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Une journée avec... Truiton31, un flambeur à Las Vegas

- 21 juin 2023 - Par Harper

Une journée avec... Truiton31, un flambeur à Las Vegas
« Vous allez voir ce que vous allez voir ! » Il est 10 heures du matin et Grégory Caubet annonce la couleur. À Las Vegas, cet épicurien notoire est venu s'adonner à ce qui est devenu le moteur de sa vie : des journées festives à l'excès. Ou plutôt, « des moments de partage entre amis » comme il aime à les définir avec un sens aigü de la litote. Dernières chaussures AirJordan aux pieds - « je suis allé les acheter spécialement pour l'occasion ! », jean cintré et chemise à fleur entrouverte, il arrive sur la Linq Promenade en affichant un grand sourire. Sur une terrasse de restaurant, il sort fièrement un ticket gagnant de paris sportifs, 5 000 $ transformés en 17 000 grâce aux victoires combinées de Novak Djokovic, des Denver Nuggets et des Vegas Golden Knights. Il prévient : « Je vais tout remiser sur le hockey sur glace cet après-midi ! » OK, allons-y.

Ça aurait dû se finir au GIGN

La modération, ce n'est pas dans les gênes de Grégory. « Avec moi, ça a toujours été tout ou rien » précise celui qui s'est fait connaître sous le pseudo de Truiton31 en transformant 500 € en 400 000 balles sur Winamax, à l'aube du premier confinement. Tout en commandant une première tournée de bières (« pour moi ça sera deux »), Greg revient sur l'évènement qui a changé sa vie. « C'était le 26 décembre 1994, on regardait la télé en famille et on est tombé sur l'intervention du GIGN qui a débusqué les preneurs d'otage du vol Air France à Marignane. Ça m'a marqué pour le restant de mes jours. » Alors qu'il a seulement 14 ans, cette démo d'héroïsme vécue en live le décide de dévouer sa vie à intégrer ce groupe d'intervention. « Je me suis mis à faire du krav maga, du parachutisme, j'ai passé mes brevets de moniteur de secourisme, de moniteur de plongée... Je ne pensais qu'à ça. » Ce qui n'est pas pour véritablement faire plaisir à une maman qui préférerait voir son fils devenir pilote de ligne.

Les rêves du Toulousain sont néanmoins trop forts. Il poursuit sa quête en intégrant STAPS pour gagner en rigueur et en condition physique. « Le problème, c'est que j'organisais des soirées débiles » se souvient Greg, « j'ai fini par être viré six mois de la fac et je suis entré à l'école de gendarmerie. » Après deux ans, Greg atteint la dixième place de sa promo et est autorisé à tenter les sélections pour le GIGN. Mais à l'aube d'un stage d'un mois pouvant le mener au graal, il se fait diagnostiquer une épitrochléite. « C'est une tendinite du coude particulièrement douloureuse » explique-t-il avant d'interrompre son récit pour haranguer un serveur : « On va vous prendre des calamars, des escargots et des chicken wings s'il vous plait. Avec une bouteille de vin rouge. Que la fête commence ! »

Des infiltrations lui permettent de suffisamment endormir la douleur pour rejoindre le stage. Un ami l'ayant déjà effectué le prévient : la dernière semaine sera la plus intense de sa vie. « C'était en mode Guantanamo » détaille Greg. « Le mec me raconte avoir été pendu par les pieds dans une chambre froide, avant de se faire frapper durant 24 heures consécutives pour voir comment il pouvait réagir... »  Décourageant ? Que nenni. « Franchement, je me sentais prêt à vivre ça, je le voulais même. » Un soir, Greg est mis à l'épreuve en se retrouvant enfermé dans une pièce qui a été blindée de gaz lacrymogène. Il doit retrouver une arme, ouvrir les yeux pour lire son numéro de série et s'extirper tout en retenant l'information. Il y parvient.

Le lendemain, le maitre de stage convoque les aspirants encore dans la course. Et leur pose une question : « La douleur est-elle un frein à l'action ? » En habitué des bancs de la fac, Greg commence à écrire une dissertation à base de thèse, antithèse et synthèse. Le maitre bazarde le monologue et lui tend un tout petit bout de papier en échange. « Il m'a demandé de simplement répondre oui ou non. J'ai dit non. » S'ensuit un footing de dix kilomètres avec comme équipement un sac à dos lesté et un fustil d'assault. « Là, les officiers arrêtent six mecs en leur disant que ''c'est terminé''. Nous, on se dit qu'ils ont dû répondre ''oui'' à la question, que ce sont des faibles, et qu'ils sont éliminés. » Mais arrivés sur la place d'armes, le groupe voit les six recalés tranquillement installés sur des chaises.

Une journée avec... Truiton31, un flambeur à Las Vegas
« Ils nous ont demandé de les rejoindre en rampant... Il y avait soixante mètres à faire sur un terrain stabilisé. » L'égo prend le dessus et Greg accélère le plus vite possible. Arrivé au bout, l'officier lui demande : « La douleur est-elle un frein à l'action ? » Greg persiste en répondant non. « Il m'a alors demandé de faire un nouvel aller-retour ! 120 mètres en rampant sur le stabilisé ! » Au prix d'un énorme effort, Greg est de retour pour subir une nouvelle question de l'officier. « La douleur est-elle un frein à l'action ?! » Même son de cloche chez Greg : « Non ! ». « Alors rampez ! » reprend l'officier. « À ce moment-là, je savais que j'avais mal répondu à la question... mais je voulais être le dernier à tenir sur le terrain » se souvient-il. Les aspirants abandonnent un à un et ils ne sont plus que trois, chacun avec un officier se tenant à côté d'eux pour leur poser la question en boucle. Les bras tétanisés et ensanglantés, tremblant de partout, Greg finit par s'effondrer.

Et il va en payer le prix. « Mon épitrochléite a explosé, je ne pouvais plus rien faire et j'ai dû abandonner le stage... » se souvient Greg. « Des Cuba libre s'il vous plait ! » lance-t-il en même temps à un serveur qui s’exécute avec le sourire. « C'est dommage... » reprend Greg avec plus de sérieux. « Je pense qu'ils poussent trop loin la sélection naturelle et qu'ils passent à côté de potentiels bons éléments à cause de ça. » Nous sommes en 2009. Alors qu'il lui est encore possible de retenter le stage dans les années à venir, Greg fait un pas de côté et ouvre la première salle de Krav Maga de Toulouse. Le succès est immédiat : 1000 adhérents dès la première année. Mais dans le même temps, il ne parvient pas à proprement guérir son coude et doit se rendre à l'évidence. Il ne pourra jamais intégrer le GIGN.

« C'est la plus grosse déception de ma vie » confie treize ans plus tard celui qui vient de franchir les 43 printemps. « J'aurais préféré faire ça plutôt que d'être Kylian Mbappé ou n'importe quel sportif connu. Pour moi, ça représente tellement de belles valeurs : l'unité d'un groupe, l'anonymat, risquer sa vie pour autrui... » Et un sens du partage qui l'accompagne désormais tous les jours de sa vie. « Depuis mes 15 ans et mon envie de rejoindre le GIGN, j'ai intégré l'idée de pouvoir mourir du jour au lendemain. Tu es obligé de l'avoir en tête pour espérer faire ce type de missions. Et cette idée, elle est gravée en moi, encore à l'heure actuelle. J'ai le sens du sacrifice ultime pour les autres. »

50 000 $ sur du hockey

Une journée avec... Truiton31, un flambeur à Las Vegas
Un sexagénaire arborant un maillot des Vegas Golden Knights passe dans le coin. « Vous les voyez gagner facilement ? » lui lance Greg. « Assurément ! » réplique le local. Depuis 2017, la folie du hockey sur glace s'est emparée de Las Vegas avec l'arrivée de la franchise des Knights à la T-Mobile Arena, une salle flambant neuve. Cette année, le club vit déjà la deuxième Stanley Cup de son histoire, l'équivalent des finales NBA pour le hockey. Et après quatre rencontres, ils mènent 3 victoires à 1. « Ils ne leur manque qu'un match pour remporter le trophée » précise Greg, Et cela se passe ici-même à Vegas : let's go.

Après avoir réglé l'addition, Greg fonce à travers le Strip d'un pas décidé. Premier arrêt : le Caesars Palace afin de récupérer les 17 000 $ de son ticket gagnant de la veille. Mais le Toulousain a oublié de prendre sur lui son ITIN, ce numéro de taxe international permettant aux ressortissants d'éviter les taxes américaines sur les bénéfices réalisés dans les casinos. Les locaux doivent effectivement payer 30,5% de taxes sur les gains dépassant 5 000 $ nets (seulement si le gain est plus de trois fois supérieur à la mise initiale, pour ce qui est des paris sportifs). « Tant pis, on règlera ça plus tard, je passe à la chambre récupérer du cash et on file au match » lance-t-il alors tout en pressant un peu plus le pas.

Arrivés aux abords de l'esplanade de la T-Mobile Arena, Greg se sent dans son élément. « On est même mieux que dans le stade, on va rester ici plutôt que de chercher des billets ! » Plusieurs centaines de personnes sont réunies pour regarder la rencontre sur des écrans géants, des danseurs livrent des animations et des groupes de musique donnent le tempo à la batterie. « Par contre, il faut que je mise avant le coup d'envoi » s'inquiète Greg tout en filant au New-York New-York, le casino le plus proche du stade. « Vegas Golden Knights, cote à 1,50. »

« Combien ? » demande l'employée au guichet sans même lever la tête. « 50 000 $ », répond Greg en poussant une enveloppe dans sa direction. Les yeux de l'employée sont désormais grands ouverts. « Heu, je vais demander... » glisse-t-elle avant qu'un responsable ne vienne rapidement prendre le relais. « Soyez le bienvenu Monsieur, nous allons prendre votre pari. Et tenez, nous vous offrons ces quelques tickets pour que vous puissiez consommer gratuitement au bar. » Greg range précieusement le reçu du pari. « J'avoue que j'ai un peu peur de le perdre celui-là ! » se marre-t-il tout en retournant sur l'esplanade. Lorsqu'on lui demande si ses fonds pour financer un tel rythme de vie viennent uniquement de ses salles de sport et des paris sportifs, Greg élude la question. « Je ne parlerai qu'en présence de mon avocat » lance-t-il avec un sourire espiègle.

Après l'ouverture de sa première salle de combat à Toulouse, Greg a rapidement lancé une seconde salle de sport. « Puis trois, puis quatre ! » poursuit-il, « mais pour celles-ci, je dois remercier mon ami Morgan qui m'a aidé. De mon côté, j'avais décidé de prendre quatre années sabbatiques en Thaïlande et je gérais donc les affaires à distance. » Encore marqué par l'épisode du GIGN et ses années passées en gendarmerie, Greg a changé son fusil d'épaule : « J'ai connu un monde tellement autoritaire que je vis désormais ma vie comme du bonus. » À l'heure actuelle, Greg a limité son nombre de salles et n'en possède plus que deux, dont le réputé Toulouse Fight Club. « J'ai la chance d'avoir réussi professionnellement donc j'en profite. »

Une journée avec... Truiton31, un flambeur à Las Vegas
De retour devant le match, Greg sympathise avec les touristes et locaux et achète quelques bières à la sauvette, aussitôt distribuées aux badauds. Malgré l'énorme enjeu financier, le stress ne semble pas l'atteindre. « Go Knights Go ! » crie-t-il tout en dansant avec les attroupements se formant devant les écrans géants. Mark Stone, le capitaine de l'équipe jouant à domicile, vient rapidement libérer toute l'esplanade en inscrivant un premier but. Greg chante, danse, est en liesse et vient faire des photos avec tous les fans des Knights. Deuxième but de Vegas. Greg explose tout en filmant les scènes de liesse avec son téléphone portable collé sur le menton. « Je suis très actif sur Instagram, je mets des stories tout le temps » (pseudo : le même que sur Winamax, Truiton31. « Mais ce n'est pas pour montrer que je flambe, c'est vraiment pour partager des moments de kif à des potes. Je ne me prends pas du tout au sérieux avec ça. »

Bientôt les planches de l'Olympia ?

Le match s'avèrera être une formalité pour les Vegas Golden Knights, qui s'imposent 9-3. La légendaire Stanley Cup est pour eux. Greg, lui, vient de gagner 75 000 $. « On va faire la bringue ! » Retour sur le Strip. Le pas toujours déterminé et le sourire aux lèvres, Greg profite en regardant autour de lui : « elle est dingue cette ville, on ne peut pas s'ennuyer ici ! » Tout le monde profite de sa bonne humeur post-pari gagnant, y compris les sans-abris, refaits à coup de billets de cent. Notre destination finale sera le Piano Bar du casino Harrah's. « C'est mon QG de Las Vegas ! » Le concept est simple : les clients peuvent choisir ce que les deux pianistes vont jouer en échange d'un petit pourboire.

Une journée avec... Truiton31, un flambeur à Las Vegas
La musique, Greg baigne dedans depuis tout petit. « J'ai la chance d'avoir un grand frère qui a de très bons goûts musicaux. » À la maison, les Toulousains écoutent The Cure en boucle et grandissent dans un univers rock. Depuis, Greg écume les bars où des musiciens semi-amateurs donnent des concerts live. Il se saisit d'une feuille et envoie une première demande aux pianistes en incluant Radiohead, Guns N' Roses ou encore Journey, tout en glissant un billet de 100 $ aux artistes de la soirée avec qui il trinque à la bière. « L'alcool, je l'associe avec la fête et des moments de partage avec des potes. Je n'ai jamais bu un verre seul de toute ma vie » précise-t-il alors que les cerveaux commencent à s'embrumer.

En regardant son ticket gagnant, Greg envisage ce que pourrait être ses futurs faits d'armes. « J'ai un objectif en paris sportifs » confie-t-il, « j'aimerais refaire un gain net d'au moins 70 000 € sur Winamax. Si c'est le cas, je loue l'Olympia pour faire venir Sumenta Nova, un groupe corse génial capable de faire un concert de reprises durant trois heures sans s'arrêter une seconde. Ce sont des monstres ! » Toujours avec le sourire, Greg quitte le bar pour retrouver sa chambre et rêver à de nouveaux succès. Le lendemain, il enfilera son costume de joueur de poker, lui qui compte tout de même 243 000 $ de gains sur le circuit live. La nuit sera courte mais cela ne l'inquiète pas. « Je fais toujours tout à l'excès et je ne compte pas changer ! »

Harper