Fin d'un Day 1C historique
Le Main Event dépasse les 7000 inscrits pour la première fois depuis 2010
Au milieu de l'océan de joueurs, les histoires abondent
Troisième et dernière journée de départ du Main Event des World Series of Poker, le Day 1C est traditionnellement le "flight" le plus chargé de l'été au sein du Centre de Convention du casino Rio. En conséquence, cette journée est submergée par des chiffres de toutes sortes. Des ordres de grandeur tendant de traduire le raz-de-marée débutant dès onze heures du matin.
4 : le nombre de salles, toutes plus gigantesques les unes que les autres, réquisitionnées à capacité.
4262 : le nombre total de joueurs assis simultanément aux tables (dont un quart environ pour qui la partie s'arrêtera dès ce premier tour).
7221 : l'affluence totale à cette 48ème édition du Main Event, la troisième plus importante de l'histoire du plus beau et plus gros tournoi du monde.
67,9 millions de dollars : la dotation constituée par ces inscriptions, à raison de
10 000$ par tête de pipe.
1084 : le nombre de joueurs qui seront récompensés, avec des prix allant de
15 000$ (un min-cash et un bon souvenir) à
8,15 millions (la victoire et une vie changée à tout jamais).
Cette avalanche de chiffres obscurcit la vue. Dans la salle Amazon comme dans la salle Pavilion, l'océan de joueurs qui nous fait face floute les joueurs, qui ne forment plus qu'une masse informe. Mais pour qui prend la pleine de plonger dans cette mer de rêves balbutiants, de se rapprocher des petits poissons et des gros requins, la pêche aux histoires peut s'avérer miraculeuse.
Victor Saumont : un coverage en POV
Daniel Negreanu, Jason Mercier, et deux joueurs français aux visages reconnaissables (Jean Fabre et Giuseppe Zarbo) assis à la même table : pour n'importe quel "couvreur" travaillant pour un site francophone, un tel casting constitue un mini-jackpot, a fortiori au début du Main Event, où les joueurs connus sont éparpillés autour de centaines de tables. Un reporter chevronné comme Victor Saumont, au moment d'écrire son premier article, ne manquera pas de lui décerner le titre de "table de la mort", et passera une bonne partie de la journée à surveiller les gros coups et relances à tapis. Mais que ferait le même Victor Saumont si, au lieu de simplement regarder cette table et de raconter sur Internet ce qu'il s'y passe, il y prenait carrément place, pour tenter de battre ces joueurs qu'il a déjà tant observés au cours des dernières années ?
"Quand je suis arrivé dans l'Amazon Room et que j'ai vu qu'il n'y avait personne à la table sur laquelle je commençais le tournoi, je me suis dit que quelque chose clochait", raconte Victor. "Puis j'ai vu le panneau 'Rendez-vous sur le plateau télévisé' !" Victor venait de comprendre qu'il allait passer une bonne partie de la journée devant une multitude de caméras ne loupant aucun de ses gestes et diffusant la partie en quasi-direct sur Internet, ses cartes révélées à la vue du public.
Celui que l'on connaît au sein du milieu poker français comme "Tapis Volant" s'était rendu à Vegas l'été dernier en tant que touriste, sans reportage à effectuer. Une demi-finale au casino Golden Nugget lui avait procuré les fonds pour tenter une qualification pour le Main Event. Avance rapide une semaine plus tard : Victor atteignait la 257e place du Big One parmi 6737 joueurs. Après être passé une première fois
devant la caméra, cette caméra qu'il a tenu devant
Alexandre Luneau, Gus Hansen, Flavien Guénan, Ronan Monfort et tant d'autres, difficile de ne pas avoir envie de retenter l'expérience. Sans ticket satellite en poche mais avec le soutien financier de nombreux amis joueurs (et une très belle victoire fin juin, dans un Golden Nugget devenu son casino fétiche), Victor était de retour au Rio cette semaine. Et cette fois, les caméras étaient braquées sur lui dès la toute première main, casting VIP oblige.
"
Au début, je n'étais pas content. Quand on s'inscrit au Main Event, on a plutôt envie de jouer contre huit riches amateurs qui ont de l'argent à perdre. Et là, je me prends Mercier et Negreanu direct, plus deux français compliqués à jouer." L'identité des adversaires de Victor n'était pas sa seule source d'inquiétude. "
Les caméras, ça m'embête, je savais que j'allais être stressé. Je n'ai pas l'habitude d'être devant la caméra, avec tout le monde qui me regarde" Au final, Victor en sera le premier surpris : ce problème n'en fut pas un. "
J'ai été dérangé cinq minutes, et après j'ai commencé à jouer. C'était une partie de poker comme les autres."
Même lorsqu'on exerce un métier qui nous place régulièrement en contact direct avec des joueurs comme Negreanu ou Mercier, rien ne s'approche d'une immersion de dix heures face à eux, avec un véritable enjeu - on a comme eux misé 10,000$ pour s'assoir ! Et au sortir d'une longue journée où absolument aucun des joueurs de cette table de la mort n'a été éliminé (la chose est rare), Victor pouvait se permettre un avis partiel. "
En fait, j'ai presque envie de te dire qu'ils me décoivent un peu ! Ils ont joué un poker assez ABC dans l'ensemble. Ils sont sérrés. Negreanu, il est fidèle à sa réputation : il n'a jamais 3-bet préflop, et il n'a jamais manqué un flop. En revanche, derrière, il abandonnait beaucoup au flop ou au turn. Je lui ai pris plein de coups comme ça. Les mecs, on sent qu'ils jouent les cotes implicites, ils vont voir le plus possible de flops pour tenter de tout prendre à un joueur qui ne comprend pas trop le jeu, mais derrière ils ne prennent pas de risques."
On ne peut s'empêcher de se demander : est-ce que Daniel savait qui était Victor ? "
C'est drôle... J'ai mis longtemps avant de lui parler, je ne voulais pas passer pour un fanboy. Puis à un moment, j'ai fait un commentaire sur ses vidéos de blog. Et là, direct il m'a parlé des miennes ! En expliquant qu'il avait 'fait 'ses devoirs'..." La chose sera confirmée quelques minutes plus tard, avec un moment qui restera sans doute gravé dans la mémoire de Victor : "
Sur une main, j'hésite à envoyer un troisième barrel sur la rivière, et là il me sourit et me dit en français : "
Allez, fais tapis ! Tapis volant ! Flying Carpet ! Ha ha !"
Reconnu par le plus connu des joueurs connus : si ce n'est pas la consécration, on ne sait pas ce qu'il vous faut.
Même après fait face à Negreanu toute la journée en tant que joueur, le naturel revient vite au galop : Victor ne refuse pas la photo demandée par deux fans américaines
Si on offrait à Victor la possibilité de recommencer la journée, mais à une autre table, que ferait-il ? "
Hé hé, je sais pas. C'était un bon kiff, quand même, de jouer contre eux." Une sorte de tournoi dans le tournoi, qui a vécu sa propre vie et où chacun a fait connaissance avec chacun. Victor termine en dessous de la moyenne, mais avec plus de jetons que la superstar qu'il affrontée toute la journée, ayant notamment jeté des grosses mains sur des pots disputés jusqu'à la rivière. De son côté, le franco-italien
Giuseppe Zarbo sort grand vainqueur de cette table, avec plus de 120,000 jetons accumulés. Alors que le site de jeu en ligne 888 offrait 700$ aux joueurs acceptant de porter le logo devant les caméras, Zarbo a spontanément réclamé un logo Winamax, par pure sympathie. Joueur purement amateur (à Antibes, il est chef d'entreprise et père de famille), Zarbo s'est qualifié via un satellite au Rio (c'est le cas chaque année) et pratique un jeu radicalement différent de celui des gros pros assis autour de lui, avec un certain succès puisqu'il a fait l'argent sur ce Main Event chaque année entre 2011 et 2014.
"
C'était le seul qui était vraiment imprévisible", commente Victor. "
Tellement imprévisible que je me suis parfois surpris moi-même", renchérit Zarbo en rigolant. "
Par exemple, il y a une main où j'envoie une énorme sauce à 11,000. J'avais plutôt prévu de mettre 5,500, mais je me suis retrouvé à mettre plus, je savais que mon adversaire ne prendrais jamais un tel risque, et je le couvrais..." Troisième et dernier français de cette aventure,
Jean Fabre, que l'on avait découvert au sein de la Top Shark Academy, termine le Day 1C avec un tapis en dessous de la moyenne, mais l'essentiel n'est pas là : lui aussi a kiffé le moment, et va pouvoir changer sa photo de profil Facebook dès ce soir.
"Negreanu va remplacer Bruel !"
Fin d'un Day 1C VIP
Un Jérôme brillant
Le probable chipleader du classement tricolore à la fin du Day 1C - et peut-être même du classement tout court, tous pays confondus -, c'est le monsieur ci-dessus, assis devant ses belles piles de jetons,
Jérôme Brion, avec 248 000 pions. "
J'ai pris 50 000 avec un carré d'As, et j'ai gagné plusieurs autres pots de 50 000 aussi. Rien d'extraordinaire, je n'ai pas joué de pot de 100 000 non plus." Allons, Jérome point de fausse modestie, surtout quand ce tapis là devrait le placer, sinon dans le Top 10, au moins tout prêt. "
J'ai quand même jeté une paire de Rois dès le début de journée. Je squeeze au bouton et je me fait New York back raise par un type qui envoie derrière 15 000 sur un flop 10-6-4. Au final, j'ai bien fait d'être patient, surtout que j'ai quand même eu une table super facile. C'est mon quatrième Main Event, et jusque là je n'avais jamais passé le Day 1 !" Voilà qui est désormais chose faite, avec un tapis qui peut même lui faire espérer bien mieux.
Lui aussi aurait pu être très haut mais
Alexandre Reard termine finalement à 38 500. "
Je suis en tilt, j'ai perdu un coup pour être à 230 000, alors que j'étais devant," nous a confié un Parisien qui a pas mal swingué aujourd'hui. Même topo pour
Julien Martini, qui termine à 88 600 après être tombé aussi bas que 7 000. "
J'ai doublé une première fois en envoyant tout avec Dame-Valet sur Dame-Valet-2-8 contre deux As, et puis ensuite, beaucoup de resteals, de reshoves, de check/raises all-in, toujours sans showdown. C'est au moins mon quatrième Main Event, et c'est la première fois que je fais un Day 2." Décidement, cette journée est celle des premières.
La tigresse sort les griffes
C’est avec un large sourire que Thi N’Guyen a terminé la journée en rangeant 215 100 jetons dans son sac, de quoi la placer parmi les plus gros tapis du jour. On imagine alors que la joueuse d’Onpok a du remporter au moins 7 coins flips, deux 80/20 et coller quelques bad beats à droite à gauche… mais pas du tout. "Je n’ai gagné que des petits pots de 3000/4000 à chaque fois. Toute la journée." Du grind pur et dur comme en cash game, une discipline qui est plutôt sa spécialité. "Ah si, j’ai aussi gagné un pot de 25 000 avec une paire de Rois contre une paire de Dix, sur un baby board. Il m’a tout mis et je n’avais plus qu’à payer." Un peu plu tard, un joueur probablement trop fan de Davidi Kitai, annonce tapis avec Dame-Huit et Thi trouve un call facile avec As-Roi pour ajouter 12 000 jetons supplémentaires. On pourrait continuer comme ça pendant longtemps, tant elle a remporté de coups aujourd’hui. Après un été compliqué, Thi N’Guyen se verrait bien rattraper le temps perdu, grâce à ce tournoi. Désormais, il ne va pas falloir spew ce joli stack, et si elle arrive à ne pas connaître un retour de variance trop rapide, Thi peut faire des ravages dans ce Main Event.
Journée mitigée pour le Team W
Première également pour le benjamin du Team Winamax
Romain Lewis, qui n'a pas eu la partie facile aujourd'hui, son stack n'ayant pratiquement jamais dépassé le tapis de départ. "
Je suis content de ma journée en vrai !," a tout même conclu le Bordelais, après avoir empaqueté 16 900 jetons. Il en faut bien plus pour briser une motivation et une confiance que l'on sait sans failles. Constat similaire pour
Alex Luneau, qui termine autour des 20 000, au terme d'une journée sans grandes émotions. C'est un peu mieux pour
Aladin Reskallah et ses 48 000, notre Top Shark ayant navigué toute la journée au niveau du tapis de départ.
Il faut encore regarder vers Davidi Kitai pour trouver le meilleur bilan, avec 76 300 unités. Pourtant, la partie était loin d'être gagnée pour le Génie, tombé à 10 000 avant de remonter progressivement la pente. Kitbul peut remercier son porte-bonheur Caroline, qui a accouru dans le rail sitôt son futur mari en difficulté. C'est aussi ça l'amour. C'est en revanche déjà terminé pour Sylvain Loosli, victime d'un méchant setup, et Guillaume Diaz, qui a lâché ses 14 dernières blindes avec une paire de 4 contre les deux 5 de Jérémie Sarda. Comme l'an passé, on peut faire confiance à Volatile38 pour se refaire la cerise sur le Little One for One Drop.
Au moins 50 français franchissent le Day 1C
Cette liste est probablement loin d'être exhaustive : dès que le classement complet et officiel sera disponible, nous ne manquerons pas de publier un nouvel article présentant l'intégralité du field français.
Jérôme Brion 248 000
Thi N’Guyen 215 100
Sonny Franco 160 000
Victor Choupeaux 133 000
Giuseppe Zarbo 126 400
Jérémie Sarda 123 000
Sebastien Comel 119 000
Adrien Allain 112 000
Romain Nardin 100 500
Aurélien Guiglini (Staff Winamax) 101 000
Benjamin Ane 96 000
Benjamin Pollak 92 000
Yorane Kerignard 90 300
Jeremy Saderne 90 000
Julien Martini 88 600
Romain Nardin 82 000
Ronan Monfort 76 200
Maxime Chilaud 67 500
Yann Brosolo 67 000
Adrien Favrefelix 67 000
Martial Blangenwitsch 66 000
Estelle Denis (WIP Winamax) 65 800
Joseph Carlino 63 100
Julien Jolivet (Vainqueur KING5) 63 000
Karim Lehoussine 63 000
Fabien Perrot 62 200
Vincent Dupuy 60 800
Pierre Husson 60 000
Jacques Guenni 60 000
Alexandre Fradin 60 000
Édouard Échinard 60 000
Jonathan Therme 60 000
David Benyamine 56 100
Victor "Tapis Volant" Saumont 55 000
Sulaiman Sesay (Vainqueur KING5) 55 000
Rémy Biéchel 50 000
Aladin Reskallah (Team Winamax) 48 000
Jean Montury 44 000
Raymond Domenech (WIP Winamax) 42 000
Guillaume Dupuy 40 000
Alexandre Reard 38 500
Jean-François Rial 32 500
Adrien Delmas 31 100
Jean Fabre 29 300
Alexandre Luneau (Team Winamax) 20 000
Jean Pierre Besançon 17 000
Romain Lewis (Team Winamax) 16 900
Timothée Marlin 14 200
Philippe Ktorza 8 600
Bertrand "ElkY" Grospellier 5 000
Et Davidi Kitai (Team Winamax) 76 300
Gilbert Diaz OUT
Guillaume Diaz OUT
Moundir OUT
Sylvain Loosli OUT
Alban Juen (KING5) OUT
Benjamin Castaldi OUT
Laurent Polito : inconnu
Antonin Teisseire : inconnu
Patrick Sacrispeyre : inconnu
Nicolas Cardyn (KING5) : inconnu
Aurélie Réard : inconnu
Rémi Castaignon : inconnu
Tableau de bord
Environ 3200 joueurs franchissent le Day 1C (sur 4 262 au départ)
Blindes au Day 2 : 300/600 ante 100
Tapis moyen : 66 000
Tandis que les survivants du Day 1C profitent d'un jour de pause, nous retrouverons mardi les survivants des Day 1A et 1B. Ils sont au nombre de 2219 (le Rio sera une fois de plus plein !) parmi lesquels 38 français. Cliquez ici et ici pour consulter le listing.
Un mec qui s'apelle Aladin sur un mec dont le pseudo est Tapis Volant. Des barres !
Benjo, Steven & Flegmatic