Grand animateur de ce tournoi, que ce soit à table comme en dehors, Andreas Kniep se fait éjecter au pied du podium sur un bad-beat effroyable. Sorti sous l’ovation du public, l’Allemand a encore marqué ce tournoi par sa fantaisie et sa spontanéité, comme il l’avait déjà fait lors des deux précédents Main Event.
Event #53 : 1 500 $ Millionaire-Maker (Final Day)
Cette moustache poursuit sa liaison passionnelle avec les WSOP. Il y a deux ans déjà, Andreas Kniep marquait de son empreinte le Main Event 2021. Sa couette en palmier dressée sur le crâne, son style vestimentaire excentrique, son jeton fétiche du Bayern Munich et ses célébrations enflammées avaient conquis caméras, couvreurs et spectateurs…
Son parcours fabuleux s’arrêtait malheureusement en 18e position, quelques minutes après avoir perdu le pot de superchipleader sur un bad beat qui doit encore certainement revenir dans ses cauchemars. Deux As chez Kniep, deux Rois chez Andreas Onikoul, un pot à trois averages, et un Roi fatal tombé sur la river.
L’année dernière, Andreas remettait ça en atteignant encore le Day 3 du plus beau tournoi du monde. Cette fois, l’Allemand n’a pas affolé les compteurs, mais son bonnet rose et sa moustache avait encore largement égayé le tournoi. Nous étions d’ailleurs partis à la rencontre de l’ingénieur logiciel, qui nous racontait alors le campement qu’il monte chaque année à Burning Man, et ses liens avec la musique électronique, et notamment le label Nie Wieder Schlafen.
Pour la troisième année consécutive, Andreas Kniep se fait encore remarquer sur le festival des WSOP. Et encore une fois, c’est autant le style du joueur que sa performance aux tables qui attire les regards.
Hier, il débarquait vêtu d’une salopette de la NASA par dessus un body vert fluo. La chemise de finale est plus traditionnelle, mais le bonnet rose, la moustache et le jeton du Bayern sont toujours là. Quand à sa bonne humeur, il suffit d’un petit coup du destin pour allumer la flamme.
Dès les premières minutes de la finale, le joueur hurlait son bonheur vers le ciel après ce flip décisif remporté contre De Souza. Une joie tellement expressive qu’Andreas en cassait le rebord de l’estrade télévisé, sur laquelle il s’était sur-élevé pour communier avec son public.
Un kop qui s’est d’ailleurs habillé aux couleurs de son héros. Une grosse dizaine de copains, tous chapeautés d’un bonnet rose, et qui n’ont pas hésité à apporter les accessoires fantaisistes qu’ils utilisent certainement à Burning Man, à l’image de ces colliers à paillettes ou de cette grande licorne en hélium qui flotte au-dessus de leur rail.
Andreas ne fait pas seulement dans l’esthétique. L’ingénieur logiciel a beau être un amateur assumé, il n’en demeure pas moins un sacré joueur de poker. Plutôt du côté aggro de la force, Kniep met perpétuellement ses adversaires dans des spots indélicats. Et lorsque son adversaire tente de lui mettre la pression, Andreas est capable de poser ses balls sur la table pour payer avec des mains peu évidentes.
J’en veux pour preuve ce call téméraire avec AJ, alors que Pavel Plesuv lui demandait l’intégralité de ses presque 30BB sur un duel de blindes. Au vu des considérations ICM et de sa positon (2ème en jetons à cet instant), beaucoup aurait préféré lâcher l’affaire et attendre un spot plus sûr. L’Allemand s’est quant à lui tourné vers son public, lâchant un petit “it’s gonna be a big one” avant d’avancer la pile de pions au milieu : Call.
Pavel retourne AJ, pour un pot qui se dirige tout droit vers le split… Jusqu’à ce flop 1042. Petit frémissement dans le public, attention aux cœurs. 8 sur la turn. La plaisanterie commence à ne plus être drôle.
Andreas marche vers le croupier et lui glisse un petit mot à l’oreille, comme pour lui dire “s’il te plait, arrête avec tes mauvaises blagues”. 6 river. Andreas est passé à deux doigts de la correctionnelle, mais récupère ses pions. Sur le chemin de sa chaise, il s’arrête de nouveau près du croupier, à qui il délivre un bisou sur le crâne, avant de reprendre la partie. Le “Kniep style”.
Le deuxième duel avec le Moldave accouchera d’un dénouement moins heureux. Encore une fois, les deux premiers au chip count se mettent sur la tronche, Pavel tentant bien sûr de jouer sur la pression ICM. Iso 3,5x pour faire gonfler le pot, check-check sur le flop 789 et Pavel part à l’assaut sur la turn 5. 7 500 000, payé. River 2, 18 000 000 envoyé. Kniep prend deux minutes pour réfléchir, se lève de sa chaise quelques secondes puis avance encore une pile de jetons, pour un call courageux avec son Q9. Andreas pense même avoir fait le hero-call, jusqu’à ce que Plesuv retourne Q6. La dame dominée avait trouvé la quinte. Pavel s’envole au-dessus des 130 millions, Andreas tombe sous les dix blindes.
Un coup d’arrêt terrible, mais l’Allemand n’est pas du genre à se laisser abattre. Un premier double-up avec A5 contre K10 lui permet de revenir près des 30 millions. Dans la foulée, Andreas pose le piège avec la meilleure main du poker.
Open Florian Ribouchon 4 000 000 bouton, call sournois de l’Allemand et Plesuv tombe dans le piège. 3-bet shove avec A2 pour mettre la pression maximum. Un move qui fait fuir le Français mais pas l’Allemand, qui referme le piège avec ses deux As.
Le spot est parfait pour la remontada et Andreas affiche un large sourire jusqu’à ce flop 1053. Même chorégraphie que tout à l’heure, Kniep se dirige vers le croupier et lui glisse deux mots à l’oreille. Mais cette fois, les cartes sont sans pitié. 4 sur la turn, Pavel vient de rentrer la ventrale. Un pique pourrait tout de même sauver l’Allemand. Mais le river scelle le sort d’Andreas, éliminé au pied du podium, pour 501 182 $.
L’espace de quelques secondes, “Rayo” est sonné. Comme il y a deux ans, le joueur s’est fait trahir par la meilleure main du poker, dans un pot pesant près d’un million de dollars. Pourtant, il suffit d’une minute pour qu’Andreas retrouve le sourire. Le clan allemand chante à la gloire de son héros et tous les autres kops, français, moldaves et américains suivent le rythme pour applaudir chaudement Andreas. Un hommage qu’on voit rarement sur une partie de poker. Celui-là est amplement mérité. Bravo Monsieur Kniep, et on espère, à très bientôt !