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La malédiction française se poursuit

- 24 juin 2016 - Par Harper

Fabrice Soulier et Adrien Allain échouent à une marche du titre

Hugo Pingray n'a toujours pas de successeur. Dernier vainqueur d'un bracelet français en juin 2014, le champion du Monster Stack a été suivi par huit secondes places consécutives... Dont deux lors de cet unique 23 juin 2016. Récit d'une soirée douce-amère pour les Bleus.

18h02. Trois Français sont simultanément en finale ! Alors que Fabrice Soulier est sur l'épreuve d'Omaha/Stud Hi-Low ayant réuni 394 joueurs, Adrien Allain et Thi Nguyen sont sur l'ultime table du 5 000$ 6-max avec 541 entrants. Et ces deux derniers vont s'affronter dès la première main ! Après une relance d'Adrien au bouton à 75 000, Thi décide de 3-bet à 165 000. Muni d'une paire d'As, Adrien place un 4-bet à 375 000 et est tout heureux de voir Thi envoyer une nouvelle salve à 790 000. Il piège en payant et s'empresse de payer le tapis de la Française pour plus d'un million sur un flop Q-7-2. Opposé à une paire de Neufs, Adrien remporte ce pot énorme et prend le chiplead du tournoi, une position qu'il ne va pas quitter durant un bon moment... Thi remporte de son côté 76 112 dollars pour sa performance.

18h37. Tout va très, très vite en Limit. « Beaucoup trop vite » confesse même Fabrice Soulier. « En deux mains, tu peux perdre ton tapis ! » Mais le Français a de son côté réalisé un joli grind pour monter à 840 000 jetons, un tapis le plaçant en seconde position derrière Hani Awad, un joueur ayant déjà terminé second de cette épreuve l'an dernier ! Et Hani a fait le ménage dans la finale puisqu'ils ne sont à ce moment-là plus que trois ! Dans le rail encourageant le Français, veunstyle72, qui réalise habituellement le reportage à nos côtés, prévient Fabrice : « Quand tu as remporté le H.O.R.S.E. en 2011, c'était déjà un 23 juin... » Fabrice sourit et répond : « Je crois que je ne vais plus jouer que ce jour-là ! »

19h40. Strike sur l'épreuve de 6-max ! Alors qu'Adrien Allain conservait tranquillement son chiplead, deux joueurs décident de partir à tapis derrière une relance de Michael Gathy. Scott Margereson avec KT et Blake Eastman avec JJ. Mais le Belge s'empresse de payer avec AK et trouve un Roi sur le flop, déclenchant les hourras de son public : « Il est là le dragon vert ! » hurlent-ils, référence à la chemise verte porte-bonheur que porte Michael sur chacune de ses finales. Il rejoint Adrien en tête du classement alors que tous les joueurs sont à ce moment-là assurés de remporter 229 990 dollars.

20h40. Ce que toute la France du poker espérait se produit. Simultanément, deux Bleus sont en heads up ! Après avoir longuement lutté avec un tapis de moins de dix big bets, Fabrice Soulier a vu Aditya Prasetyo rejoindre la sortie en troisième place et débute son face à face avec moins du quart des jetons face à Hani Awad. « On a toute la nuit, prends ton temps pour te le faire ! » hurle un rail qu'ont notamment rejoint Stéphane Matheu, Alex Dreyfus ou encore Patrick Bruel. Adrien Allain s'est lui chargé d'éliminer Manuel Saavedra en troisième place avec paire de Rois contre paire de Dix et débute l'ultime duel avec 7,7 millions de jetons contre 5,5 chez Michael Gathy. Dans tous les esprits, l'envie de voir les Bleus triompher. Mais il est impossible de ne pas penser à l'année 2015 où six tricolores se sont inclinés en deuxième place successivement : Erwann Pécheux, Gabriel Nassif, Jean-Marc Thomas, Yehoram Houri, Aurélien Guiglini puis Pierre Milan... 

21h20. À la vue de tous les observateurs présents, Fabrice Soulier possède un avantage technique certain sur son adversaire. Même le directeur de tournoi ne peut s'empêcher de lâcher un « running hot ! » à Hani Awad lorsque celui-ci retourne un énième full. Tombé à sept big bets, Fabrice cherche ses mots : « Je vais me le faire. Je vais perdre. Je vais me le faire. » dit-il en moins de dix secondes avant de se tourner vers le clan français : « Et Adrien, il en est où ? »

21h22. À moins de dix mètres de là, Laura (au centre, mains sur le visage), la compagne d'Adrien, s'inquiète. Après avoir relancé au bouton, le récent runner-up de l'EPT Monte Carlo a envoyé trois mises : 130 000 sur K93, 275 000 sur un 8 au turn puis 500 000 à l'apparition d'un 2 à la rivière. C'est le moment que choisit le Belge pour placer un check-raise à deux millions. Planqué sous son pull, on sent Adrien bouillonner, tout comme Laura et Guy Pariente, le mécène d'Onpok finançant les tournois du Breton. Quatre longues minutes vont s'écouler durant lesquelles Adrien va à maintes reprises compter le pot et observer Michael, impassible derrière sa chemise verte bariolée. Le Français finit par passer et abandonne pour la première fois le chiplead. C'est le tournant de la rencontre.

22h05. Fabrice Soulier n'y arrive pas. Cantonné à six big bets, il est proche de doubler son tapis en Stud lorsqu'il possède le meilleur low et une couleur. Mais Hani a un brelan de rois et peut encore améliorer sur la dernière carte en faisant un full. « J'ai plein de blockers ! » assure Fabrice, mais l'ultime carte est un Roi donnant carré à son adversaire. « Je n'avais pas pensé à ce blocker là... » se marre un Fabrice un brin défait.

Les derniers jetons du Français volent alors qu'il possède une paire de Huit en Stud. Hani a déjà les bras au ciel : avec deux paires Neuf-Trois, il sait qu'il vient de remporter le premier bracelet de sa carrière en plus des 213 186 dollars de la première place. Fabrice se retourne vers son clan où Patrick Bruel le félicite. « Je suis pressé de revoir les mains » confie-t-il, « si ça se trouve, ce n'est pas qu'une question de manque de chance et il m'a bien défoncé... » La septième seconde place consécutive des Bleus est signée mais Fabrice peut se consoler avec un chèque de 131 762 dollars. « Et des bières ! » ajoute Fabsoul en payant sa tournée à ses supporters.

22h45. Adrien Allain non plus n'y arrive pas. Son adversaire est simplement trop fort aujourd'hui. À table, Michael Gathy donne l'impression de prendre en permanence les bonnes décisions, bluffant au bon moment, payant ou relançant avec des timings tout aussi bons. Et même lorsque le Français est remonté à 40% des jetons en circulation en doublant avec top paire contre un tirage quinte et couleur, les Bleus ont eu du mal à y croire. Les encouragements se sont montrés plus discrets. Puis est venue l'ultime main...

23h12. Adrien relance au bouton à 225 000 et Michael opte pour une sur-relance à 675 000. C'est payé par le Français et le flop s'ouvre A73. 450 000 chez Michael, payé par Adrien. Le Belge va alors laisser la possibilité à Adrien de miser sur un turn K en checkant. Et il ne rate pas l'occasion en envoyant 800 000. Payé, la parole lui revient à nouveau sur un J à la rivière. Adrien pousse ses dernières piles de jetons mais son sang se glace lorsqu'il entend « call ». En bluff avec 86, le Breton sait qu'il vient de laisser passer une chance d'obtenir le bracelet, un mois seulement après sa deuxième place sur l'EPT Monte Carlo. Les 346 632 dollars empochés devraient lui permettre de relativiser sa performance d'ici peu.

Avec KJ, les deux paires de Michael Gathy sont bien suffisantes : elles lui permettent de remporter le troisième bracelet de sa carrière. Il devient le Belge le plus titré aux WSOP en compagnie de Davidi Kitai ! Et alors qu'Adrien Allain s'est déjà éclipsé sans un mot, Michael savoure, une bière à la main offerte par ses supporters : « Je suis sur un petit nuage... C'est sans aucun doute mon plus beau bracelet » confie-t-il, bien conscient de la qualité des joueurs qu'il a dû battre pour s'imposer sur un tournoi d'une telle renommée. Avec, s'il vous plait, un chèque de 560 843 dollars au bout lui permettant de frôler la barre des deux millions de dollars de gains en tournois live.

Côté tricolores, c'est la douche froide. Une fois de plus, deux Français ont perdu en heads up ! Cela fait huit duels de suite...