Top 5 : Les spews de légende

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Il n'y a pas que les coups de poker de génie qui marquent les esprits : découvrez notre Top 5 des plus beaux craquages de l'histoire.

Top 5 des Spews

To spew : de l'anglais, cracher. Au poker : dégueuler. Ses jetons, bien sûr.
Exemple : "Matusow a spew le chip-lead contre un Allemand, il est en plein tilt."

Être rigoureux dans sa sélection de mains de départ, gérer sa bankroll avec soin, construire des bluffs cohérents et ne pas tomber amoureux de sa main : jouer son A-game au poker, c'est bien, mais parfois c'est un peu chiant aussi. Il faut savoir relâcher la pression de temps en temps pour continuer d'apprécier ce jeu. Tout bon joueur possède un grain de folie : s'il peut parfois nous transformer un instant en génie, il peut également vite provoquer une catastrophe. Une mauvaise lecture préflop ou bien un bluff irréfléchi dont on n'arrive plus à se dépêtrer : le spew nous guette à chaque coin de street. Et quand les caméras sont là pour le filmer, ça donne une jolie compilation de moves à ne surtout pas reproduire à la maison.

Vanessa Selbst dans The Big Game
 

On la connaît pour une foule de belle choses : son talent, ses coups de génie, ses trois bracelets. Il y aussi ses coups de gueule sur Twitter et ailleurs, ou encore cet incroyable setup face à Gaëlle Baumann lors du Main Event des WSOP 2017. Mais Vanessa Selbst, c'est aussi cette faculté épatante à faire voler les jetons avec des mains plutôt illégitimes, voire même carrément immondes. Comme ici en 2010, au cours de l'émission The Big Game, un cash-game télévisé. Les blindes : 200 $/400 $. Invitée de l'émission, c'est face à un autre professionnel, le facétieux Prahlad Friedman que la numéro un mondiale de la Women All-Time Money List va faire parler son ego dans un festival de relances et sur-relances préflop avec... Valet-Sept pareillés ! Vanessa trouve le moyen d'engager l'intégralité de ses 170 000 $ de tapis dans un 6-bet all-in plutôt ambitieux et bien mal tombé face à la paire d'As de l'Américain. Y'a de quoi faire la grimace.

Viktor "Isildur1" Blom aux WSOP Europe 2009
 


Difficile de parler de celui qui, à la fin des années 2000, est devenu en un temps record une véritable légende du poker moderne sans immédiatement penser aux swings de plusieurs millions de dollars qui sont sa marque de fabrique. Avec son style hyper-agressif, Viktor Blom n'avait peur de personne et terrorisait les tables online les plus chères. À la glorieuse époque de la section high stakes de Full Tilt Poker (RIP), il a disputé les plus gros pots de la planète et fait trembler les Tom Dwan, Phil Ivey et consorts... dans l'anonymat le plus total ! Car derrière le pseudo "Isildur1", sa véritable identité a longtemps alimenté les discussions et les rumeurs, avant d'être finalement révélée en grande pompe en janvier 2011 aux Bahamas. À ce stade, il ne s'agissait plus que d'un secret de polichinelle : le nom du Suédois était sur toutes les lèvres depuis plus d'un an.

Viktor Blom n'a pas sévi qu'en cash-game : son palmarès sur le circuit live totalise près de 3 millions de dollars de gains. Une paille si l'on compare avec ses fluctuations sur Full Tilt, mais ses apparitions en live ont permis de capturer sur pellicule un style de jeu foutrement agro. Exemple avec cet énorme bluff qui l'oppose à l'amateur anglais Ian Munns lors du Main Event des WSOPE 2009. À cette époque, Viktor vient tout juste d'obtenir sa majorité, mais les faits sont là : le gamin en avait déjà comme des melons.

Estelle Denis dans les Winamax Live Sessions
 

Invitée des Winamax Live Sessions en qualité de WIP, Estelle Denis ne s'est pas pour autant assise autour de la table pour faire de la figuration. Passionée de longue date (on se souvient tous de cette paire d'As volée lors du Main Event des WSOP 2009), la journaliste sportive totalise près de 200 000 $ de gains en live. Ce n'est donc pas une partie de cash-game aux blindes 10 €/20 € qui va l'effrayer, encore moins devant nos caméras, installés pour l'occasion au Cercle Clichy-Montmartre. Alors quand il s'agit de se livrer au fameux jeu du 7 et 2 (le principe est simple : si on remporte un coup avec cette poubelle, tous les joueurs nous donnent 40 € chacun), Estelle ne se fait pas prier, quitte à envoyer 1 220 € au milieu en totale pampa. Sauf que derrière, Pierre Calamusa attendait de pied ferme un client, premium en main. Oops.

Filippo Candio (WSOP 2010) et Jake Cody (EPT Deauville 2010)
 

Le poker a cela de magique que parfois, même une décision discutable, mathématiquement incorrecte ou carrément horrible sera récompensée. Ben oui : quoi qu'on fasse, il reste une part de hasard dans le poker. C'est ce qui différencie notre jeu préféré des échecs et, avouons-le, cette éternelle part d'incertitude explique en grande partie pourquoi on n'arrivera jamais à s'en lasser. Les spews gagnants, donc : ils peuvent changer une vie. Témoin ces deux coups, qui chacun à leur manière ont marqué l'ère moderne du poker, bouleversé le destin de leurs perpétreurs et traumatisé les victimes.

Le théâtre du premier n'est autre que le Day 8 du Main Event des WSOP en 2010. Autrement dit la dernière journée avant la finale. Alors qu'il ne reste que deux tables, le fantasque Italien Filippo Candio s'engage dans un énorme pot contre Joseph Cheong, avec 57 contre la paire d'As de Cheong sur 566. Sa décision est incompréhensible : Candio paye le tapis de l'Américain, engageant plus de 80 blindes au flop avec seulement 13% de chances de s'en sortir. La suite est entrée dans l'histoire... mais pour l'anecdote, on notera que, comme souvent au poker, le talent a fini par prendre le dessus sur la variance. 3e à l'issue de ce Main Event pour 4,1 millions de dollars, Cheong a lancé une formidable carrière qui perdure aujourd'hui : il cumule 13 millions sur Hendon Mob, tandis que celle de Candio (4e) semble s'est arrêtée en 2015, sans que l'italien ne soit parvenu à rééditer de performance véritablement marquante.

Le deuxième spew gagnant que nous vous proposons est peut-être encore plus cruel : il est tombé un joueur qui était alors l'un des grands espoirs du poker français, Hugo Lemaire. Opposé lors de l'EPT Deauville 2010 à un Jake Cody encore inconnu de tous, Hugo croit vivre le rêve absolu lorsqu'il voit le Britannique 5-bet shove préflop alors que le Français détient une paire de Rois en béton. Sauf que les dieux du poker en ont décidé autrement : en carnaval complet avec 10-4 dépareillés, le Britannique trouve une quinte miraculeuse, élimine Hugo aux portes de la finale et remporte le tournoi dans la foulée. Un an et demi plus tard, il entre dans le club très fermé des détenteurs de la Triple Crown après avoir gagné coup sur coup un WPT puis un bracelet WSOP. Une trajectoire phénoménale qui doit sans doute beaucoup à ce spew so 2010. Même si Hugo vivra au cours des mois à venir quelques beaux succès (une victoire aux EFOP, une seconde place sur le WPT Paris), on ne peut s'empêcher de penser que sa carrière aurait pris une autre tournure si les pourcentages avaient été respectés à Deauville.

Bonus : le bluff le plus ridicule de l'histoire ?
 

Cette dernière main se passe de commentaire. Alors que son adversaire a révélé ses cartes par inadvertance, un joueur espagnol prénommé Alfredo croit pouvoir faire coucher un full affiché à la vue de tous, dans une tentative de bluff aussi improbable qu'optimiste. Ce spew tragi-comique est la meilleure des illustrations des dangers de tomber amoureux de sa main.

Ils auraient pu aussi figurer dans ce Top 5 : Philip Hilm, from hero to zero, chipleader à l'entame de la table finale du Main Event des WSOP 2007 et éliminé... neuvième; Anton Morgenstern, qui a attiré la compassion de tous les degens de la planète poker en enchaînant les vilaines décisions et les bad beats à trois tables restantes du Main Event pour se faire éliminer 20e en 2013 puis 22e en 2015; les tickets de caisse de Pierre Calamusa lors de ses virées en boîte; les poubelles avec lesquelles vos adversaires s'envoient tous les jours en l'air sur Winamax et qui font le bonheur de nos Top 5 hebdomadaires...

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PonceP

Journaliste poker. A commencé à jouer avant sa puberté. L'attend toujours.

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