Top 5 : Coups d'essai, coups de maître
Par Tournois Live
dansLeur première ligne Hendon Mob est une victoire : Top 5 des joueurs de poker qui n'ont pas eu à patienter avant de soulever un trophée.
Adage bien connu de tous les joueurs de poker : terminer en seconde place d'un tournoi, c'est comme terminer en seconde place d'un combat de boxe. Certes, on peut gagner beaucoup d'argent et se faire kiffer avec une place de runner-up, un podium ou une accession en finale. Mais il n'en reste pas moins que tous les joueurs de tournoi vous le diront : seule la victoire est belle. Si belle, mais si rare aussi ! Alors que nombre de joueurs, même parmi les pros, ont du attendre plusieurs années avant d'enfin se faire prendre en photo avec le trophée, faisons un petit tour des veinards qui eux ont gagné dès leur première tentative.Chris Moneymaker (WSOP 2003)
A tout seigneur, tout honneur : avec son patronyme prédestiné, Chris Moneymaker est l'exemple ultime du joueur de poker ayant réussi son entrée sur le circuit pro. La victoire du comptable de Nashville, Tennessee sur le Main Event des WSOP 2003 face à 838 joueurs (un record à l'époque, qui n'allait qu'être battu année après année par la suite) a en partie fait entrer le poker dans son ère moderne, et est gravé dans le folklore du jeu : elle a fait le tour de la planète, mais... elle a bien failli ne jamais se produire ! Engagé sur un satellite online à 650 $ pour le Big One après avoir ship une qualif' prélilminaire à 89 $ - cette année-là était la première où l'on pouvait se qualifier en ligne pour les WSOP - Moneymaker s'est retrouvé à 4 joueurs restants avec un dilemme : terminer quatrième, et empocher tout de suite 8 000 $ en cash, ou choper l'un des 3 packages à 12 000 $ pour le Main Event. Décision difficile car Moneymaker était, de son propre aveu, un poil cagoulé sur le Net, et n'avait jamais disputé un vrai tournoi en live : partir à Vegas signifiait potentiellement recevoir une raclée de la part des pros, et repartir la queue entre les jambes et les poches vides. "A cette époque, je cumulais quelque chose comme 30 000 $ de pertes en ligne", expliquera t-il dix ans plus tard dans un formidable article anniversaire publié par Grantland. "Je m'étais inscrit avec mes derniers dollars. Arrivé à 4 joueurs restants, j'ai essayé de sauter, histoire de récuperer le cash plutôt que le ticket pour le Main Event." Un ami parviendra in extremis à le convaincre d'aller jusqu'au bout. Bien lui en a pris, car si Chris Moneymaker s'était contenté des dollars ce soir-là, il n'aurait probablement jamais eu l'occasion de, pêle-mêle : éliminer en succession quelques-uns des plus grands noms de l'époque (Johnny Chan, Humberto Brenes, Phil Ivey - aux portes de la finale !), de claquer des lectures de génie, (mais aussi de passer pour un noob), avant d'arriver en table finale avec un énorme chip-lead (devant les caméras d'ESPN qui, pour la première fois, retransmettaient le tournoi avec les hole cameras permettant de voir les cartes des joueurs) et, clou du spectacle digne de Rounders, passer un bluff invraisemblable face au pro old-school Sam Farha avant de le terrasser avec deux paires floppées, devenant ainsi le premier qualifié Internet de l'histoire à remporter le Main Event, et changeant passage la face de notre jeu préféré à tout jamais.Adrián Mateos Diaz (CNP770 Madrid 2012)
On dit souvent qu'un joueur gagnant est tout simplement un joueur ayant plus envie de gagner que les autres. Au moment de fêter ses 18 ans (le 1er juillet 2012 très précisément), Adrián Mateos Diaz avait déjà faim, très très faim. Cela faisait deux ans qu'il était tombé amoureux du Texas Hold'em, après être tombé sur une finale retransmise par la télé espagnole. Encore mineur, le lycéen a rongé son frein en fréquentant les clubs amateurs de San Martin de la Vega et en pompant toute la documentation qu'il pouvait dénicher sur le Net. « J’ai regardé toutes les vidéos, tous les articles que je pouvais trouver en ligne. Je ne pensais qu’à ça. J’avais déjà décidé que mon futur passerait par une activité où l’on était récompensé à la mesure du travail qu’on accomplissait. Le poker me semblait être la discipline idéale pour cela, et avant-même de jouer mon premier tournoi, je croyais déjà en mes chances. » Un instinct de compétiteur guère surprenant lorsque l'on sait qu'Adrián a passé son adolescence sur les terrains de tennis, battant régulièrement des adversaires plus expérimentés que lui. Sa majorité atteinte, il lui restera un petit détail à régler avant de pouvoir parcourir les trente kilomètres qui le séparent du casino de Madrid : le permis de conduire. Cette étape franchie, Adrián prend le volant et se jette dans le bain du cash-game en live. « Mes premiers trips à Madrid étaient incroyables », se souvient-il. « J’y allais, je gagnais. J’y retournais le week-end suivant, je gagnais encore. Et ainsi de suite. J’ai vraiment eu beaucoup de chance au début. » Un vendredi soir, celui qui est entre-temps entré à la fac annonce à ses camarades qu’il s’apprête à disputer son tout premier gros tournoi de poker, une épreuve à 600 € financée avec ses gains du mois écoulé. Trois jours plus tard, c’est en vainqueur qu’il revient à l’école : devançant plus de 300 joueurs, il vient de remporter 33 000 € ! La suite est maintenant connue de tous : nous sommes en octobre 2012 et Adrián vient de donner le coup d'envoi d'un des plus formidables runs de l'histoire du poker moderne, prouvant d'une part que la valeur n'attend pas le nombre des années, et surtout qu'il n'était pas une étoile filante. Six petites années plus tard, le palmarès d'Adrián Mateos Diaz donne le tournis : 17 millions de dollars de gains cumulés, 3 bracelets WSOP, 1 prestigieux titre EPT à Monte Carlo, des finales et victoires High Roller en pagaille, et la certitude d'inspirer la crainte chez tous les pros, même les plus accomplis. Le plus beau dans toute cette histoire : à ce jour, celui que ses coéquipiers du Team Winamax surnomment la máquina n'affiche encore que 24 ans au compteur...Shurane Vijayaram (Aussie Millions 2017)
"Oublie que t'as aucune chance, vas-y, fonce. On sait jamais, sur un malentendu ça peut marcher", a dit un jour un grand philosophe célibataire en combinaison de ski. Rien ne prédestinait Shurane Vijayaram à remporter le tournoi de poker le plus prestigieux de l'hémisphère sud. Son truc, c'est plutôt le cash-game. Et encore, plutôt du côté des tables low-stakes à 1$/2$ des pubs de Melbourne que du Big Game du Bellagio. Mais en arrivant au Crowne Casino en janvier 2017, le regard de l'australien a été attiré par un satellite à 130 $ qui venait de débuter. Il n'avait jamais disputé le moindre tournoi de qualif' de sa vie, mais pourquoi pas ? Cette impulsion random allait se réveler être au final un move de génie : engagé pour la première fois dans une épreuve à 10 000 $, faisant face à une brochette des plus gros pros de la planète, Shurane s'est surpris à se retrouver parfaitement à l'aise, montant un stack, se faisant payer ses bonnes mains, passant sans forcer de beaux bluffs, pour six jours plus tard soulever le trophée après un hero call final digne des plus beaux moments de Davidi Kitai. "Je ne m'attendais pas à grand chose sur ce tournoi", réagira t-il à chaud après sa victoire inespérée. "Je voulais juste jouer un bon poker. À la bulle, je me disais 'bon, un min-cash ça serait déjà très bien.'" Au bout du compte, ce min-cash s'est transformé en une première ligne Hendon Mob à 1,6 million de dollars australiens, soit 1 200 fois son investissement de départ... Parfois, il faut écouter la petite voix intérieur qui nous dit d'y aller.Valentin Messina (France Poker Tour 2010)
Au moment de tendre 1 000 € en espèces aux guichetiers de l'Aviation Club de France en ce samedi 16 janvier 2010, validant ainsi son inscription pour la finale du France Poker Tour (un circuit amateur sponsorisé par Winamax dont la conclusion se jouait dans le plus prestigieux cercle parisien de l'époque), Valentin Messina était plongé dans une intense réflexion : devait-il faire le grand saut vers le poker professionnel ? Cela faisait un peu plus de deux ans que l'ingénieur passait le plus clair de son temps libre à arrondir ses fins de mois sur les tables online, collectant au passage quelques succès de choix, tout en dispensant ses conseils sur le site de coaching PokerAcadémie. Forcément, il y avait de quoi gamberger. Quatre journées et quatre nuits de compétition plus tard, Valentin avait la réponse à sa question : au terme d'une table finale rassemblant une belle brochette de pointures (la Team Pro et Grand Maître aux échecs Almira Skripchenko, le high-stakeur Jérôme Zerbib, l'excellent amateur Julien Huber) et d'un épique et interminable heads-up contre le légendaire pro américain Fred Deeb, le voilà qui soulevait l'imposant trophée. Au guichet de l'ACF l'attendait un magot de 131 780 € : sa carrière de pro était lancée, et allait l'amener, entre autres, à terminer runner-up d'un gros EPT face au compatriote Jean Montury (Malte, 2015) et disputer les demi-finales du Main Event des WSOP (15e en 2017).Cyril Georges (Winamax Poker Tour 2016)
Avant de déménager (momentanément ?) en ligne, le Winamax Poker Tour a permis à des dizaines de milliers de joueurs amateurs de toute la France de disputer en freeroll de beaux et gros tournois de poker organisés dans de beaux écrins (Grande Halle de la Villette, Stade Vélodrome, Château de Blois...) et dans des conditions professionnelles, en compagnie de WIP et de membres du Team Pro. L'objectif était de faire passer à tous un bon moment de poker... et aussi, pourquoi pas, de décrocher un ticket pour la Grande Finale au Cercle Clichy-Montmartre. Au cours de ses sept années d'existence, le WiPT a fait naître nombre de belles histoires. L'une des plus mémorables est celle de Cyril Georges. Engagé comme 600 autres joueurs sur le freeroll organisé à Nancy après avoir franchi les étapes de qualification sur Winamax, l'étudiant de 20 ans en est ressorti tout heureux avec en poche le ticket à 550 € pour la Grande Finale. "C'est énorme pour moi qui suis déjà content quand je gagne 15 € habituellement", réagit-il sur le forum du ClubPoker. Il ne savait pas encore ce qui l'attendait au "CCM", et surtout, il ne savait pas encore qu'il allait se réveler parfaitement à la hauteur de l'enjeu, naviguant avec flegme et sérénité à travers les quatre journées de la Grande Finale de la saison 2016/2017, plaçant quelques bluffs et hero calls d'anthologie, pour finir par triompher sans complexe d'une finale remplie de joueurs amateurs comme lui, sous les applaudissements de sa famille et de ses potes scotchés au streaming.Calme et réfléchi à la table de poker, Cyril l'est aussi dans la vie : cette victoire sur notre circuit ne lui a nullement fait tourner la tête. Aucune folie des grandeurs pour notre vainqueur, qui est directement retourné à ses études après avoir empoché la fameuse épée et le chèque de 103 500 € acquis face à 1 388 joueurs : cette première ligne Hendon Mob de choix est aussi, à ce jour, la dernière, et Cyril n'a retrouvé le chemin du live qu'une seule fois depuis son sacre - c'était pour défendre son titre lors de l'étape de Strasbourg fin 2017, alors qu'il venait de terminer ses études d'ingénieur. Depuis, Cyril est rentré dans la vie active, et en a profité pour s'expatrier. "Cela fait cinq mois que je suis installé à Hambourg", nous confirme t-il par téléphone. "Je bénéficie d'un VIE, un dispositif d'emploi pour les jeunes à l'étranger. Je travaille pour une entreprise d'aéronautique, je m'occupe de la supply chain." Supply chain ? "C'est la gestion du parcours de fabrication d'un produit, depuis la fabrication des toutes premières pièces dont le constructeur a besoin, jusqu'à la livraison du produit fini à l'acheteur. Dans mon cas, le produit est un avion." Et ça se passe bien ? "La ville est très sympa. Même si je ne parle pas encore l'allemand, tout va bien ! Partir à l'étranger, cela correspondait à mes envies du moment." Pas de retour aux tables prévu à l'horizon pour le moment, donc, mais Cyril garde tout de même une petite place pour le poker. "L'an dernier, mon équipe KING5 était dans les 50 dernières, et cette année, on s'est qualifiés assez vite pour le Stade 2 !" C'est noté, Cyril : rendez-vous à Vegas, peut-être ?
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