À 26 ans, Romain Lewis remporte son premier bracelet WSOP, le 29e de l'histoire du poker français
Sa quatrième finale sur les Championnats du Monde fut la bonne
La pression n'a pas le temps de redescendre quand l'Américain Barth Melius est le premier joueur à empocher le premier gain à six chiffres, un joli 103 547 $, après être tombé contre l'Indien Aditya Agarwal... Pendant ce temps, Romain se faisait tout petit. Effacé, il ne le fut pas dans cette finale non : simplement, il attendait le moment opportun pour bondir de sa tanière. "Quand je tombe à 6/7 BB, que je fais tapis et que ça fold, c'est vrai que je suis déjà très content. C'est un Turbo, il faut prendre tous les jetons possibles. Pour la confiance, c'est parfait aussi."
Aucun de ses resteals à tapis n'a été payé... et à chaque fois qu'il mettait la main au milieu, son rail célébrait ça mieux que jamais. D'ailleurs, petit aparté sur cette bouillante section de supporters. "Je tiens à dire que ce rail est très intelligent", nous a soufflé entre deux coups Rob, arbitre en charge de la finale. Un Américain qui complimente un rail français, ce n'est pas fréquent. "Ils applaudissent et crient quand il faut, ils sont silencieux pendant les mains, c'est très agréable. En revanche, pour contrôler Mustapha, c'est une autre histoire !" Rob est taquin et a noté comme tout le monde ici que le leader des troupes en tribunes s'appelait Mustapha Kanit. "En pression constante !" hurlait l'Italien - en français s'il vous plaît - à chaque fois que Romain envoyait son tapis. Sur une structure comme celle-ci, à chaque fois que l'on récupère les blindes on se rapproche un peu plus de la victoire et les tribunes ont chanté comme il se doit à chacun des vols de leur poulain.
À trois joueurs restants le rythme s'est quelque peu calmé. Il semblerait même que l'on ait vu défiler un niveau entier sans élimination. Le joueur indien à plus d'un million de dollars de gains en live Aditya Agarwal contrôlait les débats avec son gros stack, même si la crainte qu'inspirait Stephen Chidwick compensait son déficit en jetons. Dans le rail, tout le monde rêvait de voir Romain éliminer Chidwick : pour beaucoup, l'ancien numéro 1 mondial reste le boss final du MTT game. L'Anglais a offert une occasion à Romain, en faisant tapis en bataille de blindes. Il en restait 7,5 chez Romain, alors que l'Anglais en possédait deux de plus. Il a fallu une bonne minute pour que Romain ne prenne sa décision... call avec Q9 quand Stephen Chidwick ne pouvait montrer mieux que... Q8 ! Lecture au laser, croupier qui claque un 9 sur la turn puis un 9 sur la rivière : le petit Lewis venait de faire vaciller un géant, tout en se repositionnant dans la course. "T'as vu ce call contre Chidwick ?! Wouaaah ! Je pense que j'étais obligé de le faire en vrai", nous glissera Romain après la finale. Chidwick n'avait plus que quelques minutes à vivre sur cette finale. Malgré un double up (avec deux blindes, la belle affaire), il sera définitivement mis hors-jeu par Agarwal, avec KJ contre QQ. Son deuxième bracelet attendra : pour l'heure, le dernier duel de l'Event 76 pouvait commencer. Il ne durera qu'une dizaine de mains. Parti en désavantage numérique, Romain paiera un bluff d'entrée de jeu avant de doubler dès la main suivante... mais son adversaire fera de même lors de la troisième main. "Là, je me suis dit 'Oh non, pas encore...pas deuxième'. C'est vrai que j'y ai pensé..." À toi, à moi... Quelques mains que l'histoire ne retient pas sont disputées... jusqu'au moment où les deux joueurs partent à tapis avant le flop, Agarwal mettant la pression maximum sur Romain. Le Français n'a pas tremblé au moment de pousser avec 55... mais n'a juste pas aimé la main qu'il rencontrait, 76. À cette heure-ci, il faut passer entre toutes les balles, et c'est avec agilité que Romain va slalomer entre les cinq cartes d'un board 94JKA déroulé à toute vitesse par la croupière. Romain serre le poing mais n'exulte pas. Pas encore car son adversaire n'est pas mort, seulement à genoux. Le tête-à-tête peut repartir... avec un Romain ayant désormais le vent dans le dos, avec 15 millions de jetons contre 3,4 millions. Il faut boucler, il faut conclure, le bracelet est là, il l'attend. Romain paie une première fois le tapis de son adversaire avec 87 et découvre avec bonheur 76 chez son adversaire. Une joie de courte durée, puisque les deux joueurs vont split à cause d'un tableau 2K7AQ. C'était reculer pour mieux sauter avec un nouveau all-in préflop joué dans la foulée : T9 chez Romain Lewis contre A3 pour Aditya Agarwal. Le T qui tombera sur le turn scellera définitivement le triomphe de Romain Lewis, sous les vivas d'un rail franco-Winamax. Romain Lewis. Champion WSOP. Aujourd'hui et pour l'éternité. "Ça fait plaisir, enfin ! Cette fois, il ne m'a pas échappé. À chaque fois, j'étais content de mes résultats... mais à chaque fois, je me disais aussi que c'était vraiment dur de gagner un bracelet en fait. Là, c'est bon, je peux enfin ajouter ce petit bijou à ma coloc de Wimbledon. Ivan Deyra, Jeremy Saderne, moi : ça commence à faire quelques-uns tout ça. On a quand même bien vibré sur cette finale, c'est ça le Turbo, j'adore, ça se joue à pas grand chose. Et maintenant, je peux t'annoncer que je vais pouvoir chill sur cette fin de WSOP ! Après un cru 2021 jusque-là sans bracelet, malgré deux tables finales pour un Pierre Calamusa tout proche du bonheur dès le début de ce festival, malgré les tables finales d'Adrián Mateos, Mustapha Kanit, et João Vieira, Romain Lewis permet au Team Winamax d'imprimer encore un peu plus sa marque sur le circuit mondial du poker. Avant de partir célebrer avec notre héros, un coup d'oeil au palmarès du vainqueur. Romain dépasse maintenant les trois millions de dollars de gains en tournoi live, une grosse vingtaine d'ITM sur les WSOP version Vegas, quatre tables finales WSOP, une table finale WSOP-Europe, une table finale WSOP-Circuit et désormais un bracelet WSOP. Tout cela à 26 ans seulement. Le futur, que lui réserve-t-il à Romain Lewis ? On a hâte de le découvrir en sa compagnie. - Veunstyle