans jamais jouer les premiers violons, mais sans fausses notes non plus."La vérité, c'est que j'ai dû jouer trois coups post-flop par niveau. Ouais, c'est ça : quinze coups post-flop, grand max, durant la journée." Le reste du temps, il s'est maintenu à coup de brèves mélodies en solo : "J'ai pris les spots de re-steal." Il y a tout même eu bref moment où il s'est avancé sur le devant de la scène pour donner de la voix : un coin-flip gagnant, avec As-Dame contre 99. Dans la lignée de ce qu'il nous racontait la veille, Franchi ne s'est jamais senti handicapé par son petit tapis : seul comptait le moment présent. "Plein de fois, je me faisais la remarque dans la tête : OK, tu es card dead... mais tu es là !" Mieux : il a réussi à tirer parti de cette situation précaire. "Dans la vie, je suis quelqu'un qui manque de patience. Là, j'étais obligé. Et en fait, même durant ces longues périodes où je ne pouvais pas jouer, rien que d'être spectateur, c'était passionnant, stimulant."
Le jeu à moins de 20 blindes, tout les pros vous le diront : c'est crevant. "Il faut être super concentré. Il y a des tas de fois où je voulais défendre, voir un flop, payer pour un turn. Mais avec mon stack, ce n'était pas possible. Chaque décision que je prenais, je devais être absolument sûr de moi." Dans une autre vie, Franchi aurait pu être recruteur dans le milieu de foot - son diplôme en atteste. Mais grâce à un stackeur qui lui a fait confiance pour la deuxième année de suite, c'est dans le grand bal du Main Event qu'il continue de danser, encore et encore, désormais à 58 joueurs de dix millions de dollars. - Benjo
On joue contre qui ?
Outre les Niklas Astedt (14e), les Kristen Foxen (17e), les Joe Serock (20e) et autres Brian Rast (22e), déjà évoqués dans ces colonnes et qui ont validé leur qualif', à qui auront affaire nos quatre Français sur le Day 7 ? C'est comme chez le disquaire : plein de styles sont représentés dans les bacs du Main Event.
"En fait, Jesse avait déjà été en table télévisée il y a trois ans et un joueur qui connaissait sa passion lui a apporté un canard en plastique. Depuis, plein de gens lui offrent des canards et il les apportent avec lui en table, m’explique une membre de la “Duck Family”. "S’il arrive en table finale, je t’assure qu’on ira chercher TOUS les canards de Vegas et que la table finale sera recouverte de canards". Alors, ça vous en bouche un coin (coin) ?
En bas de chipcount, on retrouve le dernier argentin et l’un des derniers amateurs du tournoi. "Il s’est qualifié pour 150 $ sur internet. Ça pourrait être un gars comme toi et moi, m’informe Gonzalo, notre confrère de Codigo Poker. Il a très peu d’expérience en poker live, il avait même du mal à compter les tapis avec les jetons. Il a son style bien à lui, mais je ne te cache pas que pour arriver jusqu’ici, il a eu pas mal de “coolers” favorables". Même shortstack, Mauro Juarez reviendra au Day 7 avec 13 blindes pour poursuivre sa belle histoire. Hiroki Nawa est le dernier survivant du gang des youtubeurs japonais. Masato Yokosawa, le streamer et vidéaste le plus influent du monde du poker a effectivement rassemblé autour de lui un carré de Youtubeurs poker (Masato et Hiroki Nawa) et deux autres créateurs de contenu venant du monde des mathématiques (Toshya et Takumi).Qualifié ric-rac pour le Day 6 (avec 20 blindes), Hiroki a senti avec lui la force de ses collègues tout le long de la journée. "On se disait qu’il avait besoin d’un coup de pouce. Du coup, chaque membre de l’équipe lui a donné un petit porte-bonheur. Moi, c’est le cochon rose. Je l’ai gagné au Circus Circus la semaine dernière." Le cochon, le sac de Mac&Cheese et la sucette en dé ont parfaitement fonctionné puisque Hiroki sera au Day 7 avec 6 325 000 jetons (25 blindes).
Yegor Moroz a vécu une formidable journée de poker… Et ses copains aussi ! Une dizaine de potes (photo ci-dessus) étaient sur les bords du rail pour hurler à chaque coup gagné par le grinder américain, qui leur sautait dans les bras pour des célébrations joyeuses qui réveillaient tout l’Event Center. Pour l’instant, le prix du meilleur rail ne souffre d’aucune contestation. Vous avez parcouru le chip-count, et vous n'avez reconnu aucun ancien finaliste du Main Event. Faux ! Russell Rosenblum est déjà passé par là, c'était en... 2002, l'année de Robert Varkonyi. Avec 37 blindes à 59 joueurs restants, il va falloir bosser, mais une redite reste tout à fait possible.
Non, Kristen Foxen n'est pas toute seule pour représenter le poker au féminin. Shundan Xiao se paie même le luxe de se poser en deuxième place au classement, avec 24 millions. La Californienne semble n'avoir véritablement commencer à perfer en live qu'en 2023 : son total de gains sur Hendon Mob à quoi qu'il arrive déjà triplé.
Le maillot à poids du meilleur grimper revient à Yake Wu : parti avec 3,5 BB ce matin, le Chinois a monté plus de 20 millions aujourd'hui !
Le premier ITM Main Event de Richard Lowe remonte à 2005. Son troisième sera dans tous les cas le plus beau, avec un Day 7 entamé dans la moyenne des jetons.
"I did nothing. I just got lucky". Et le vainqueur du PSPC 2023 Aliaksandr Shylko insiste : "Je dis la stricte vérité !" Avec son petit stack, il faudra que le pull continue de dire vrai au Day 7.
Les éliminés français du Day 6
Cliquez pour consulter l'article correspondant à chaque déception tricolore du jour...
75e : Sami Bechahed 120 000 $
80e : Dimitri Joubert 120 000 $
85e : Nicolas Vayssieres 100 000 $
91e : Sean Marshall 100 000 $
104e : Olivier Chaume 100 000 $
131e : Valentin Oberhauser 85 000 $
140e : Clément Van Driessche 70 000 $
148e : Emilien Pitavy 70 000 $
Wouf
Rendez-vous est pris samedi à midi (21 heures en France) pour un Day 7 qui va nous rapprocher dangereusement de la table finale du Main Event : de 59 joueurs sur la ligne de départ, on devrait logiquement tomber à 18. Avec encore quatre compatriotes, comme en 2016 ? Rêver, cela fait aussi partie de notre métier !
Benjo, Fausto, VictorP & Caroline Darcourt