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Alex Réard ou la force tranquille

- 18 juillet 2023 - Par Benjo DiMeo

Alexandre Réard décroche son deuxième bracelet WSOP. Son premier gain à sept chiffres est remporté sur l'un des tournois les plus difficiles de l'été. Après la consécration en 2021 vient le temps de la confirmation pour l'un des tauliers du poker français, impressionnant de maîtrise et de sérénité tout au long des quatre derniers jours.
Event #90 : NLHE 6-max Championship 10 000 $


Alexandre Reard 2e bracelet WSOP 10K 6-max Winamax reportage coverage
« Champions du monde !
Champions du monde !
CHAMPIONS,
CHAMPIONS,
CHAMPIONS, DU MONDE ! »


Il est 14h32 à Las Vegas en ce lundi 17 juillet, et sur le plateau télévisé du plus gros tournoi de poker du monde, les deux derniers joueurs en course font la grimace. Leurs factions de supporters aussi.

À quelques mètres des spotlights braqués sur Daniel Weinman et Steven Jones, un autre tournoi des WSOP vient de s'achever. Et pas dans la discrétion. Les clameurs qui s'élèvent de cette table secondaire menacent carrément de voler la vedette aux ultimes prétendants à la couronne suprême du poker. Pire encore : ces chants et célébrations sont hurlés en français. Définitivement pas la langue la plus populaire au pays de l'Oncle Sam.

C'en est trop pour les familles et amis de Weinman et Jones, qui tentent une contre-offensive depuis les gradins. « USA ! USA ! USA ! » Effectivement : le Main Event va s'achever par la première victoire américaine depuis 2018. Mais les Français encore présents à Las Vegas pour les ultimes tournois des WSOP 2023 n'en ont cure. Ils sont là pour célébrer le nouveau triomphe d'un de leurs meilleurs représentants. Alexandre Réard vient de remporter son second bracelet de Champion du Monde. Sur l'un des tournois les plus difficiles au programme, qui plus est. Ce n'est pas le Main Event, quand bien même il a rassemblé plus de 10 000 joueurs, qui va gâcher leur quart d'heure de gloire bleu-blanc-rouge.

Alexandre Reard 2e bracelet WSOP 10K 6-max Winamax reportage coverage
Florian Ribouchon, Jonathan Therme, Erwann Pecheux, Julien Sitbon, Arnaud Enselme, Romain Lewis, Ivan Deyra, Rosalie Petit, Davidi Kitai... Parmi ceux qui célèbrent leur héros du jour, on trouve de tout : ceux qui ont déjà vécu ce moment unique, ceux qui sont passés à deux doigts de le vivre, et ceux qui se disent « la prochaine fois, c'est sûr, ça sera moi. »

Légère et bon enfant, la joie débridée du clan tricolore prend cependant l'air d'un cheveu dans la soupe solennelle qu'on nous sert toujours à la fin du Main Event. Les « Sssssssh » commencent à monter depuis les gradins et du côté des arbitres. L'un des hommes en costard, le toujours autoritaire Charlie Ceresi, doit prendre les choses en main. « OK, vous allez l'avoir, votre photo souvenir. Mais on va faire ça vite, et dans le calme. » La troupe de supporters est invitée à faire le tour de la barrière afin de rejoindre Réard à table. La scène est absurde : on leur demande de laisser éclater leur joie pour les objectifs... mais avec le bouton "Mute" enclenché. Les cris s'élèvent tout de même, impossibles à réprimer. Les appareils photos mitraillent. Puis Ceresi disperse la foule. Le Main Event doit retrouver son cours normal.

Hier soir, lorsqu'une trêve provisoire a été déclarée sur l'Event #90, le fameux 6-max à 10 000 $ l'entrée, il ne restait plus que quatre joueurs sur les 550 inscrits. Alexandre Réard était de très loin le favori, avec plus de 50 % des jetons devant lui. De retour au Horseshoe à 13 heures, le Parisien était à l'heure pour son speed date avec l'histoire. En 90 minutes, le plat de résistance était consommé, le dessert commandé, l'addition réglée. Le second bracelet était à lui, accompagné d'un beau million de dollars. Le premier gain à sept chiffres de sa carrière.

Alexandre Reard 2e bracelet WSOP 10K 6-max Winamax reportage coverage
Réard a reçu un coup de main du hasard pour se débarrasser de Justin Liberto en quatrième place : un As-10 qui s'améliore sur le turn contre deux 10 et réduit au silence un joueur dont il se méfiait beaucoup. Derrière, c'est Stephen Chidwick qui s'est chargé d'AJ Kelsall, avec un As-5 tenant bon contre Valet-10, puis une paire de 8 restant en tête contre As-4.

Le heads-up final ne fut qu'une formalité expédiée en trente minutes : même pour le n°4 de la All Time Money List (49 millions de dollars de gains de carrière), la marche était décidément trop haute face à un Réard en maîtrise de bout en bout. Lorsque Chidwick s'est mis à tapis avec 83 sur un turn 8526, l'un des meilleurs joueurs de l'histoire ne pouvait espérer qu'un split contre la quinte 43 du Français. Un miracle qui ne viendra pas, le 2 sur la rivière venant entériner la domination sans partage de la force tranquille du poker français.

« J'ai eu une pensée pour Romain [Lewis] », rigole Réard tandis que les photographes installent leurs trépieds et flashs. « À ses débuts en live, il s'était retrouvé en heads-up contre Chidwick sur un side-event de l'EPT Prague, il avait terminé deuxième. » Mais lorsque le même Romain s'est de nouveau retrouvé en finale face à l'Anglais six ans plus tard, sur l'un des derniers tournois des WSOP 2021, c'est lui qui a eu le dernier mot. Aujourd'hui, c'est au tour de Réard de confirmer la tendance : lorsqu'un Français est en finale, Chidwick n'est désormais plus favori pour la victoire...

Les WSOP 2021, reparlons-en : c'est sur cette édition qu'Alexandre Réard avait remporté son premier bracelet. « Tout sauf un hasard », titrait-on à l'époque après sa victoire sur un 5K 8-max. Son second titre WSOP, il est allé le chercher sur un tournoi deux fois plus cher, et très certainement deux fois plus relevé (au moins). Le « 10K 6-max » des WSOP : un tournoi culte, à l'aura presque mythique. Un peu le Main Event de la génération online.

Alexandre Reard 2e bracelet WSOP 10K 6-max Winamax reportage coverage
Laquelle de ces deux victoires est la plus forte ? Le champion a forcément du mal à choisir. « La première est à part... parce que c'est la première. Aujourd'hui, c'est encore plus beau, clairement, pour plein de raisons : le prize-pool, le format 6-max, le joueur en face à la fin... Et puis, c'est le deuxième, quoi ! En termes de saveur, le premier est meilleur, il y a ma femme qui était à mes côtés, la cérémonie de remise du bracelet était très touchante. En termes de consécration, en revanche, celui-ci est le plus fort. »

Ce fameux 6-max à 10K, Réard le joue chaque année depuis qu'il a atteint le niveau et la bankroll nécessaires pour affronter les meilleurs joueurs de No-Limit Hold'em du monde. « Je ne l'ai raté qu'une fois, en tout j'ai dû le jouer cinq fois. » L'an passé, il avait déjà deep-run, atteignant la dernière journée de l'épreuve. Un mauvais souvenir pour beaucoup de monde à Las Vegas. « Il y a eu ce faux attentat terroriste... » Une fausse alerte, mais une panique véritable, avec des blessés et des traumatismes. « J'étais revenu au Day 3 avec le poignet cassé, le bras cassé, pas soigné... Je n'étais pas dans de bonnes conditions, je n'avais même plus envie de jouer ! Alors cette année, quand je suis arrivé au Day 3, je ne voulais pas louper ma chance. J'étais dans de bonnes conditions, en pleine possession de mes moyens. »

« Quand j'arrive sur un tournoi comme ça aujourd'hui, je sais que je fais partie des meilleurs »

Des paroles qui sonneront vrai pour tous ceux présents derrière le rail pour observer les deux dernières journées de l'édition 2023. Ils y auront vu un Réard impressionnant de maîtrise, prenant les commandes de la partie très tôt durant le Day 3, et restant solide sur ses appuis durant les rares moments où son tapis a chuté. Pour arriver à se sentir aussi à l'aise à la fin d'une compétition si relevée, il faut disposer d'un peu d'expérience. « Je me sens très serein pendant les deep-runs, maintenant. Avant, il y avait toujours un peu de stress, j'avais moins d'expérience, j'étais moins bon. Forcément, ça joue. Aujourd'hui, quand j'arrive sur un tournoi comme ça, je sais que je fais partie des meilleurs, je n'ai pas de doute là-dessus. J'ai confiance en moi, et dans mon jeu. Je sais qu'il faut de la réussite, et j'en ai eu. Quand tous les ingrédients sont réunis, j'essaie de saisir l'opportunité. Et je pense que j'arrive à la saisir plus souvent que jamais. »

Alexandre Reard 2e bracelet WSOP 10K 6-max Winamax reportage coverage
En 2021, Alexandre Réard avait remporté un 5K 8-max déjà bien relevé. Aujourd'hui, on l'applaudit tout en haut du 10K 6-max. Comment on fait, pour passer de très bon joueur à top player ? Le Français met en avant l'importance du mental. « Je travaille avec des coachs depuis des années, pour solidifier le mental. J'ai le même coach depuis deux ans, Christophe. Je le salue, car c'est un peu grâce à lui aussi cette victoire. Ensuite, il y a les groupes de travail, les échanges permanent avec plein de joueurs très très fort. D'ailleurs, il y en a pas mal qui n'ont pas encore eu les résultats qu'ils méritent. »

Selon Alexandre Réard, derrière chaque « railbird » applaudissant la victoire d'un compatriote, il y a un futur Champion du Monde en puissance. « Cela crée de l'émulation. C'est génial de voir que ta victoire rend les autres heureux. Cela motive tout le monde. Consciemment ou non, quand on assiste à une victoire, on va se dire 'Moi aussi, j'aimerais être là'. Et ce n'est pas un sentiment négatif du tout, au contraire. Cela motive à bosser, à aller de l'avant. C'est sain, cela pousse à se surpasser. »

Revenons quelques années en arrière et mettons Alexandre Réard dans la position du railbird sans vrai palmarès. Quel fut son déclic à lui ? « Il y a très longtemps, ça devait être en 2012 ou 2013. Aurélie [son épouse, elle aussi pro, NDLR] avait gagné un tournoi Ladies qui l'avait qualifiée pour les WSOP Europe. On était invités au Majestic à Cannes, pour nous c'était déjà un truc de fous. Moi je jouais au poker, j'allais à l'Aviation Club de France. Ça se passait correctement mais je n'avais absolument pas la bankroll pour jouer les WSOP Europe, pas même les side-events. Et je me retrouve là, à la pause d'un des tournois, je vois débarquer tous les pros français de l'époque, les Américains aussi... En les regardant, je me suis dit 'Un jour, je jouerai ces tournois-là.' Dix ans après, je mesure le chemin parcouru. Et ça fait très plaisir, c'est sûr. »

Alexandre Reard 2e bracelet WSOP 10K 6-max Winamax reportage coverage
Dans le clan des meilleurs joueurs français, chacun a sa personnalité. Il n'est pas dur d'attribuer un rôle à Alexandre Réard. Lui, c'est la force tranquille. Un mec qui reste serein quelles que soient les circonstances. Constant dans ses perfs comme dans son attitude. Il déroule. On l'a encore vu aujourd'hui. Cette vision des choses, l'intéressé ne la nie pas. « Ce serait de la fausse modestie de dire le contraire. Ça s'est bien passé sur ce tournoi, j'ai eu beaucoup de jeu, j'accueille ça sereinement. Les erreurs aussi d'ailleurs : j'en fais, et c'est pas grave, c'est comme ça qu'on apprend. » Et lorsqu'il repère un souci, Réard agit. « L'un de mes points faibles, ça va souvent être la fatigue. Et là justement, sur ces WSOP, je l'ai gérée. Je ne me suis pas pressé, j'ai retiré plusieurs tournois de mon programme, des épreuves qui m'intéressaient moins. »

On avait d'ailleurs commencé notre reportage début juin avec le récit d'un gros deep-run : une troisième place sur un 2 500 $, bonne pour 192 000 $ de gains. Qu'est-ce qu'il s'est passé, durant cet entre-deux de cinq semaines ? « J'ai moins joué, justement ! J'ai sélectionné. Il faut apprendre à se connaître, écouter son expérience. Par rapport à des joueurs de 25 ans, je vais peut-être avoir moins d'énergie pour enchaîner plein de tournois d'affilée. Je sais que mon niveau va s'en ressentir. Donc, voilà : tu fais des choix, tu prends des décisions. »

Moins de tournois au programme, certes, mais avec un objectif qui restait très clair : aller chercher un deuxième bracelet. « En début de séjour, je me suis senti très bien, très pro, pendant 15 jours. J'étais avec Anthony Kazgandjian, un très bon joueur de cash-game, très rigoureux. On était dans une très bonne atmosphère. Puis je suis arrivé dans une villa, j'ai retrouvé des potes. Et là, le séjour est devenu un peu plus léger. Attention, je n'ai pas abusé, ce n'est pas mon genre. Mais on se laisse vite prendre au jeu : c'est Vegas, on est entre copains, on s'amuse, on kiffe le moment. Là, c'est devenu plus difficile. D'ailleurs, après ma finale vous m'aviez demandé si je considérais ce Vegas comme déjà réussi. J'avais répondu 'Ça va dépendre de la suite', car si derrière je ne fais pas d'ITM pendant un mois, c'est trop long, ce n'est pas à la hauteur de mes attentes. Bon, aujourd'hui, je peux te répondre clairement : oui, il est réussi ce Vegas [rires] ! »

Un bracelet, deux bracelets... combien en veut-il ? « Les bracelets, c'est un vrai objectif depuis un an, quand j'ai appris que le record en No-Limit Hold'em, c'était cinq. À vérifier... Si c'est vraiment le cas, alors c'est ça mon objectif, battre ce record. » On n'en voudra pas à Réard de ne pas tenir compte de l'extraterrestre Phil Hellmuth, dont 10 des 17 bracelets ont été remportés en NLHE... « Après, j'ai d'autres objectifs perso. La 'Triple Crown' en est un. Je joue déjà tous les EPT, maintenant il va falloir jouer un peu plus de tournois World Poker Tour. On n'en gagne pas si on n'en joue pas ! »

Côté pognon, ça commence à rigoler franchement. Réard crève officiellement les 5 millions de dollars de gains de carrière en live, avec un gros million remporté d'un seul coup. « La première perf' à sept chiffres, ce n'était pas un objectif. Mais j'y avais pensé à Rozvadov, quand je fais la grosse TF [celle du Main Event, l'an passé, NDLR]. Il y avait 1,4 ou 1,5 million à gagner, mais je finis huitième, je tombe sur un setup. Je n'ai pas pu réellement défendre mes chances, mais ce n'est pas grave, il faut l'accepter. C'est pareil quand ça se passe bien, d'ailleurs : il faut l'accepter aussi, en profiter. »

Alexandre Reard 2e bracelet WSOP 10K 6-max Winamax reportage coverage
Avec cette victoire, Réard remporte au passage un pari lancé en début de WSOP, qui réunissait tous les Français déjà détenteurs d'un bracelet en No-Limit Hold'em. « C'est Jonathan Pastore qui a eu l'idée, ça lui tenait à cœur. » Qui allait être le premier à en gagner un deuxième ? « Ceux qui avaient gagné un bracelet online pouvaient participer, mais il fallait que le second se produise en live. C'est drôle, car j'ai failli mettre fin au pari direct, dès le début des WSOP. Derrière, on a cru que personne n'allait le gagner. Et j'y arrive tout à la fin... » Tous les participants ont misé 2 000 €. La moitié du prize-pool sera reversé à une œuvre de charité, déjà choisie par son épouse.

Dès demain, Alexandre Réard sera dans l'avion pour retrouver l'Europe, la famille, les amis. « Je ne change pas ce qui était prévu, c'est à dire des vacances en France. Après ça, il y aura l'EPT Barcelone, la machine repartira jusqu'à la fin de l'année, j'ai un gros programme. Mais en attendant, j'ai un bon gros mois sans toucher de cartes. Je vais retrouver Aurélie, ça fait quand même un mois que je ne l'ai pas vue. Et puis mes parents, la famille... »

Aujourd'hui, les WSOP ont surpris tout le monde en annonçant un gros festival d'hiver aux Bahamas : 15 bracelets et des dizaines de millions de dollars garantis à Atlantis (l'ancienne maison de la PCA) au début du mois de décembre. Un « WSOP Paradise » qui entre en concurrence frontale avec l'EPT Prague, mais aussi le World Poker Tour au Wynn. Comment choisir ? « J'adore Prague, j'adore l'EPT, j'y vais tous les ans. Mais l'an dernier, quand j'ai vu les chiffres du Wynn, j'ai fait mon choix. J'ai envie d'un titre WPT. Je serai donc à Vegas en décembre. » Une collection de bracelets à agrandir, des titres inédits à chercher sur les autres festivals majeurs de la planète : c'est annoncé, Alexandre Réard ne va guère se reposer au cours des mois à venir.

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Le Roi Sitbon prend sa couronne

- 17 juillet 2023 - Par Fausto

Il était déjà le MVP français de ces WSOP. Au bout d’un festival exceptionnel, Julien Sitbon remporte le premier bracelet tricolore de cette édition 2023. La juste récompense pour un grinder qui n’en finit plus d’étonner et s’envole encore un peu plus vers les hauts plateaux du jeu. Joueur de Live par essence, c’est pourtant sur un 2 000 $ Online que Sitbon devient Champion du Monde.

Il conclut son été de folie par son premier bracelet et un gain de 170 000 $, après un tournoi improbable, émaillé de déconnexions et de road-trip à travers Vegas. Il voulait un bracelet avant ses 40 ans, Julien réalise son rêve avec une petite semaine de retard, qu’on lui tolérera volontiers.

Julien Sitbon

C’était une fin de Vegas bien triste pour le clan français. Absent de la dernière ligne droite du Main Event, les grinders bleus se morfondaient en voyant le compteur de bracelet bloqué à zéro. Mais quand les choses vont mal, on peut compter sur Julien Sitbon.

Déja auteur d’un très gros match sur ces WSOP, le maestro de l’équipe de France surgit encore dans les arrêts de jeu et place un coup de tête magistral, pour faire trembler les filets de Vegas, enfin.

Comme avec Zinédine Zidane en 2006, la France s’en est remise à son capitaine. Tout juste quarantenaire, le numéro 1 du classement GPI France a éclaboussé la compétition de son talent en multipliant les exploits personnel.

Une première occasion de but sur le 3 000 $ 6-max, se heurtant à un double-poteau après un joli une-deux avec Samy Boujmala. Une deuxième un peu plus nette encore sur le 3 000 $ Freezout, où Julien dribble un à un les paliers pour se retrouver en un contre un face à Robert Schulz. Julien ne pouvait cependant remonter son désavantage en jetons et butait sur l’ultime obstacle allemand.

Infatigable, Sitbon continue le pressing, pour récupérer un ballon perdu dans le temps additionnel. Un 2 000 $ online, pas vraiment le terrain de jeu sur lequel on l’attendait, mais quand Julien tient une opportunité, il la saisit. Cette fois, la finition est clinique : Julien s’impose devant 551 joueurs, pour 170 000 $ et le bracelet de Champion du Monde.

La métaphore footbalistique n’est en rien tirée par les cheveux. Elle est amenée directement par le joueur, qui tisse de lui-même le lien après avoir reçu le bracelet des mains de Gregory Chochon.

Virgile Turchi

« Cette année, je m’étais pas donné cet objectif de bracelet. Je t’en avais parlé : je voulais faire une TF, et gagner plus de 500 000 $, ce qui était énormissime. Au final, je fais une table finale, puis une deuxième, où je vois le bracelet pas loin. À vrai dire, je n’aurais pas eu ce bracelet, ça n’aurait pas changé grand-chose à mon bilan. Évidemment, c’est fait, c’est coché. Mais ce qui me parle dans le côté “Champion du Monde”, c’est qu’à la base, je viens du foot. Quand j’étais jeune, mon rêve c’était d’être pro. Je voulais jouer la coupe du Monde, il y aurait les hymnes, la Marseillaise et je jouerais pour mon pays. Là, je me retrouve à jouer les Championnats du monde de poker. Même si c’est complètement différent parce qu’on joue individuellement, on était là à chanter la Marseillaise, il y avait quarante, cinquante Français, et ça m’a touché. Pour moi, j’ai gagné la Coupe du Monde que je n’ai pas pu avoir. »

Déconnexion, resto japonais et grinding “road-trip”

Ce bracelet WSOP a été acquis sur un tournoi online à 2 000 $. Dis comme ça, on imagine un Julien Sitbon seul dans sa chambre, grindant sérieusement avec son set-up, son ordinateur, son casque, avec pour seul compagnie le livreur Uber Eats qui viendrait toquer à sa chambre pendant le deep-run. Pas vraiment, le tournoi de Julien a donné lieu à une histoire improbable, dont le joueur et ceux qui y ont participé se souviendront longtemps.

Julien Sitbon

« On arrive au Paris en voiture dans l’après-midi avec Virgile (Turchi), rembobine le héros de l’histoire. Moi j’allais jouer le 3K H.O.R.S.E. et lui le Closer. Sur le chemin, on parlait des “décos” qu’on avait eu sur des gros tournois online et qui nous avait beaucoup coûté. On mentionnait notamment un spot avec deux As, un autre avec As-Roi à la bulle, la connexion avait sauté et on se disait à quel point ça pouvait être horrible. 

Bref, je joue mon H.O.R.S.E., je sentais que j’étais frustré, j’avais envie de jouer plein de coups et je me dis “Je lance le tournoi Online à côté”, ça va me permettre de me focus et d’éviter de jouer trop de mains. Il s’avère que certains potes de Vegas ne font pas un très bon été. Je me suis dit, “Bon je vais vendre un peu et si jamais c’est la belle histoire, ça sera cool pour tout le monde”. Donc j’ai vendu pas mal de pourcentages à quelques potes, ce qui est assez rare pour moi.

Je commence à jouer sur mon téléphone et quinze minutes après, je bust du H.O.R.S.E. Virgile aussi, on repart tranquillement du casino », poursuit Julien, qui croise alors Nicolas Vayssières.

Chèvre.Miel embarque les deux grinders pour une session shopping et Julien continue de jouer sur son téléphone sur le chemin, dans les boutiques et jusqu’au restaurant japonais où la bande de grinders a rendez-vous pour le dîner. 

« Le problème, c’est que c’est moi qui ait la voiture. Les autres ne conduisent pas ou ne sont pas sur l’assurance et je me retrouve donc à conduire, avec mon tournoi sur les genoux, reprend Sitbon. On arrive au Japonais et Ivan (Deyra) nous rejoint. Ils boivent bière sur bière et moi je suis à côté en train de cliquer. La bulle arrive et là, deux As. J’open, un mec me 3-bet, et tandis que je m’apprête à cliquer… mon téléphone s’éteint. Plus de batterie ! Je me dis “Quelle horreur, on venait d’en parler, il faut vite que j’aille chercher une batterie dans la voiture”, et c’est là qu’Ivan me dit “J’ai l’appli WSOP, joue sur mon téléphone” ».

Toujours bon d’avoir un top grinder online dans les parages. Sitbon parvient à se reconnecter in extremis, à sept secondes du “sit-out”. « Je parviens à cliquer sur raise juste avant que ça saute. Le mec fait tapis en face avec As-Roi et je double à la bulle. Si Ivan n’est pas là, j’aurais jamais eu ce double-up ».

Le tournoi avance, 40... 30... 25 left ! La pression commence à monter, Julien ne veut pas être confronté à d’autres imprévus. « Je vais terminer le tournoi ici » déclare le joueur, dont le plan est cette fois contrecarré par les horaires du restaurant. « On ferme à 23h » informe le serveur. Rebelote, Julien repart pour une session de poker automobile. Le tournoi se terminera à la villa. 

« Je me retrouve encore avec ma partie, à conduire sur l’autoroute et jouer en même temps. Magnifique, j’ai que des 7-2, 6-3 et j’utilise toute ma time-bank à chaque fois pour jouer le moins de mains sur le trajet ». Arrivé à la villa, 12 left. 

Julien s’isole dans une chambre tandis que les grinders guettent la partie depuis la pièce d’à côté et vient ce spot avec A10. « Je ne sais pas si je dois raise-fold ou faire tapis. Je finis par jam et je me fais call par un autre As-10… Et par deux As derrière ». Sitbon doit puiser dans ses ressources et rentre la flush river pour remporter ce coup énorme. 

Un run fluide permettra à Julien de gagner sa place en finale, puis en heads-up, en entendant les supporters hurler à chaque coup remporté.

« En HU, j’ai un spot où le mec me livre complètement et je gagne ». Les potes d’à côté sautent dans tous les sens et viennent retrouver leur héros. Tout le monde finira dans la piscine. Sur les coups de 2 heures du matin, Julien Sitbon vient d’être sacré Champion du Monde.

Sitbon

« C’était à l’arrache, confesse le joueur. Si ça n'avait pas été comme ça, je ne l’aurais jamais gagné. J’aurais peut être été plus en dilettante. Le fait que j’ai vendu à des gens qui sont importants pour moi, et qui n'ont pas fait un très bon Vegas, ça m’a fait kiffer et ça m’a donné encore plus d’abnégation ».

Julien Sitbon, c’est l’assurance-décagoule. Après un Vegas raté, il vous suffit de prendre quelques parts sur ses derniers tournois et vous rentrez chez vous la bankroll rechargée.

« La perf’ à Amsterdam m’a débloqué »

Julien Sitbon

Il y a trois ans, Julien Sitbon était un top joueur du circuit national, enquillant les perfs entre 60 et 80K dans les différents clubs de France, ou sur quelques Sides EPT. L’année dernière, il franchissait un palier, en multipliant les performances sur le circuit international, jusqu’à ce premier score à six chiffres, acquis à Amsterdam en novembre dernier. Hier, il a remporté sa troisième perf' à six chiffres en un mois, au cours duquel il a explosé son record de gains (417 338 $ pour sa 2e place sur le 3 000 $ Freezout). Julien entre encore dans une autre dimension, en s’affirmant comme un prétendant incontournable sur les buy-ins haut de gamme, et sur les tournois les plus prestigieux du monde.

« Je pense que cette perf' à Amsterdam m’a vraiment débloqué, affirme Sitbon. Ce qui est paradoxal, c’est que je n’ai jamais senti de pression par rapport aux montants, que ce soit à Amsterdam ou sur les autres finales. J’ai l’impression de bien ressentir l’ICM, sans pour autant l’avoir vraiment travaillé. Les tournois, c’est toujours le même chemin. Pendant deux ou trois jours, tu montes, passes la bulle, le nombre de table se réduit, les paliers, le HU… C’est un processus partitionné, qui est le même à chaque fois. Et puisque j’ai déjà gagné des tournois, je sais que je peux aller au bout ».

Le chemin est le même mais les adversaires ne le sont pas. Que ce soit face aux amateurs parisiens, aux fields EPT ou aux Américains. 

Julien Sitbon

« Avant, on était dans une range de buy-in qui était plus autour de 1 et 2K. Maintenant, je me sens très bien sur les 3-5K et même les 10K, que je joue de plus en plus. Ce que j’aime, c’est m’adapter. Et pour s’adapter, il faut différents profils. Que je joue Chidwick ou un Américain avec son chapeau, c’est un joueur comme un autre, il faut trouver les failles et se battre », analyse celui qui disait s'identifier à Davidi Kitai.

Avec trois finales WSOP, un record de gains en carrière et un titre de Champion du Monde, cet été de poker restera gravé à jamais dans la mémoire de Julien. Il pourrait également constituer un nouveau tournant dans la carrière du joueur, qui ne cesse de grimper vers les hauts plateaux du poker, et qui pourrait encore s’ouvrir de nouvelles portes.

« Ca dépend ce que t’entends par “porte”, rebondit le joueur. Si tu parles de sponsoring, de jouer les Triton… Le sponsoring, si les rooms reviennent vers moi, on en parlera avec plaisir, mais c’est quelque chose que je ne maitrise pas. Les Triton, c’était déjà en réflexion. J’ai cette idée de gagner au maximum, pour d’ici 4-5 ans, jouer un poil moins. Mais à l’heure actuelle, j’ai faim. J’adore ce que je fais, je prends du plaisir, j’ai juste envie de mieux sélectionner mes parties. C’est ce que j’ai fait sur ce Vegas là. Avec les années, je sais comment être optimal. Je sais ce qui me réussis, ce que je dois faire pour être meilleur. La porte qui s’ouvre pour moi, c’est de réussir, mentalement et physiquement, à pouvoir être au meilleur à chaque fois que je m’assois à une table de poker. Réussir à trouver la clef qui te convient à toi. Et je pense l’avoir trouvé  ».

Cette faim sera-t-elle rassasiée par un titre en particulier ? Par un nombre de bracelets, une Triple Crown ?

Julien Sitbon

« Je suis un compétiteur. Bien évidemment, je n’ai encore rien fait sur ce Main Event de Las Vegas. Ca reste dans un coin de ma tête. Il y a aussi des EPT, des WPT, mais je n’ai pas de but ultime. Je kiffe toujours, je joue, je parle avec les gens, je rigole, je découvre de nouvelles personnes. Ces deux dernières années, je me suis beaucoup plus ouvert. Je ne créais pas d’affinités avec les gens, je ne parlais pas de ma manière de jouer. Je me suis autorisé à le faire parce que c’est quand même un métier très solitaire et qu’il faut accepter de prendre du plaisir dans ces moments-là. C’est dans cette continuité que je veux aller ».

Julien Sitbon remporte son premier bracelet, et l’unique titre français de cette édition. À moins que… Alex Réard et Farice Bigot sont bien placés à l'approche de la finale du 10 000 $ 6-max, de nombreux tricolores se sont lancés dans “les tournois de la dernière chance”, et même Sitbon n’en a pas terminé avec ces WSOP.

« Je n’ai pas fini, prévient le joueur. Il reste encore trois jours, je m’arrêterais après. Ensuite, j’aurais un mois de vacances tranquille où je ne vais pas toucher à une carte. Je vais aller en safari en Tanzanie avec ma copine, j’ai hâte d’y être et on verra pour la suite ». Julien a remarquablement dompté la jungle américaine. Qu'en sera-t-il de la savane tanzanienne ? Pas de coverage prévu sur cette aventure, mais le lion Sitbon nous a prévenu : sa faim est loin d'être rassasiée. Aujourd'hui, le roi du poker français a simplement pris la couronne qu'il lui était dûe

Quatrième finale de l'été pour Joao Vieira

- 14 juillet 2023 - Par Benjo DiMeo

Event #80 : H.O.R.S.E. High Roller 25 000 $

Joao Vieira
Chaque été depuis son arrivée dans le Team Winamax, c'est la même chose : Joao Vieira s'astreint à l'un des programmes les plus chargés au sein de la confrérie des pros. Pourquoi se limiter aux seules épreuves de No-Limit Hold'em lorsque l'on aime jouer à tout, et que l'on sait jouer à tout ? Depuis le 1er juin, le Portugais fait partie des meubles sur les WSOP, jonglant entre les Day 1, Day 2 et Day 3 sur tout ce que le calendrier des Championnats du Monde compte d'épreuves pour spécialistes.

Six semaines après son arrivée à Vegas, son acharnement n'a pour le moment pas été récompensé par un troisième bracelet. Mais c'est bien tout ce qui lui a manqué au cours d'un été où on l'a vu absolument partout : 8e sur l'un des premiers High Roller au programme (25 000 $ l'entrée), 7e sur le Deuce to Seven Triple Draw à 10 000$, 10e en Mixed Triple Draw, 8e sur le Stud High-Low Championship.... plus quelques autres bricoles. Dernier coup d'éclat en date hier soir : une quatrième place sur la très prestigieuse finale du HORSE High Roller à 25 000 $, en compagnie de Mike Matusow, John Henninghan, Josh Arieh, Scott Seiver, excusez du peu.

Longtemps chip-leader, Joao s'est fait crucifier à quatre joueurs restants sur un énorme pot de Razz où son 10-7-6-4-As c'est fait battre à la pointure par le 10-7-5-4-3 de Dan Heimiller. L'an passé, c'est sur la toute dernière ligne droite du festival. Il lui reste encore une poignée de chances de signer un triplé WSOP. Certes, la plupart de la dizaine des épreuves restant au programme seront jouées en No-Limit Hold'em. Mais c'est bien dans cette variantes que le numéro 1 portugais a remporté ses deux titres de Champion du Monde...

Joao Vieira

Joao Vieira

Joao Vieira

Joao Vieira

Joao Vieira

Joao Vieira

Joao Vieira

L'été où tout le monde est passé tout près

- 12 juillet 2023 - Par Benjo DiMeo

Comme nombre de ses compatriotes avant lui, Julien Montois a manqué le bracelet d'un cheveu
L'ancien ingénieur termine runner-up de l'Event #77 (Lucky 7's NLHE 777 $)
Il sort de sa première finale WSOP avec 400 777 $


Julien Montois
Ils ont beau être tapis dans l'ombre du mastodonte Main Event, ils se font entendre. Eux, ce sont les tricolores dans les gradins du plateau télé secondaire, en train de crier et d'applaudir pour encourager leur poulain du jour, sur la finale du jour, celle du Lucky 7's. Un tournoi gimmick autour du chiffre universellement considéré comme porte-bonheur : 777 $ l'entrée, 7 joueurs par table, et 777 777 $ pour le vainqueur.

De Sarah Herzali sur le 6-max à 1 500 $ à Jérémy Oléon sur le Mini Main Event, en passant par Alexandre Réard, Axel Hallay, Jean Lhuillier, Julien Sitbon, Julien Martini et bien d'autres, les occasions de vibrer furent presque quotidiennes pour la diaspora française de Vegas depuis le lancement des WSOP il y a six semaines. Sur l'une des épreuves les plus populaires de l'été, un Deepstack à 600 $, on en a même eu trois à supporter en simultané. Parmi ceux qui crient le plus fort aujourd'hui : Florian Ribouchon. Comme une forme de renvoi d'ascenseur pour tous ceux qui ont crié pour lui jusqu'au bout du Millionaire Maker.

Toutes ces perfs ont eu droit à la couverture qu'ils méritent dans les colonnes de votre coverage préféré, tout en haut de la section "A la une". Mais jusqu'à présent, aucune ne s'est achevée avec une photo montrant le bracelet et des dizaines de visages rigolards. La fin des World Series of Poker est devant nous : dans huit jours très exactement, les salles de bal du Horseshoe et du Paris seront intégralement vidées de leurs occupants et de leur équipement. Les remplaceront aussitôt une armée de shampouineuses, prêtes à laver la moquette des foulées de dizaines de milliers de joueurs ayant tenté 50 jours et 50 nuits durant de remporter l'un des 95 bracelets mis en jeu sur cette 54e édition.

Julien Montois
Huit jours et une petite vingtaine de tournois : c'est peu, pour tenter d'enfin faire résonner la Marseillaise à Vegas cet été. En tout cas, ce n'est pas demain que les couplets de Rouget de Lisle seront hurlés au Horseshoe : Julien Montois, le héros du jour, a obtenu le même résultat que Sitbon et Ribouchon : la dernière avant le bracelet. On dit souvent que lorsqu'on termine deuxième d'un tournoi de poker, on ressent la même chose qu'en terminant deuxième d'un combat de boxe. Malgré les dollars qui se comptent en centaines de milliers, malgré la satisfaction d'avoir fait mieux que 99,9 % des inscrits (7 300 ici), cet adage n'a jamais été démenti.

"Comment je me sens ? Je me sens comme le mec qui n'est pas sur la photo !", lâche l'ancien ingénieur, que l'on avait rencontré pour la première fois sur l'édition 2019 du WPO Dublin, un peu plus d'un an après sa transition vers le poker pro. Mais, derrière la déception de circonstance pointait déjà la satisfaction d'avoir signé la meilleure performance de sa carrière en live : un colossal cash à 400 000 $ envoyant aux oubliettes son high score (un titre à 31 100 € sur une étape lilloise du Barrière Poker Tour, qui remontait à 2014). "En début de finale, je visais le Top 4, donc c'est déjà ça. Aller aussi loin, c'est une aventure de ouf. C'est un luxe, le rêve de tous les joueurs."

Julien Montois
Le heads-up final contre l'Américain Shawn Daniels n'a pas duré longtemps... "On a tous les deux joué super agressivement." Dans les conversations entre potes d'après finale, un sujet fâcheux monopolisait les débats : la taxation à la source des gains qui menaçait Montois sur le sol américain, le pro n'ayant pas eu la possibilité de se mettre d'équerre avec le Fisc local. Il n'est pas le seul parmi les Français perfant à Vegas, loin de là : depuis un an, le sujet est un véritable sparadrap du Capitaine Haddock pour la communauté tricolore, pour des raisons ubuesques que nous avons eu l'occasion d'évoquer lors de l'édition 2022 des WSOP. Depuis maintenant deux éditions, nombreux sont les joueurs français, amateurs et pros mélangés, qui ont vu leur quart de gloire en partie gâché par ce maelstrom administratif.

En attendant de trouver une solution et récupérer l'intégralité de son dû, Julien Montois avait tout de même envie de se projeter vers l'avenir. Que va-t-il faire de ses gains ? Il va falloir payer les stakeurs dans un premier temps... "Mais pour le reste, je ne vais pas faire de folies : je vais me payer une baraque !"

Julien Montois

Julien Montois

Julien Montois

Et bon anniversaire maman !

- 4 juillet 2023 - Par Fausto

Débarqué à Vegas avec son frère et sa maman, à qui il faisait découvrir la capitale du jeu pour fêter son 59e anniversaire, Jérémy Oléon se retrouve quelques jours plus tard en finale d’un tournoi de plus de 5 000 joueurs, à jouer pour un demi-million de dollars. Passé à deux doigts du bracelet au cours d’un 3-max à sensations, l’Auvergnat prend finalement la 3e place, pour 255 215 $. Le récit de cette finale, suivi de l'interview juste ici.

Event #74 : 1 000 $ Mini Main Event (Fin)

Altéras Oleon

Tout est parti d’un cadeau d’anniversaire. Pour ses 59 ans, Jérémy et Julien Oléon ont offert à leur maman ce dont elle rêvait depuis longtemps, un voyage à Las Vegas. « On est un petit peu joueurs dans la famille » me souffle Patricia Almeras. « On est venu de jeudi à vendredi. C’est énorme que nos belles filles aient donné leur accord pour laisser partir leur mari dix jours avec leur mère ». Les belles-filles en question peuvent être rassurées. Leurs époux reviendront bientôt à la maison… les valises chargées de dollars. Au bout de ce voyage poker en famille, Jeremy vient de claquer son “one-time”, en terminant 3e du Mini Main Event, pour 255 000 $. 

L’ingénieur auvergnat était même tout proche du bracelet. Perçant un field monstre de 5 257 joueurs, Jeremy se retrouve chipleader à l’amorce du Day 3. Plus que quatre joueurs à battre pour remporter le demi-million et le bracelet WSOP. Évidemment, la maman Patricia et le frère Julien sont aux premières loges et le rail français a sorti les coqs, bérets tricolores et autres vêtements folkloriques pour porter haut les couleurs de la France. « J’avais pris ça dans la valise, en pensant qu’on se déguiserait quand on irait à Downtown. J’avais acheté tous ces trucs, mais jamais je n’aurais pensé qu’on les mettrait pour une table finale ».

Table Finale

Patricia Almeras n’est pas une inconnue de notre room. Venue de temps à autre sur les évènements Winamax, la coiffeuse de profession avait carrément relooké le Team lors du dernier SISMIX, à l’occasion d’un des savoureux flashs quotidiens. Difficile de décrire les vibrations de la maman, subjuguée à chaque gros pot remporté par son fils. « Ça va à 200 à l’heure » confesse Patricia en évoquant ses BPM. « Déjà hier, j’ai stressé. On était là pour tous les coups ».

La famille s’apprête encore à partir pour un tour de montagnes russes. Vers le haut tout d’abord, après un énorme tapis préflop remporté par Jeremy, alors deuxième en jetons, sur un duel AQ contre AJ chez le chipleader Josh Reichard, alors qu’il reste encore quatre concurrents. La pression ICM est colossale, mais Jeremy frappe la Dame tout de suite et valide le coup dès la turn. Le voilà chipelader avec quasi 60% des jetons en circulation.

Après l’élimination de Jennifer Abad (4e pour 193 103 $), Jérémy perd un gros coup contre ce même Josh Reichard. Le Français check/raise sur le flop 982, puis ralentit sur la turn J. Check-back de l’Américain, mais sur un nouveau check de Jeremy, Josh envoie le parpaing 52 000 000 sur la river 3. Le Français finit par payer avec 87, insuffisant pour battre le QQ de Reichard.

Oleon

Le Français conserve un petit 90 000 000 quand le troisième, Bradley Gafford en compte tout juste 15. Les deux leaders vont alors assister à une remontée fantastique. Un premier double-up A10 contre le K8 de Reichard, un deuxième presque consécutif avec AQ contre 106, toujours face à Reichard et un troisième avec 1010 contre 86. En trois coups, les deux Américains ont quasi inversé leur stack.

Jeremy se retrouve au coude à coude avec Josh et les deux hommes s’expliqueront directement en batailles de blindes. Open shove K4 sur la blinde de l’Américain qui snap-call avec A3. K86 sur le flop, J turn. Josh vient de faire la flush, le Français est éliminé en 3e positon de ce Mini Main Event

Oleon

Une performance exceptionnelle pour l’amateur de Royat. Un homme qui joue trois tournois par an, qui espérait seulement ramener un petit ITM estampillé WSOP. Ça sera finalement un “one-time" pour 255 215 $. Après avoir appelé sa femme et ses deux enfants, qui suivaient les aventures depuis l’Auvergne, Jérémy s’est arrêté quelques instants pour nous raconter ses émotions et comment il a vécu cet exploit de l’intérieur, à travers la traditionnelle interview.