Mission accomplie

- 29 juin 2022 - Par Flegmatic

Sans peine, sans regrets et après être passé par toutes les émotions sur ce tournoi, Jordan Pelon décroche la médaille de bronze
Ce spécialiste de cash game live repart avec 193 240 $ et des souvenirs plein la tête
Event #51 : NLHE Colossus 400 $ (Finale)

Jordan Pelon

Il a quitté ses tables de cash game de l'est de la France pour venir tenter l'aventure à Las Vegas. En solitaire. Pendant près d'un mois et demi. Et ce fameux rêve américain, Jordan Pelon l'a vécu pendant quatre jours, passant tout près d'aller jusqu'au bout. À deux marches, très exactement. Le bracelet, le Messin l'a eu à côté de lui durant un peu plus de trois heures aujourd'hui, mais paradoxalement, il n'a jamais été réellement en position d'aller le chercher. Pourtant, et c'est ce qui fait la spécificité et la beauté de notre jeu, au terme de ce (court) Day 4 télévisé ajouté au programme, il n'a rien à se reprocher. "Je ne pense pas que j'ai fait d'erreurs, est la première chose qu'il est venu nous dire. J'ai pris les spots que je devais prendre. J'avais soit une premium, soit une poubelle, donc je n'ai pas vraiment eu de décision compliquée." Il lui aura simplement manqué ce soupçon de cartes aux moments opportuns qui façonnent les grandes victoires.

Il n'a pas non plus pu faire usage longtemps de son tapis "correct" de 17 blindes, qui le plaçait pile au niveau de la moyenne à la reprise à sept joueurs restants. La première heure et demie de jeu voit ainsi quatre double ups de short stacks, faisant tomber l'average plus bas qu'en finale du Sud contre le reste du monde. Mais avec toujours plus de 400 000 $ à la gagne. Et le chipleader Samuel Laskowitz a commencé à faire le ménage, avant que Jordan ne prenne ses responsabilités en bataille de blindes pour faire chuter à quatre le nombre de survivants. "Au vu de mon tapis, de ceux de mes adversaires et de leur niveau moyen, j'avais deux objectifs : le premier était de faire minimum Top 3 ; le second de ne pas sortir avant l'Anglais [James Scott, NDLR, photo ci-dessous, à droite], qui était vraiment le joueur le plus faible de la table." Il faut un bad beat infligé par son compatriote pour que le plus âgé des deux Britanniques, installé ici depuis des années et par ailleurs croupier à l'Aria dans le civil, ne finisse par rendre les armes.

James Scott

Mission accomplie pour Jordan, qui attaque cependant ce 3-handed en tant que lanterne rouge, très loin derrière un Laskowitz toujours aussi dominateur. "Il n'a pas non plus abusé, tempère le Français. Il était bon, mais ce n'était pas un top joueur." Pour revoir ses objectifs à la hausse et pouvoir légitimement prétendre au bracelet, le Messin a besoin de doubler, ce qu'il n'a jamais encore été en position de faire aujourd'hui. Problème : son premier coup à tapis couvert de la finale sera aussi le dernier. Immédiatement après la sortie de Scott, Jordan tente sa chance en BvB avec Q3 et moins de six blindes mais voit Laskowtiz payer dans la seconde avec A9. Le board J7TA7 a le mérite de préserver le suspense jusqu'au bout mais laisse les positions en l'état. Dans la foulée, comme le veut la coutume aux World Series, le bracelet sera amené sur la table, entre ses deux derniers prétendants.

"C'est ça que je voulais vivre, lâche Jordan, tout en restant beau joueur. Je suis très content, absolument pas frustré. Faire troisième d'un tournoi comme ça, au milieu de plus de 13 000 joueurs, je signe tous les jours ! Surtout que je ne suis pas un joueur de tournoi : il y avait beaucoup de joueurs bien meilleurs que moi, j'ai l'habitude de jouer 100BB deep et je n'ai pas peaufiné mes ranges de jeu short stack. Et j'ai quand même eu un rush de fou, surtout au Day 2. À un moment donné, tellement j'étais agressif et mettais un max de pression, un mec à ma table m'a dit 'Je crois qu'il n'y a pas un joueur sur ce tournoi à qui tu n'as pas volé les blindes' !" Et dire que cet exceptionnel parcours aurait pu ne jamais devenir réalité. "Je me suis fait éliminer en toute fin de Day 1A, après avoir pourtant monté cinq stack de départ en quelques niveaux. Je me dirige au bureau pour me réinscrire pour le lendemain, en me disant que s'il y a trop d'attente, tant pis, je rentre. Il était tard quand je suis arrivé, il n'y avait personne."

Jordan Pelon

Et une fois arrivé en finale de son premier gros tournoi, aux World Series of Poker, en streaming, qu'est-ce qu'on ressent ? "C'était fou. C'est une expérience incroyable. La pression de l'enjeu, de l'argent, du braclet... Mais j'étais quand même détendu. Bon, j'ai bien transpiré sur le coup Dame-7 contre Dame-7 où il trouve un flush draw turn... C'était juste un peu dommage de n'avoir personne dans le rail. Au moins j'ai pu rester entièrement concentré sur mon jeu. Ma famille et mes amis regardent le stream, ils ne savent pas encore que j'ai fait troisième, mais dans un peu moins d'une heure je sais que je vais être bombardé de messages et d'appels."

Que faire maintenant de ces 193 240 $ pour ses deux dernières semaines à Vegas ? "Je vais continuer de jouer exactement les tournois que j'avais prévu de jouer, autour de 1 000 / 1 500 $. Pareil pour le cash game, je ne vais pas soudainement monter de variante." Un petit Main Event quand même, non ? "Je ne peux pas, je dois rentrer pour le mariage d'un ami. Si j'avais gagné le bracelet en revanche, je me serais peut-être laissé tenter..." Il va falloir revenir l'année prochaine alors. Et cette fois, si finale il y a, on garantit qu'il y aura plus de monde dans le rail.

WSOP 2022 - Event #51 : NLHE Colossus 400 $
13 565 inscriptions - Résultats de la finale

Final Table

Vainqueur : Paul Hizer (Royaume-Uni) 414 490 $
Runner-up : Sam Laskowitz (États-Unis) 256 170 $
3e : Jordan Pelon (France) 193 240 $
4e : James Scott (Royaume-Uni) 146 680 $
5e : Luong Quach (États-Unis) 112 060 $
6e : Jeff Loiacono (États-Unis) 86 160 $
7e :  Anthony Ruttler (États-Unis) 66 670 $
8e : William Gian (États-Unis) 51 930 $
9e : Sean Shah (États-Unis) 40 710 $

Galerie photo de Caroline Darcourt