Top 5 : Les punchlines

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Musclez votre trash-talk grâce à quelques célèbres pépites lâchées par les plus grands pros.

Top 5 : les punchlines
Certains pros du poker n'ont rien à envier aux rappeurs les plus tchatcheurs. On vous le démontre avec une sélection maison de nos cinq punchlines préférées. Après un gros pot ou pendant un bluff, dans la victoire ou face à la défaite : Top 5 des moments où les bons mots des pros ont rivalisé avec Audiard.

Une perle de sagesse inattendue
Phil Hellmuth

Phil HellmuthAh, Phil Hellmuth. On pourrait écrire un recueil entier compilant les noms d'oiseaux et invectives lancés à table par le Poker Brat. Mais un tel ouvrage contiendrait surtout des insultes plus ou moins fleuries lâchées sous le coup de la colère, ou des vantardises pleines d'orgueil et de mauvaise foi. Peut-être lui fallait-il seulement le bon adversaire, à l'ego aussi surdimensionné que le sien pour qu'enfin Hellmuth nous offre une punchline digne de ce nom. Ce personnage à part entière, c'est Tony G. Antanas Guoga, de son véritable nom que personne n'emploie dans le monde du poker, est un richissime homme d'affaire lituanien qui se plait à taper le carton avec les meilleurs joueurs de la planète. Principalement réputé pour son bagoût et son jeu pour le moins atypique, il fait logiquement partie des invités récurrents de l'une des émissions phares de la room au pique rouge à cette époque-là, une grande partie de cash game entre superstars (avec un amateur complet invité sur chaque épisode), The Big Game.

Le principal trait de caractère de Tony G ? Il n'est jamais aussi insupportable que lorsqu'il gagne. Un détail qui a son importance lorsqu'il est assis face à un joueur comme Hellmuth, qui n'est jamais aussi insupportable que lorsqu'il perd. Bien consciente du potentiel comique d'une confrontation entre les deux hommes, la production pousse le vice jusqu'à les placer côte à côte lors du tout premier épisode du show. Après quelque temps à table et de bons mots échangés ("Tony can you please shut up? Show some class."), arrive cette main où Tony ouvre et paie la relance préflop d'Hellmuth avec 5-4 off pour terminer en full, alors que Phil avait trouvé la top pair avec son 10-9. Fier de son coup, le Lituanien s'empresse de mettre de l'huile sur le feu : "Apportez un tricycle ! Parce qu['il] n'est pas capable de faire du vélo !" "Tu es une honte pour ce jeu," enchaîne Guoga avec un sourire. C'en est trop pour Phil Hellmuth, qui s'en va contre toute attente délivrer l'un de ses rares moments de sagesse à une table de poker : "Tu détestes que l'on te dise la vérité, débute-t-il. J'aimerais ne pas être un mauvais perdant. Mais c'est dix fois pire d'être un mauvais gagnant !" Pour une fois, le sale gosse du poker marque un point au débat d'idées. - Flegmatic

Quand l'honnêteté paie
Scotty Nguyen

Kevin McBrideMasquer son jeu, déguiser la force de sa main, camoufler ses intentions, bref, mentir : c’est le b.a.-ba du poker, au programme du premier chapitre de toutes les leçons pour débutants. Pourtant, certains professionnels sont tout à fait capables d’arriver à leurs fins et de maximiser leurs gains tout en ayant été parfaitement transparents quant à leurs desseins. L’exemple le plus emblématique de ce type de comportement ? Scotty Nguyen, lors du heads-up final du Main Event de l’édition 1998 des World Series of Poker. Faisant face à l’amateur Kevin McBride (photo), le pro d’origine vietnamienne trouve l’un des meilleurs boards possibles pour son J9 : 89988. Sur le dernier tour d'enchères, il mise logiquement l'intégralité de ses jetons et McBride, qui est couvert, se met à réfléchir. Que fait alors le jovial et décontracté Nguyen ? Plutôt que de se lancer dans un numéro d’acteur en feignant la nervosité, le pro opte pour la franche honnêteté, lançant carrément à son adversaire : "You call, gonna be all over baby !" En VF : si tu paies, c’est terminé bébé.

Scotty NguyenGonflé ! Mais Scotty ne faisait que dire la vérité... et le piège a fonctionné ! Car McBride, qui jouait uniquement le board avec son Q10, n’a pas pu se résoudre à jeter ses cartes… Ainsi concrétisée, cette prédiction en forme de menace est aussitôt entrée dans l'histoire du poker, et a contribué à faire de son auteur la légende qu'il est aujourd'hui. Car si remporter le tournoi le plus prestigieux du monde est toujours une histoire de talent, rares sont ceux ayant réussi à allier à ce talent un tel panache, en toute détente. – Benjo

Ni vu ni connu j't'embrouille
Antonio Esfandiari

Antonio EsfandiariOn l’a vu plus haut, au poker la transparence peut parfois payer. Mais elle doit rester l’exception plutôt que la règle. Si vous êtes malgré tout d’humeur tchatcheuse, optez pour la sécurité en vous cantonnant à un langage codé, voir indéchiffrable. Histoire de brouiller les pistes d’un adversaire en train de réfléchir s’il doit payer ou non votre grosse mise sur la rivière, essayez par exemple cette punchline, communément attribuée à Antonio Esfandiari : "Si tu paies je te montre le jeu max, si tu fold je te montre un bluff." Avec ça, aucune chance que votre adversaire obtienne la moindre aide pour prendre sa décision… En revanche, tous les autres joueurs de la table resteront bouche bée devant votre sens de la répartie. - Benjo

Une défaite pleine de classe
Nick Dandalos

Johnny MossIl s'agit sans nul doute du duel le plus légendaire de l'histoire du poker. Un face-à-face étalé sur cinq mois durant l'année 1949 entre Johnny Moss (photo à gauche), l'un des meilleurs joueurs de son temps et futur premier vainqueur du Main Event des WSOP, et Nick 'The Greek' Dandolos (photo ci-dessous), autre figure quasi mythologique des États-Unis de la première moitié du XXe siècle. Un gambler invétéré capable de perdre et de gagner des sommes délirantes d'un jeu à un autre en une même journée. En l'occurrence, pour cet affrontement entre géants, les enjeux sont démentiels : entre 2 et 4 millions de dollars selons les récits de l'époque. Si cela n'est déjà pas négligeable aujourd'hui, imaginez-vous il y a plus de 70 ans ! Mais malgré sa réputation et tout son talent, The Greek doit s'avouer vaincu pour cette fois, acceptant sa défaite avec une réplique finale à la hauteur de sa légende : "Mr. Moss, I have to let you go." ("Mr Moss, je vais devoir vous laisser partir.") Sauf que de légende, voilà bien ce dont il serait question ici, celle-ci étant remise à mal en 2009 par le journaliste Steve Fischer, dans un article au titre évocateur : The Biggest Game Never Played.

Nick DandalosAlors que l'on a longtemps cru que ce match avait eu lieu dans un Horseshoe Casino plein à craquer, de nombreux témoignages récents sont venus quelque peu tempérer les ardeurs des férus d'histoire. D'autant que le plus bruyant d'entre eux est venu de Jack Binion lui-même, dont le père Benny se serait chargé d'organiser ce fameux marathon. Au final, rien de tout cela ne serait vrai. Non seulement le Horseshoe n'avait pas encore ouvert ses portes, mais en plus Benny Binion avait perdu sa licence pour ouvrir un établissement de jeu après avoir dû fuir du Texas au Nevada pour pratiques illégales. Cerise sur le fer à cheval, il était sous le coup d'un mandat d'extradition. Selon Jack Binion, Moss et Dandolos se sont bien affrontés en 1949 mais sous le toit du Flamingo, sans spectateurs et certainement pas durant de long mois. La confusion viendrait d'une autre partie organisée avec public au début des années 50 au Horseshoe, à laquelle Moss a participé... mais pas Dandolos. À partir de là, on peut douter de tout, jusqu'à cette fameuse citation du Grec. A-t-elle réellement été prononcée ? Peu importe au fond. Qu'elle soit réelle ou fictive, on n'a jamais vu de défaite aussi classe. - Flegmatic

Tirer sur une ambulance
Doyle Brunson

HSPDiffusée entre 2006 et 2011, l’émission de cash-games High Stakes Poker a représenté un certain âge d’or du poker télévisé. Cinq années durant, les plus grandes stars de l’époque se sont battues pour obtenir le droit d’intégrer le luxueux plateau et avoir la chance de démontrer leur talent devant les caméras, faisant prendre son pied à une génération entière de fans. Dix articles Top 5 ne suffiraient pas à compiler les coups de poker les plus incroyables qui se sont joués au cours des 98 épisodes de "HSP"… On ne s’arrêtera donc ici que sur le plus gros d’entre eux, joué lors de la saison 4 tournée en 2007. Le plus gros… et probablement le plus bizarre et controversé aussi ! Pourquoi ? Parce qu’il nous a permis d’observer à l’œil nu la désarmante faiblesse d’un professionnel accompli et réputé extrêmement dangereux… en même temps que la générosité inouïe de l’amateur qui lui faisait face. Vous en conviendrez : ces deux traits de comportement sont généralement introuvables à une table de poker, en particulier lorsque son tarif d’entrée est de 500 000 dollars.

Guy LalibertéRembobinons l’action : muni de A3, le runner-up des WSOP 2003 Sam Fahra ouvre l’action préflop avec une relance à 4 200 $. C’est payé par David Benyamine (A8) et Guy Laliberté (K5). Le flop tombe K35. Tout le monde a trouvé quelque chose et logiquement, l’action s’emballe sans tarder : c-bet de Fahra pour 13 000 $, relance à 43 000 $ de Benyamine avec le tirage couleur max, et 3-bet de Laliberté à 168 000 $ avec ses deux paires. Fahra s’écarte prudemment du chemin, tandis que Benyamine se lève pour réfléchir. Une minute plus tard, sa décision est prise : tapis, pour 600 000 $. Indécis, Laliberté décide de retourner ses cartes, les rendant visibles à l’ensemble de la table - une pratique autorisée et courante sur le plateau de High Stakes Poker. Le visage de Benyamine se couvre d’un léger voile d’effroi : le pro français sait maintenant qu'il va perdre deux fois sur trois une somme colossale, lui qui est à l’époque l’objet de rumeurs folles concernant ses swings dans la Bobby’s Room et l’état déclinant de sa bankroll !

David BenyamineGuy Laliberté paie le tapis de Benyamine, et ce dernier se met immédiatement à chercher une issue de secours pour limiter la casse dans ce pot de 1 227 900 $ : "En combien de fois tu veux la faire ?" Autrement dit : Benyamine propose de tirer plusieurs turns et rivières, une négociation courante en high stakes visant à lisser la variance. Avec seulement 35% de chances de gagner le pot, obtenir un split pot sur un des deux (voire trois) boards ainsi tirés serait déjà une belle affaire pour Benyamine !

C’est à ce moment que ce coup de cartes va dépasser le simple cadre du poker pour se transformer en une leçon de vie (et de mort ?) En complète position de force, Guy Laliberté aurait très bien pu se montrer intraitable face à un adversaire certes en difficulté mais techniquement bien supérieur à lui. Après tout, le fondateur du Cirque du Soleil, à l’époque l’un des hommes les plus riches de Vegas avec des spectacles affichant complet tous les soirs un peu partout sur le Strip, était déjà reconnu comme l’une des plus grosses baleines de l’histoire des high-stakes, perdant régulièrement des millions sur les plus grosses tables de Full Tilt contre Tom Dwan, Phil Galfond, Patrik Antonius et consorts (on estime l’ensemble de ses pertes online entre 2006 et 2012 à… 31 millions de dollars !) Absolument personne ne lui aurait reproché de vouloir remporter à la loyale ce pot conséquent. Sauf que non : ce soir-là, sur le plateau de HSP, Guy Laliberté va décider de… rendre les armes. Sentant la détresse de Benyamine, il lui propose purement et simplement de stopper net le coup au flop, sans turn ni rivière, mais aussi de… rendre l’argent au pro ! Vraiment : Laliberté est prêt à se contenter de gagner les jetons qui étaient au milieu avant l’envol des tapis. Soit 238 900 $, à peine 20% du montant réel du pot ! Une offre inouïe, inédite, incroyablement indulgente que Benyamine va évidemment s’empresser d’accepter, préférant perdre 47 200 $ tout de suite plutôt que de risquer 600 000 $.

Doyle BrunsonAinsi, le plus gros pot de l’histoire de High Stakes Poker ne le fut pas vraiment au bout du compte… et si cette main se retrouve aujourd’hui dans un article consacré aux plus belles saillies de l’histoire du poker, c’est grâce au savoureux échange qui s’est déroulé juste avant que ce gentleman de Guy Laliberté ne fasse la démonstration de sa générosité :

Guy Laliberté : "Comment tu veux faire ? Je dis ça parce que c’est beaucoup d’argent pour toi. Ce pot est sûrement plus important pour toi que pour moi, alors c’est toi qui dois prendre une décision."
Doyle Brunson, s’adressant à Benyamine en pointant du menton vers Laliberté : "Ce pot représente un jour de sa vie. Pour toi, il représente ta vie."

S'incruster dans un pot qui ne vous concerne même pas, juste histoire de crucifier un adversaire déjà au bord du gouffre : seule une légende du calibre de Texas Dolly pouvait se permettre ça. - Benjo

Depuis le rachat de l'émission par la chaîne payante PokerGO, les archives de High Stakes Poker ont disparu des sites gratuits : il vous faudra donc un abonnement pour voir cette main, et toutes les autres qui ont marqué l'histoire du programme. Mais on vient d'apprendre la bonne nouvelle : grâce à PokerGO, High Stakes Poker va bientôt faire son grand retour après neuf ans d'absence de nos écrans, avec pas mal de stars de la grande époque !

Vous aussi, vous avez déjà cloué sur place un adversaire en pleine partie ? Partagez vos plus belles punchlines sur nos pages !

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Benjo DiMeo

Triple vainqueur VSOP à Cognac.

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