Pour son 59e annviersaire, Jérémy et Julien offraient à leur maman ce dont elle rêvait depuis longtemps : un voyage à Las Vegas. Cette famille de passionnés vivait ainsi leur première fois dans la capitale du jeu. Elle se ponctue par le one-time de Jérémy Oléon, 3e du Mini Main Event, pour 255 215 $. Une perf' stratosphérique, inattendue, sous les yeux de sa famille. Quelques minutes après son élimination, l’amateur auvergnat se livre à nos micros pour commenter son exploit.
Jérémy, tu viens de finir 3e du Mini Main Event pour 255 215 $. Comment tu te sens ?
Le premier truc qui m’est passé par la tête, c’est un brin de déception. Quand on arrive là, on veut toujours viser plus haut et aller chercher le bracelet. Mais quand je prends un peu de recul, c’est juste incroyable. Je joue trois tournois dans l’année. Soit à Royat à coté de chez moi, ou sur un week-end à La Grande Motte une fois par an… Et je suis là, aux WSOP avec les plus grands. Finir 3e sur plus de 5 000 joueurs, je n'arrive toujours pas à réaliser, c’est juste incroyable.
J’ai l’impression que tu prends déjà beaucoup de recul, alors qu’il y a cinq minutes, tu jouais une partie à un demi-million de dollars, où le chiplead valsait toutes les cinq minutes. Comment as-tu vécu tous ces swings ?
C’était fort en émotions, mais j’ai réussi à rester dans ma bulle. Je suis resté concentré au maximum, j’essayais de faire abstraction de tout ce qu’il se passait à l’extérieur, de jouer mon jeu et de profiter surtout ! C’est le truc qui arrive une fois dans sa vie. Enfin, si ça arrive. Hier déjà, je n'avais même pas regardé les paliers d’après. Je ne voulais pas trop me projeter. Juste vivre le moment présent, jouer, profiter et aller le plus loin possible.
"Mon rêve, c'était d'avoir un ITM"
Justement sur les jours précédents, comment ça s’est passé ?
Les jours d’avant, j’avais fait le Colossus. J’ai joué 2h sur le 1A, deux heures sur le 1B et troisième bullet sur le 1C, j’ai joué une heure je pense. Vraiment, je ne m'étais même pas amusé. Le Mini Main, ça a bien commencé, j’ai joué un jeu peu low-variance et j’ai monté les jetons tranquillement. Je me suis retrouvé avec quatre startings stacks après deux heures. Après j’ai stagné, et j’ai quasi plus joué pendant quatre heures jusqu’à la bulle. Je me retrouve à 90 000, soit quatre blindes, mais mon objectif, c’était de faire l’argent. Je rêvais d’être ITM, d’avoir ma petite ligne WSOP Las Vegas… Je jouais pour ça ! J’aurais pu avoir n’importe quelles cartes à la bulle, je les aurais jeté. Même les As, j’aurais jeté, je voulais le min-cash.
Au Day 3, tu t’es retrouvé avec un gros avantage après le coup A-Q contre A-J, puis derrière, la finale a encore basculé.
Je fais un call un peu limite. Je le vois vraiment sur un tirage manqué. Ce qui me fait payer, c’est que je regarde ces jetons et je me dis si le call passe, il va lui rester 20 millions, l’autre 10 millions, j’en aurais eu 280. C’était le call de la gagne en fait. C’est ce qui me fait payer.
"C'est ma mère qui nous a appris le poker"
On avait rencontré ta maman Patricia lors du SISMIX. C’est elle qui vous a initié au poker ? C’est quoi vos habitudes de jeu dans la famille ?
On joue depuis longtemps avec ma mère et mon frère. C’est ma mère qui avait commencé à jouer à Royat, elle faisait des initiations au poker. Elle nous a appris, puis on s’est pris au jeu. On est des joueurs dans l’âme. J’adore jouer, pas seulement aux jeux d’argent. Mais ça reste un loisir, je joue quand j’ai le temps.
Patricia nous a dit que tout est parti d’un cadeau d’anniversaire : un voyage à Las Vegas que ton frère Julien et toi lui avez offert. Comment ça vous est venu ?
On savait qu’elle voulait aller à Vegas, mais elle ne parle pas un mot d’anglais donc Vegas toute seule, c’était compliqué. Elle avait failli partir toute seule quand même en décembre dernier. Elle était motivée. Avec mon frère, on s’est dit que ça ferait un beau cadeau. Pas de 60 ans, puisqu’elle n’aime pas fêter les dizaines, mais pour les 59 ans, c’est bien. Et nous aussi on adore le poker, donc on était content d’être là aussi. C’est quelque chose qu’on fait une fois dans sa vie.
C’était une très belle idée de cadeau et je crois que le destin vous récompense aujourd’hui…
Oui, je n'en reviens toujours pas. On va revenir les valises pleines d’argent et de souvenirs.
Est-ce que ça va te donner envie de revenir, de faire d’autres tournois, de jouer plus cher ?
Ce n'est pas ça qui me fera jouer plus cher. Ça va peut-être me donner envie de jouer plus, mais pour ça, il faut du temps. J’ai ma famille, j’ai mon boulot, j’ai des amis… Je n'ai pas envie de passer ma vie à travers les villes pour faire plein de tournois. Faire ce que je fais aujourd’hui, ça me va très bien. C’est plus qu’un kiff, mais c’est un moment, on va dire.
Juste après ta sortie, je t’ai vu d’ailleurs prendre le téléphone.
C’est ma femme et mes deux enfants. Déjà hier, avec le décalage, quand elle est allée se coucher, il restait quelques chose comme 350 joueurs. Quand je l’ai réveillée, on était plus que 5 et j’avais mis les jetons dans le sac, avec 147 000 assurés. Elle ouvrait les yeux et elle se disait “Quoi ? Qu’est-ce qu’il se passe ?”. Là, troisième, elle est super contente. Bien sûr, dommage de pas aller au bout. D’ailleurs, c’est celui qui était short qui se retrouve super chipleader. Il a enchainé les double-up, il y a ce coup où on partage… Mais bon, j’en ai touché aussi des comme ça pour être là aussi. C’est le poker.
Et du coup, on file buy-in le Main Event ?
Ah, non. On part vendredi de toute façon. Et puis on a nos femmes et nos enfants qui nous attendent. On va peut être faire le 800 $ du Venetian, mais on va surtout profiter de Vegas en famille.
Propos recueillis par Fausto Munz