Winamax

À jamais la première

- 13 juillet 2023 - Par Flegmatic

Dernière femme en lice sur le plus gros tournoi du monde, la première joueuse à remporter la Top Shark Academy termine 68e de son premier Main Event WSOP (130 300 $)
Aucune déception, que du bonus, Estelle Cohuet a pris du plaisir jusqu'au bout
Il reste 65 joueurs
Main Event 10 000 $ (Day 6)

Estelle Cohuet

De son entrée dans le tournoi jusqu'à l'interview qui a suivi son élimination huit jours plus tard, Estelle Cohuet ne s'est jamais départie de son rire. Des éclats de voix si fréquents et si communicatifs qu'ils lui attirent instantanément la sympathie de ses voisins de table et de tous les observateurs qui gravitent autour. "Estoy bien. Je suis bien," sont ses premiers mots au moment de venir la féliciter devant le bureau des payouts, son petit ticket indiquant "68e place" dans la main. À moitié française, à moitié espagnole, la native de Millau résidente de Palma de Majorque était déjà très bien intégrée au sein de la communauté poker ibérique. C'est en partie grâce à cette dernière que Dourbie en est arrivée là. Soutenue en début d'année par une poignée de réguliers et une armée d'anonymes, elle sortait vainqueur, contre toutes attentes - y compris les siennes -, du vote de repêchage lui ouvrant les portes de la finale de la Top Shark Academy espagnole. Une finale qu'elle allait outrageusement dominer, pour devenir la première femme de l'histoire à acquérir le statut de Top Shark, France et Espagne confondues. Déjà à l'époque, elle n'en faisait que peu de cas, préférant mettre en avant son parcours personnel, son profil cartes en main, et son abnégation pour franchir une à une les étapes de la compétition.

Estelle Cohuet TV

Un parcours qu'Estelle a en quelque sorte reproduit sur ce Main Event. Son premier Main Event. Dès le Day 1B, elle prenait les rênes du Team Winamax, devant les expérimentés Gaëlle Baumann et Adrián Mateos. Avec la force de l'insouciance et un atout non négligeable : son image. Encore en 2023, les clichés sur les joueuses de poker ont la dent dure. Estelle le sait et elle comprend très vite comment en jouer. Pendant que la majorité de ses adversaires la prennent pour la nit de la table, elle multiplie les bluffs. C'est alors que ses voisins se rendent compte de sa stratégie qu'elle se met à leur montrer des monstres. Changements de rythme, intelligence tactique et profiling. Estelle a beau avoir joué l'immense majorité de ses mains aux tables online, elle sait déjà s'adapter et se sent totalement dans son élément. "Le niveau n'est pas plus élevé que sur les tournois que je joue sur Winamax !," nous a-t-elle soufflé plus d'une fois. N'y voyez aucune arrogance, mais plutôt une prise de conscience : elle n'a pas à avoir peur. Ce tournoi hors norme, elle va le jouer normalement.

Estelle Cohuet - Kara Scott

Pourtant, chaque jour apporte son lot de nouveautés et de petites contrariétés. Dès la première main de son tournoi, Estelle perd les deux tiers de son tapis de départ. "Honnêtement, je n'étais pas bien, avoue-t-elle. Je me dis 'Merde, je ne vais quand même pas bust la première...'" Une quinte flush la remettra rapidement en selle. Au Day 3, elle s'offre le King Bruno Fitoussi sur un 3-way all-in rocambolesque. Au Day 4, outre l'entrée dans les places payées, elle retombe dans la zone rouge suite à un bad bat avec deux 10 contre deux 8. Au Day 5, elle débute à contrecœur la journée sur le plateau télévisé, sur lequel elle va rester durant quatre des cinq niveaux de la journée, tout en continuant à jouer son jeu habituel. Enfin, au Day 6, suite à l'élimination rapide de Nikita Luther, elle reçoit le titre honorifique de Last Woman Standing. Tout ça, sans paniquer, sans s'affoler, mais en restant elle-même. "Être la dernière femme du tournoi, je m'en fichais un peu. C'était plus important pour eux que pour moi. Mais j'ai joué le jeu bien sûr. Et c'est de la bonne publicité, pour moi comme pour Winamax." Saluée par Mark Teltscher, adoubée par Kara Scott, notre Pro reçoit les applaudissements nourris et mérités de l'Event Center du Horseshoe au moment de quitter la zone de tournoi.

Estelle Cohuet OUT

Sa dernière journée de Main Event, Estelle l'a disputé avec les moyens du bord. C'est-à-dire pas grand-chose. En mode survie une majeure partie de ce Day 6, la Top Shark grappille quelques petits pots de ci, de là, n'hésitant pas à s'engager quand il le fallait, à l'image de ce 2-barrel shove gagnant contre Toby Lewis. Constamment entre 10 et 20 BB, elle finit par trouver un spot préférentiel : Roi-10 de SB dans un pot non ouvert pour ses douze dernières blindes. Malheureusement, son voisin de gauche se réveille avec As-Dame. Ni une, ni deux, la Française se lève et dégaine son téléphone pour immortaliser ce qui peut être le début d'une belle remontada. Trois briques au flop, un As turn, Estelle est drawing dead.

Estelle Cohuet OUT

Ses longues heures accrochées à son petit tapis lui ont permis de franchir plusieurs gros paliers, jusqu'à atteindre celui à 130 300 $. Deux fois et demi le montant de son contrat de Top Shark ! Et ce, en plus de souvenirs qui resteront longtemps gravés. "J'avais une assez mauvaise image de Vegas. Une ville aux portes du désert, avec tous ces golfs, ces piscines, ces lumières... Écologiquement c'est quand même un désastre. Et j'ai beau adorer le poker depuis toutes ces années, je n'aime pas du tout le milieu des casinos. Donc autant dire que je ne serais jamais venue ici de moi-même en vacances." Mais ça, c'était avant. Avant de se laisser emporter par la foule de ces World Series et l'atmosphère globale qui régnait au Paris et au Horseshoe. "Tout ce qui est lié au poker est super positif. Il y avait une super ambiance. Je n'avais qu'un seul objectif : c'était d'atteindre les places payées. Le reste, ce n'était que du bonus." Pour une performance gravée à jamais dans l'histoire du Main Event.