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Shaun Deeb, les bons conseils de la légende

- 15 juin 2023 - Par Fausto

Tandis que votre serviteur tenait trois heures dans son premier tournoi WSOP, la légende Shaun Deeb jouait trois jours pour aller chercher son sixième bracelet WSOP. Interview d'un vrai joueur tout-terrain.

Shaun Deeb
Chipleader du Day 1, l’homme qui a parié cette année 1 000 000 $ avec Bill Perkins qu’il pouvait descendre son taux de graisse corporelle sous les 17%, a réalisé une superbe remontada au Day 3, jusqu’à aller chercher la victoire. Un nouvel exploit signé Deeb, aussitôt reparti à la charge sur le 10 000 $ Razz, afin d’engranger les points dans la course au “WSOP Player of The Year”. Lors de la pause, la légende a pris le temps de parler au néophyte des mixed games, pour remonter le temps et délivrer quelques-uns de ses secrets.

Salut Shaun et félicitations pour ce nouveau bracelet. Te souviens-tu du premier tournoi WSOP que tu as joué ?

J’avais 21 ans. On avait loué une petite maison à côté de South Point Casino, avec des amis. On avait une petite équipe, on jouait online, on était sur 2+2. Je n’étais pas encore un joueur de Mixed Games, je jouais n’importe quel tournoi de No Limit, des 500 $ au 2 000 $. Je jouais tout ! J’avais réussi à faire trois cash sur des WSOP… Trois fois 27e. J’avais un blocage avec ça. Sur mon quatrième deep run, j’étais encore très short à la 28e place. Je me suis dit, je vais pas encore finir 27e ! Il y avait mon ami à table… Adam Richard, et je le bust finalement quand le tableau affiche 28 joueurs… Mais un autre joueur était sorti en même temps donc j’ai vaincu la malédiction. Et hier, je me suis rendu compte que je remportais l’Event… #27. On s’est appelé avec Adam, et on s’est dit qu’il fallait que je me fasse un tatouage “Shaun Fucking Deeb” floqué du numéro 27. 

Dans quel état d’esprit tu arrivais aux tables à cette époque ?

C’était très différent. Quelques personnes me connaissaient du Online et entre jeunes on discutait pour savoir qui était quel pseudo. Mais sinon, j’étais un inconnu... Maintenant, après 20 ans, on reconnait les noms, les visages et je suis plutôt connu maintenant. 

La première semaine, avec cette nouvelle barbe et la perte de poids, j’ai réussi à passer incognito pour quelques jours. Mais, malheureusement, en gagnant un tournoi et en portant cette casquette brillante, les gens se sont finalement rendu compte que c’était moi.

Ho, arrête Shaun ! Tu as perdu à peine 30 livres (13 kilos) et tu penses que les gens ne te reconnaissent pas ???

40, pas 30 ! Je t’assure, j’ai parlé à des gens qui ont mis cinq minutes à m’apercevoir que c’était moi.

Hormis la barbe et la réputation, quelles sont les grandes différences entre le Shaun Deeb d’il y a vingt ans et celui d’aujourd’hui ?

Aujourd’hui, quand je punt (faire un move peu inspiré où l’on perd beaucoup de jetons), les gens pensent que je joue bien. Alors qu’à l’époque, quand je faisais un punt, les gens se disaient “ouah, il est vraiment nul”. C’est fou comme les gens se disent que les gens sont bons ou non sous prétexte qu’ils ont gagné des titres. `

C’est aussi fou d’être dans ce monde depuis si longtemps et de continuer à faire des résultats. Un nouveau public est arrivé et j’ai entendu qu’on m’appelait “old guy” ou que j’étais de la vieille génération. Je n’ai que 37 ans, ce n’est pas si vieux bordel ! Quand j’y pense, lorsque je suis arrivé dans le poker, les Ivey, les Daniel avaient tous trente ans et plus. C’est étrange de dépasser l’âge qu’ils avaient quand j’ai commencé à les regarder à la télé.

Quels sont les atouts que tu as acquis après vingt ans, et que tu n’avais pas au départ ?

Depuis que j’ai commencé à jouer les Mixed Games, j’ai toujours été très observateur. Quand je jouais online, que ce soit en cash ou en tournoi, je repérais qui était le meilleur joueur à table dans telle variante. Dès qu’il y avait un showdown, je cliquais sur la HH et je regardais quelle décision il prenait et pourquoi. 

J’essayais de disséquer la main d’une perspective extérieure, en fonction des différents adversaires, des différents boards. Au bout d’un moment, je suis devenu le 2e meilleur dans beaucoup de formats mixed games sur la plupart des tables. Avec beaucoup de volume, j’ai réglé la plupart des leaks que j’avais et c’est ce qui me rend compétitif dans tous les jeux aujourd’hui.

En France, on ne peut pas jouer en mixed games, ou bien très rarement. Aurais-tu un conseil à donner pour les Français qui souhaitent devenir bon dans ces jeux ?

Il y a les SCOOP et WCOOP qui proposent des tournois de mixed-games intéressants. Je sais qu’on ne peut pas jouer ça en France, mais dans ce cas il faut sortir du pays, ou trouver un moyen de pouvoir jouer sur le .com. Il y a aussi des home games sur des sites où l’on peut jouer des variantes pour des buy-in abordables. Allen Kessler organise des tournois comme ça. Il faut se mêler à cet univers, jouer des parties, faire du volume, faire ses recherches… L’expérience est tellement importante dans les variantes, afin d’être confortable dans tous les jeux. Si un joueur commence à se poser la question “est-ce que c’est mon tour ?” Ou “combien ai-je le droit de miser”, un pro comme moi essaiera de le disséquer et d’abuser de lui dans certains spots.

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