Minuit et demie à Macao. Incroyablement, Elliot Smith et Terry Tang sont encore en train de batailler dans le Main Event (on vient de franchir le cap de 250 mains jouées dans un heads up ayant débuté il y a presque dix heures !) et Mikedou est bien parti en finale du dernier side-event (il reste sept joueurs). Nous allons quitter Macao demain : après huit jours et huit nuits passées dans l'ancienne colonie portugaise, le moment est venu de faire le bilan de notre séjour. Le cliché veut que Macao est la Las Vegas de l'Orient. Qu'en est-il en réalité ? Point par point, nous avons compté les points.
Poker
Notre jeu préféré n'a débarqué à Macao qu'il y a dix ans seulement : il n'y a donc pas de comparaison possible avec Las Vegas, où l'on joue aux cartes depuis la naissance de la ville il y a plus de cent ans.
Sin City n'est donc pas prête de se faire détrôner en ce qui concerne l'offre de tournois et cash-games. Quel que soit votre budget, quel que soit l'heure, vous n'aurez aucun mal à trouver une partie à Las Vegas tout au long de l'année. Les festivals sont nombreux et variés de janvier à décembre, et durant la période des World Series of Poker, c'est carrément l'overdose de bonheur, avec cinquante jours et nuits où les casinos se tirent la bourre et proposent les tournois les plus extravagants à tous les tarifs et dans tous les formats imaginables, pour une clientèle venue du monde entier. A Macao, hors des gros évènements aparaissant sporadiquement sur le calendrier (un festival tous les trois mois environ), l'offre de tournois est quasi-inexistante. En revanche, le cash-game tourne toute l'année : le Venetian, le Wynn (reproduits quasiment à l'identique des originaux de Vegas) ainsi que le Galaxy sont les noms qui reviennent le plus souvent comme valeurs sûres pour trouver une partie. Le tarif plancher ? Blindes 25/50HK$, soit 3€/6€, grosso modo. Un peu au dessus des
low-stakes de Vegas, donc, qui débutent à 1$/2$.
Ceci étant dit, Macao dispose que quelques atouts dans sa manche. Déjà, le niveau de jeu : à enchères similaires,
n'importe quelle partie ici sera plus facile que l'équivalent de Las Vegas. Le poker est encore jeune en Asie, et les professionnels moins nombreux qu'aux States. La quantité de fric débarquant chaque jour des ferries et avions fait qu'il y a un pognon monstre à se faire, peu importe les
stakes jouées.
Et il y a un domaine où Maco est désormais roi : la sphère high-stakes.
Oui, l'ancienne colonie portugaise est bel et bien l'endroit où l'on joue désormais les parties les plus chères du monde, qui rélèguent l'ancestral "Big Game" du Bellagio et de papa Doyle Brunson au rang d'aimable plaisanterie pour semi-retraités. Les plus gros cash-gameurs américains et européeens ne s'y sont pas trompés : beaucoup visitent régulièrement Macao, quand ils ne s'y installent pas carrément. "
Tu n'as même pas idée des enjeux", nous glissait l'autre jour un joueur français installé ici depuis quelques années, et qui lui-même se contente de parties presque modestes en comparaison (1000/2000HK$ les blindes). "
Il y a des millions qui passent de main en main tous les jours." Ces parties se jouent en privé, loin des yeux des curieux et des journalistes, dans les salons reculés des casinos les plus luxueux, entre riches hommes d'affaires chinois soucieux de protéger leur anonymat : les quelques pros qui arrivent à s'y faire accepter ne risquent pas d'en réveler les secrets. Tout au plus pourrons nous vous dire qu'on aime y jouer une variante survitaminée du Texas Hold'em, où toutes les cartes en dessous du 6 ont été retirées du paquet : avec un tel format, on reçoit beaucoup plus souvent des mains jouables, et l'action y est donc résolument
fast and furious.
Verdict poker : Las Vegas (sauf si vous êtes très riche)
Jeux de hasard
C'est la première chose qui frappera l'habitué de Vegas en pénétrant dans n'importe quel casino de Macao : devant lui, à perte de vue, non pas des machines à sous (elles sont bien là, mais dans une proportion infime par rapport à Vegas), mais des centaines de tables bondées et ne proposant qu'un seul et unique jeu : le baccarat. Certes, en cherchant bien, vous trouverez bien un peu de roulette et du black-jack par-ci par-là, la plupart du temps cachés tout au fond de la salle, mais que l'on ne s'y trompe pas : le joueur chinois semble être du genre monomaniaque, et en 2014, 91% des recettes des casinos de Macao se sont faites grâce à ce jeu de cartes aux règles ultra-simples dont les origines sont françaises et remontent à la fin du 19ème siècle (en gros : deux cartes pour le croupier, deux cartes pour le joueur, un système de points pour comparer la force des mains, la possibilité de tirer une carte supplémentaire, et c'est à peu près tout ce qu'il faut savoir.)

Au cours de nos visites, de jour comme de nuit, nous avons flippé devant l'activité observée autour des tables : il n'était pas rare de voir une bonne centaine de personnes massées derrière une seule partie. "
C'est parce qu'une série est en cours", nous expliqua un habitué des lieux. "
Quelqu'un est en train de gagner plusieurs coups de suite, et de presser ses mises [c'est à dire laisser ses gains en jeu à chaque nouvelle main, pour tenter un gros "écart"]
. Ils restent pour voir jusqu'à quel point il va gagner !" Qu'est-ce qui plaît tant au joueur chinois dans ce jeu que l'on pourrait résumer à un concours de pile ou face ? "
Ils adorent 'squeezer' les cartes", explique notre guide. Autrement dit : découvrir petit à petit son jeu en retournant ses deux cartes millimètre par millimètre, et faire ainsi durer le plaisir avant de savoir si l'on a gagné la main ou pas, selon que l'on aperçoit une ligne courant le long de la carte (indiquant une "tête" : Roi, Dame ou Valet) ou des "points" (piques, coeurs, trèfles ou carreaux), indiquant une plus petite carte, que l'on va continuer de lentement squeezer pour découvrir sa valeur exacte. Résultat : les cartes (faites de carton et non, comme au poker, de plastique) sont proprement martyrisées, et partent au rebut après chaque main. Un coût de fonctionnement somme toute modique pour ces établissements qui accueillent jour et nuit des centaines de joueurs enclins à miser un million de dollars de Hong-Kong sur une seule main...
Quid des enjeux ? Là où Vegas regorge de casinos "low stakes" avec des tables de black-jack, roulette et craps où il est possible de miser aussi bas que 5$ le coup (et l'on peut trouver encore moins cher en s'aventurant dans les casinos les plus anciens), à Macao nous n'avons pas réussi à trouver une table de baccarat à moins de 30$ la mise, y compris dans les casinos les moins luxueux. Notre jugement en ce qui concerne les jeux de hasard sera donc sans appel...
Verdict jeux de hasard : Las Vegas (sauf si vous aimez le baccarat)
Boîtes de nuit et autres divertissements
"
Macao aujourd'hui est un peu ce que Las Vegas était dans les années 60 et 70 : un endroit où l'on vient principalement pour jouer en casino, avec quelques spectacles à côté", expliquait en début de festival un responsable du City of Dreams, le casino accueillant le PokerStars Championship. "
Mais il est probable que Macao ne deviendra jamais ce qu'est Las Vegas aujourd'hui", complétait le coach Stéphane Matheu.
Au cours des trente dernières années, Las Vegas a ainsi été forcée de se réinventer en permanence, pour faire face à une conjonction de facteurs négatifs : crises successives aux Etats-Unis (dont la déprime post-11 septembre, qui a mis à genoux le tourisme dans le Nevada et ailleurs), perte de monopole induite par la légalisation progressive des casinos dans d'autres états américains, baisse de l'intérêt des clients pour les jeux de hasard traditionnels... De terrain de jeu privilégié des riches et de la
jet set à l'époque d'
Elvis Presley et du
Rat Pack (Frank Sinatra, Dean Martin et compagnie), la Ville du Vice s'est progressivement muée en une destination multi-cartes, avec la multiplication des spectacles les plus extravagants, les hôtels à thème ultra-kitsch (Pyramides d'Egypte, Tour Eiffel, Venise, la Rome Antique...) les restaurants étoilés, les attractions les plus délirantes, les terrains de golf, les boîtes de nuit XXL et
pool parties attirant des DJs internationaux à coups de millions de dollars... Cette débauche d'investissements a fonctionné : aujourd'hui, nombre de visiteurs de Las Vegas viennent y dépenser leurs dollars dans les bars, boîtes et restaurants, sans jamais s'approcher d'une table de jeu. Ainsi, la part des recettes des casinos provenant des jeux de hasard est passée de 58% en 1984 à seulement 34% en 2016 !
La situation est bien différente à Macao. Les hôtels-casino géants "à la Vegas" y ont certes poussé comme des champignons ces dix dernières années, mais comme expliqué dans le paragraphe précédent, cet étalage de luxe n'a qu'une seule finalité : attirer les joueurs chinois (28 millions sont venus en 2014, soit 93% des visiteurs) aux tables de baccarat des 33 casinos disséminés sur la péninsule et l'île attenante. Résultat :
hors des jeux de hasard, il n'y a décidément pas grand chose à faire à Macao. Alors qu'à Vegas, à peu près tous les casinos disposent de leur
mega club dédié (voir, dans certains cas, deux ou trois différents), on ne trouve grosso modo que deux vraies boîtes de nuit sur Taipa (le Pacha et le Cubic), modelées sur les établissements huppés occidentaux :
table service VIP, musique electro assez dégueulasse à fond la caisse, et très peu de place pour danser. Mais ces établissements sont loin d'être pleins et au cours des dix dernières années, certaines tentatives de développement d'une vie nocturne digne de ce nom ont même proprement échoué, avec des boîtes de nuit et bars fermant leurs portes après quelques années d'activité décevantes sur le plan des recettes.
Cette situation est sans doute appelée à changer, pour des raisons qui ont tout à voir avec la politique. En effet, les pouvoirs en place du côté de Beijing l'ont fait très clairement savoir : il en ont plus que marre de la réputation de Macao comme étant une destination de riches flambeurs chinois, en particulier les hommes d'affaires et hauts fonctionnaires corrompus du
mainland. Le mot d'ordre venu de tout en haut : il faut que le territoire (pour l'heure indépendant du pouvoir chinois mais tout de même sous influence) s'assainisse et se développe comme une vraie destination pour les familles, avec des divertissements pouvant attirer un autre type de clientèle que les riches
gamblers. Déjà, quelques casinos proposent des spectacles tape à l'oeil (
The House of Dancing Water, créé par des anciens du Cirque du Soleil) et on peut parier que l'offre va se multiplier dans les années à venir, avec des attractions poussant encore plus loin la démesure de Vegas. Témoin le lac artificiel et les fontaines entourant le Wynn Palace, en face du City of Dreams, survolées par un téléphérique gratuit amenant le visiteur directement à l'entrée du casino : "
En comparaison, les fontaines du Bellagio ressemblent à un tuyau d'arrosage fatigué", glisse un joueur impressionné, ajoutant que l'intérieur du palace relègue le Wynn de Vegas au rang "
d'un hôtel deux étoiles."
Verdict boîtes de nuit et divertissement : Las Vegas (pour le moment)
Boire des coups
Ceux d'entre vous qui ont déjà joué le WPO à Dublin ou le SISMIX de Marrakech le savent bien : chez Winamax, on aime bien lever le coude et trinquer entre amis après le tournoi et/ou le boulot. Et de ce côté là, inutile de tourner autour du pot :
Macao fut une immense, colossale, incommensurable déception. Pour vous donner un exemple marquant : un soir au milieu de notre séjour, nous sortions d'un restaurant Thailandais situé dans l'un des casinos les plus luxueux de Taipa, l'île "moderne" de Macao où se trouvent les établissements les plus extravagants. "
J'ai soif", a lancé quelqu'un : "
je boirais bien une petite bière avant de rentrer." Devant nous s'étalait à perte de vue le
floor du casino, avec tables de jeu et machines à sous serrées sur une surface grande comme quatre ou cinq terrains de football. Après quinze minutes à parcourir le labyrinthe en long et en large, nous avons dû nous avouer vaincus : il n'y avait pas le moindre bout de comptoir de bar dans ce casino plus grand que le plus grand casino de Vegas. Nous avons pris un taxi, et nous sommes rentrés nous coucher.
A Las Vegas, on n'est jamais à moins de dix mètres d'une source d'alcool : la ville s'est plus ou moins construite entièrement sur sa consommation (et d'ailleurs, c'est la seule ville des Etats-Unis où il n'est pas interdit par la loi de boire dans la rue). Celle-ci n'est pas seulement tolérée, elle est encouragée. Forcément, les mauvaises décisions que son abus peut générer sont hautement lucratives pour les casinos ! (Voir le cultissimme film
The Hangover pour une démonstration certes exagérée mais dans laquelle chacun des visiteurs de Vegas se retrouvera à un moment ou un autre)
Mais ici à Macao, c'est avec le plus grand sérieux que l'on joue, avec une bouteille d'eau comme seul compagnon. Au cours de nos explorations nocturnes au milieu des tables de baccarat, nous n'avons jamais croisé le moindre serveur, mais seulement des employés poussant des chariots remplis de bouteilles de flotte, qu'ils déposaient à côté des joueurs concentrés sur leur partie et n'y prêtant aucune attention. En ville, même topo : hors des lobbys des grands hôtels, les bars sont quasi-inexistants.
Cette sécheresse comporte cependant un avantage évident : là où à Vegas, on trébuche dès 22 heures sur les cadavres des étudiants de toute l'Amérique prenant leur première cuite à la vodka et sur les
frat boys bourrés se déplaçant en meute à grands renforts de beuglements ("
Vegas baby, WHOOOOOOO"), à Macao, tout le monde se tient bien, et en une semaine, nous n'avons pas croisé une seule personne en état d'ébriété manifeste.
Verdict boisson : Las Vegas (à plate couture)
La bouffe
Las Vegas est l'une de mes villes préférées pour manger : l'offre y est pléthorique, toutes les cuisines du monde sont représentées, nombre de grands chefs y ont installé leurs enseignes prestigieuses, bien manger n'est pas forcément synonyme de grosse dépense, et même aux petites heures de la nuit, on peut trouver une bonne table pour se rassasier.
En comparaison de son concurrent américain,
Macao se défend très bien : les grands hôtels-casinos regorgent d'établissements culinaires luxueux, et au cours de notre séjour, nous avons tour à tour mangé chinois (forcément), mexicain, américain, thailandais, ou encore espagnol. C'était toujours bon, et jamais ruineux. Peu importe vos goûts en matière de nourriture et votre budget, vous n'aurez donc aucun mal à trouver une table à votre convenance : les amateurs de bouffe asiatique seront bien entendu au paradis, et les autres se sentiront comme à la maison avec moult restaurants de sensibilité européenne. Même si le service est généralement meilleur à Vegas (normal : les serveurs sont payés au pourboire, les incitant donc à être ultra prévenants), nous ne désignerons donc pas de vainqueur dans ce match.
Verdict bouffe : égalité
L'architecture et le décor
Avec sa débauche d'hôtels-casino kitschissimmes se succédant sur plusieurs kilomètres et une overdose d'enseignes et de néons kalidéoscopiques propres à provoquer une crise d'épilepsie,
le Strip de Las Vegas fait partie des décors urbains les plus aiséments reconnaissables au monde, que chacun devrait avoir la chance de pouvoir voir de ses propres yeux au moins une fois dans sa vie. Mais ces derniers temps, une certaine sobriété semble être de mise chez les architectes de Vegas : après avoir construit à tout va des pyramides, des bateaux pirates, des palaces romains et des répliques de Venise durant les années 80 et 90, place à des développements un peu plus sérieux - ennuyeux, pourrait-on dire ? Témoin les luxueux Cosmopolitain ou Aria, inaugurés durant les années 2010 et n'offrant aucun thème particulier, si ce n'est celui du "toujours plus gros, toujours plus haut, toujours plus luxe".
Scintillante de mille feux la nuit,
la skyline de Macao s'inspire clairement de sa grande soeur et, peut-être en raison de son plus jeune âge, la démesure va encore plus loin que Las Vegas : les copies des hôtels Wynn et Venetian sont encore plus impressionnantes que les modèles d'origine, et les établissement originaux construits ces dernières années ne sont pas en reste, avec des buildings aux formes toutes plus extravagantes les unes que les autres. C'est comme si l'on avait dit aux développeurs : "
Tu fais comme à Vegas, mais en dix fois plus taré." L'intérieur est à l'avenant : je ne vais pas passer dix pages à vous décrire les salles gigantesques et resplendissantes, les escalators interminables, les moquettes épaisses et multi-colores, les éclairages somptueux, l'or et le marbre omniprésents... Je me contenterai de dire simplement que
Macao pue le neuf, et surtout le fric.
Hors du
bling bling des casinos, la vieille ville et ses cinq cent années d'histoire coloniale
nous ont charmé et, où que l'on soit, l'eau n'est jamais bien loin. Peut-être est-ce parce que l'auteur de ces lignes découvrait Macao pour la première fois après 18 visites à Las Vegas, mais toujours est-il qu'en ce qui concerne l'architecture et le décor, nous allons trancher en faveur de la nouveauté.
Verdict architecture et décor : Macao
Le climat
A chaque ville son type de climat subtropical :
modéré et humide à Macao (15 degrés en janvier, jusqu'à 29 degrés en juillet) et une humidité constante,
aride et étouffant à Las Vegas, avec un thermomètre ne descendant que rarement en dessous de 40 degrés entre mai et septembre. Malgré la pluie qui guette en permanence la péninsule chinoise, notre choix est vite fait, d'autant que la climatisation des casinos est bien mieux réglée à Macao ! A vue de nez, l'air nous a de même semblé un peu plus pur à Macao qu'à Vegas en dehors des casinos, ville notoirement surchargée en pots d'échappement.
Verdict climat : Macao
Les transports
A Macao, nous avons effectué la quasi totalité de nos déplacements en taxi : les chauffeurs, qui ne parlent que très mal l'anglais, adoptent volontiers une conduite "sportive" parfois flippante mais
leur coût est modique (7€ environ la course de 15 minutes en pleine nuit), ce qui nous change des taxis de Vegas, adeptes des faux raccourcis faisant grimper le compteur et perpetuellement de mauvaise humeur, y compris après avoir reçu un pouboire. Sachez en outre que le réseau de transports public de Macao semble très efficace, avec de nombreuses lignes de bus (coût du trajet : 1€) sillonant la ville, et des navettes gratuites affrétées par les casinos au départ de l'aéroport et du port. Nous n'avons pas testé la location de voiture, notre moyen de transport favori à Vegas en raison de son faible coût, mais on va donner l'avantage à Macao, où contrairement à Vegas,
nous n'avons rencontré aucun embouteillage tout au long de notre séjour, ni file d'attente interminable pour trouver un chauffeur. Aussi, et c'est important : Macao est une ville dont les rues sont agréables à parcourir à pied. Tout l'inverse de Vegas, ville sans centre-ville identifié, et tournée entièrement vers le confort de l'automobiliste au détriment de celui du piéton.
Verdict transports : Macao
Les alentours
Passer douze heures dans un avion pour se rendre à Las Vegas ou Macao sans en profiter pour aller voir ce qui se trame à proximité est pour nous de l'ordre de l'hérésie, et hors de question pour nous de trancher entre les alentours des deux destinations : d'un côté comme de l'autre, il y a de quoi faire de très, très beaux voyages. De Vegas, la
Californie, les stars de
Los Angeles et la culture de
San Francisco sont à quelques heures de voiture, de même que les parcs nationaux aux décors de cinéma inoubliables (
Yosemite, Big Sur, Bryce Canyon, Zion, Monument Valley, Gran Canyon...) Pour un Européen, se rendre à Macao suppose généralement un détour par
Hong-Kong (photo) : la visite de la bouillonnante mégalopole est chaudement recommandée et une fois le séjour terminé, pourquoi se priver d'un court trajet en avion pour découvrir, au choix,
Manille, Bangkok, Tokyo, Koala Lumpur ou encore
Séoul ? Les options ne manquent pas.
Verdict alentours : égalité
L'amour
Nous parlons bien entendu d'amour tarifé ici. Pas du tout notre came, mais vous nous auriez reproché de ne pas aborder le sujet, non ? Sachez que,
contrairement à Vegas, la prostitution est légale à Macao, même si le raccolage doit se faire de façon discrète. Là où les filles de joie de Vegas se dévoilent au travers de prospectus codés vantant les mérites de "
99$ special strip tease in your room" distribués jour et nuit sur le Strip, l'approche à Macao est beaucoup plus directe, et vous n'aurez aucun mal à trouver de la compagnie pour la nuit en vous promenant en boîte ou sur le floor des casinos (et je ne vous parle pas de ces salons VIP où les propriétaires feront défiler devant vous les candidates, en vous demandant de choisir avec qui "
spend a good night"). A Vegas comme à Macao, vous engagez devant ce genre d'activités vous coutera quoi qu'il arrive un joli billet, mais les arnaques qui font le quotidien de Vegas (combien de fois avons nous entendu des joueurs des WSOP nous raconter s'être réveillés avec le portefeuille vide et un mal de crâne au lendemain d'une rencontre avec une charmante, laissant supposer qu'ils s'étaient fait droguer !) semblent être beaucoup plus rares à Macao. Aussi, les établissements proposant massages et autres saunas avec
happy ending sont légion (il y en a un au sous-sol de mon hôtel : cela m'a pris deux soirs et dix tentatives pour comprendre que le portier tentait de m'y emmener alors que je rentrais d'une longue journée à regarder le Main Event) En ce qui concerne les strip clubs, ils existent bel et bien à Macao, mais en proportion beaucoup moindre qu'à Vegas. Les tarifs sont similaires, dit-on, et les plus aventureux d'entre vous se dirigeront vers l'un de ces établissements louche proposant des "
adult shows" où l'on regarde des couples s'amuser sur scène. Bref, pour tout ce qui est glauque, Macao y va beaucoup plus franco que Vegas. Autre culture, autre moeurs.
Verdict amour : Macao
Le coût de la vie
Forcément, notre expérience de Macao reste limitée par rapport à celle de Las Vegas (un séjour contre dix-huit). Globalement, j'ai l'impression que les deux villes se valent en ce qui concerne les restaurants : on peut y manger un repas correct pour une somme comprise entre vingt et trente dollars, boissons comprises. On l'a dit, les taxis sont moins chers, mais jouer vous coutera plus d'argent à Macao. Un domaine où Las Vegas se fait battre à plate couture : l'hôtellerie. Personellement, j'avais reservé sur Internet, un peu au pif, un hôtel correspondant à mon budget habituel en déplacement (grosso modo 100€ la nuit) : quelle ne fut pas ma surprise de débarquer dans un véritable palace cinq étoiles, offrant tout le confort possible et imaginable, y compris une salle de bain plus spacieuse que mon salon en banlieue parisienne. De base, Las Vegas est une ville de rêve en ce qui concerne l'hôtellerie (on peut y loger dans une suite pour le prix d'un une étoile à Paris : les casinotiers sont prêts à tout pour que veniez chez eux dépenser vos dollars au black jack et au craps !), mais Macao fait encore mieux, avec des établissements encore plus luxueux pour un coup encore moins élevé. Ils sont très forts, ces chinois.
Verdict coût de la vie : Macao
L'ambiance
Nous arrivons en fin d'article (il était temps !) : c'est le moment de tenter un jugement définitif dans le match opposant Las Vegas à sa petite soeur asiatique. J'espère que vous l'aurez compris en filigrane tout au long de cet article : pour tout un tas de raisons, Macao n'est définitivement pas Las Vegas. Mais cela m'a pris quelques nuits pour comprendre exactement pourquoi. Au delà de l'atmosphère au sein des casinos, au delà des habitudes de jeu, au delà des différences culturelles, il y avait autre chose.
En fin de compte, à force de parcourir les rues, d'observer les gens, de les regarder manger, jouer, se promener dans les boutiques, j'ai fini par piger. La réponse, je l'avais devant les yeux depuis le début, mais mes normes d'occidental formaté à un certain standard de vie m'avaient aveuglé tout du long. Débordante de fric, de luxe, de salons privés, d'hôtels cinq étoiles et de tables de jeu aux enjeux renversants,
Macao est tout simplement une zone VIP géante. Pour un visiteur chinois, s'y rendre constitue déjà un privilège impensable pour la majorité : seuls une poignée peuvent se le permettre.
A l'autre bout du monde, Vegas s'adresse à toute l'Amérique, il y a des casinos et des hôtels pour tout le monde, pour tous les budgets. Chacun peut s'y rendre pour tenter de toucher du doigt un bout d'un rêve américain, un peu obsolète, un peu kitsch. On y croise donc toute l'Amérique, celle des campagnes comme celle des villes, celle de la classe moyenne comme celle des galériens, la bourgeoisie comme les prolos. Rien de tout cela à Macao : à l'intérieur des casinos, j'ai l'impression (qu'on me rigole au nez si je me trompe !) de n'y avoir croisé qu'une certaine société chinoise, celle qui peut sans complexe claquer en une soirée de baccarat l'équivalent de plusieurs salaires moyens sur le
mainland.
En cela, Macao ressemble donc moins à Las Vegas qu'à une autre grande destination de jeu : Monte Carlo.
Et le reste...
Cigarette : une longueur d'avance du côté de Macao, qui a depuis quelques années interdit la clope dans l'intégralité des lieux publics, alors qu'à Vegas, la puissance des lobbies fait des casinos l'un des derniers bastions fumeurs des Etats-Unis.
Internet : avantage à Macao ! Nous avons pu connecter nos téléphones au Wi-Fi gratuitement et en haut débit dans la plupart des casinos que nous avons visités (et même dans les bus !)
Shopping : toutes les grandes marques de luxe sont présentes à Vegas comme à Macao, avec un accent particulier mis sur les montres et à la bijouterie du côté asiatique. En revanche, nous n'avons croisé aucun de ces outlets Nike, Levis, Adidas, Giorgio Armani (et compagnie) à prix d'usine faisant le bonheur des visiteurs Européens à Vegas. Amateurs de photographie, sachez que les prix de Hong-Kong sont très compétitifs pour tout ce qui concerne les marques Nikon et Canon.
L'anglais : même si la langue de Shakespeare reste mal parlée à Macao, nous n'avons jamais eu aucun problème pour nous faire comprendre. Petit conseil pour les trajets en taxi : copiez-collez sur votre téléphone l'adresse de votre hôtel en chinois.