Le PSPC vient de rendre son verdict. Quatre ans après Ramon Colillas, Aliaksandr Shylko est le nouveau Roi du Pokerstars Players Championship. Un jeune homme pétri de talent et d'ambition se présente aux yeux du poker mondial. Un modeste gamin de Minsk qui vient de remporter le tournoi de sa vie, pour 3 121 828 $.
PS Players Championship (Fin de Day 5)
Un visage juvénile qui ne peut contenir ses émotions. Impassible durant les cinq jours qu’il a passés à table, Aliaksandr Shylko révèle enfin son grand sourire, au moment de la remise du trophée. Il exprime le bonheur, l’insouciance d’un garçon qui n’arrive pas à croire le moment qu’il est en train de vivre. Il ferme les yeux, bouge la tête de droite à gauche, les rouvre, puis tapote le trophée de ses doigts, comme pour vérifier qu’il est bien réel. Même braqué de mille caméras, le garçon ne masque rien. Ni son grand sourire qui monte sur ses pommettes imberbes, ni son regard émerveillé. La joie à l’état pur.
« J’essaie d’être dans le moment le plus possible, pour pouvoir me souvenir. explique le garçon, lorsque je lui demande ce qu’il lui passe par la tête à ce moment précis. Ce sont des moments uniques dans la vie. C’est dur de le faire, parce que votre esprit regarde le passé, se projette dans le futur, mais j’essaie autant que possible d’être dans le moment présent. C’est une expérience folle ».
Le trophée en question est énorme, à l’image de sa performance. À 26 ans, Aliaksandr Shylko vient de remporter l’un des plus grands tournois du monde, à 25 000 $ de buy-in, devant un field 1 014 joueurs, parmi lesquels les meilleurs de la planète pour un gain astronomique : 3 121 838 $.
Une somme presque difficilement quantifiable pour un gamin de Minsk, élevé dans une famille modeste. À aucun moment pourtant, on ne l’a vu trembler. Les coups avaient beau valoir des centaines, des millions de dollars, Aliaksandr restaient de marbre. « Pour être honnête, je n’ai pas regardé le pay-out de tout le tournoi, affirme le joueur. Quand je suis arrivé en finale, mes amis me demandaient ce que j’allais faire si je gagnais les 4 millions. Je ne savais pas quoi répondre. J’essayais de rester concentré, de relâcher la pression, et de me concentrer sur mon jeu. À la table, j’ai juste voulu rester le plus calme possible et prendre les mains les unes après les autres. ».
Cette sérénité a cependant disparu l’espace de quelques secondes, lorsque après trois heures de finale, Shylko jouait le coup d’une vie. Une rencontre à tapis face à Philipe Pizzari où le Biélorusse se retrouve dominé avec A10
contre le A
K
du Brésilien.
Open bouton, 3-bet shove du chipleader Pizzari et Shylko décide de payer pour ses 22 dernières blindes. Le flop vient KJ
4
, A
sur la turn, Aliaksandr ne joue que la Dame… Boum ! Q
river. Le gamin explose pour la première fois de la partie, se met à sauter autour de la table et tombe dans les bras de son rail, qui hurle avec lui.
« Normalement, je suis quelqu’un de plutôt calme. Mais quand j’ai vu cette Dame, je n’ai pas pu pas me retenir. J’étais comme dans un rêve. Un autre coup clef, c’est en demi-finale. Je joue un duel avec As-Roi contre As-Dame, se souvient le joueur, dont le visage s’était en effet décomposé au moment de voir la Dame au flop… Jusqu’à ce Roi sur la turn. Si on ne compte pas cette Dame river, c’était le plus grand coup de poker de ma vie. C’était la main pour accéder à la table finale. J’ai vraiment été pris par les émotions. Ce sont des moments dont je me souviendrai toute ma vie ».
Il faut bien des coups du destin pour remporter ce genre de tournoi. Mais le Biélorusse doit surtout sa victoire à une prestation exceptionnelle. Une tenue de table étonnante pour son jeune âge, une agressivité bien choisie et une capacité de gestion qui montre que du haut de ses 26 ans, le gamin est déjà un homme de grandes finales.
Pour mettre fin à celle-ci, il a parfaitement attiré Max Menzel sur un pot limpé avec 105
. L’Allemand part pour un lead sur le board 5
5
8
. Puis un deuxième barrel bien pesé sur la turn 10
. Sur la river Q
, le Biélorusse fait face à un check. Il part pour un bet deux tiers pot, à hauteur de 4,5 millions… et entend l’Allemand annoncer tapis. Snap-call avec son full-house, Max avait touché la quinte river avec son J
9
. C’est gagné.
Aliaksandr valide là la deuxième win de sa carrière. La première, c’était à Rozvadov, l’une de ses destinations de prédilection, sur un Side High Roller de l’Eureka Poker Tour. Toujours au King's Casino, il avait presque atteint les six chiffres, en atteignant la 4e place du Main Event WSOP-C 2021, pour 80 briques.
Le gamin de Minsk, qui commençait le Live il y a six ans par les 130 $ du Casino Olimp Victoria dans sa ville, est désormais un champion international. Cette perf' titanesque le propulse d’ailleurs directement à la 3e place de la All-Time Money List nationale, à quasi-égalité avec Ihar Soika, finaliste High Roller EPT, et un certain Mikita Badziakouski, qu’on ne présente plus.
Présent dans le rail, le High Staker n’a d’ailleurs rien loupé de la performance de son poulain, avec qui il travaille régulièrement. Comme son mentor, Aleksandiar vient de placer une nouvelle fois la Biélorussie sur la carte du poker mondial. Un nouveau champion biélorusse est né.
« Ça représente le monde pour moi. Toute ma vie, j’ai rêvé de représenter mon pays. J’ai travaillé très dur pour ça, affirme le jeune champion. C’est incroyable d’être dans le même groupe de joueurs que Mikita Badziakouski. Je dois encore beaucoup m’entrainer pour atteindre le niveau où il est… Et puis on doit être une luck box de temps à autre. C’est aussi le résultat de tout ce groupe ».
Et maintenant qu’on a gagné l’un des plus gros trophées du monde, pour un gain faramineux… que peut-on viser après ça ?
« C’est une question très difficile, confirme le Biélorusse. J’ai beaucoup d’ambitions. D’abord, je veux gagner pour moi. Et bien sûr, pour les trophées. Là, j’en ai gagné un, mais il y en a encore beaucoup d’autres à gagner. Je n’ai pas encore de bracelets, de titres EPT… Je vais travailler pour, et ensuite, cela dépendra de ma passion. Je suis passionné de ce jeu, et tant que j’aurai cette passion en moi, je continuerai ».
On lui souhaite de poursuivre son chemin… Qui passera d’ailleurs très prochainement par Paris. Et cette fois, on ne pourra plus se demander qui se cache derrière ce visage juvénile. Aliaksandr Shylko, le nouveau prince de Biélorussie.
25 000 $ - PSPC 2023
1 014 joueurs - Prizepool : 24 843 000 $
Place | Joueurs | Prix |
---|---|---|
1 | Aliaksandr Shylko | 3 121 839$ * |
2 | Max Menzel | 2 859 990$ * |
3 | Philipe Pizzari | 2 524 871$ * |
4 | Nacho Barbero | 1 551 300$ |
5 | Pedro Marques | 1 251 500$ |
6 | Niclas Thumm | 1 001 200$ |
7 | Thomas Eychenne | 801 000$ |
8 | Petar Kalev | 621 300$ |
9 | Andrei Boghean | 449 700$ |