Team Pro Experience : Sam, du rêve à la réalité
Par dans Général
Il y a trois ans, il vendait sa console pour se consacrer au poker. Dans quelques semaines, il jouera le plus grand tournoi du monde aux côtés du Team Winamax. Rencontre avec un jeune grinder plein d'ambition.
Montpellier, jeudi 20 mars 2025, 2 heures 11 du matin. La dernière main de la Team Pro Experience 2025 vient de se jouer. Dans sa chambre, seul face à son écran, un grinder montpelliérain de 28 ans reste debout, comme figé, sans vraiment réaliser qu'il vient de sécuriser un voyage pour les World Series Of Poker. Vainqueur du challenge au milieu de milliers d'autres prétendants, son investissement de 5 € s'est transformé en un package d'une valeur de plus de 23 000 €. Lui qui n'a, pour seule expérience en live, qu'une récente participation à la Grande Finale du Winamax Tour, peut désormais se projeter à Las Vegas, où il disputera le plus grand tournoi du monde en compagnie des membres du Team Winamax.
Au téléphone, quelques jours après cette soirée irréelle, Sam Jakubowicz a encore du mal à maîtriser ses émotions. "Je me suis levé de mon siège, euphorique, incapable d’y croire réellement, se souvient-il. D'autant que je me voyais perdre, honnêtement. Et je savais que je serais dégoûté si ça arrivait en table finale. Alors quand j’ai gagné, c’était juste… ouf ! Une sensation indescriptible."
C'est évident : cette victoire marque un réel tournant dans la carrière du jeune grinder, passé pro quelques mois plus tôt. Avant de s'y mettre sérieusement, Sam a vécu une histoire en dents de scie avec le poker, faites d'allers-retours et de faux départs. Le premier dépôt sur Winamax remonte à ses 18 ans. À ce moment, il connaissait déjà les bases du jeu, la mallette de jetons de papa, les parties en play money avec grand-mère. Cette première tentative tournera court. "Je n'étais pas bon, et je n'y comprenais pas grand-chose. J'ai vite arrêté !"
À l’époque, Sam cherche encore sa voie. Après avoir suivi un BTS audiovisuel option montage, il enchaîne avec une prépa artistique pour tenter d’intégrer une école de game design. Mais les études ne lui parlent pas. Il décroche, bifurque, et enchaîne les petits boulots : serveur, vendeur, photographe pour touristes, animateur dans un escape game. L’idée, c’est de rester à flot. Le poker, lui, reste en arrière-plan.
Jusqu’au jour où Sam décide de retenter sa chance sur Winamax, six ans après son premier essai. "Je dépose 20 €... et je perds tout en quelques tournois." Là encore, sans vraiment comprendre pourquoi. Sauf que cette fois, Sam a envie d'enquêter, de savoir. Par chance, parmi ses amis figure un joueur online confirmé. C'est le déclic... au point de le pousser à une décision radicale. "À partir du moment où j'ai commencé à comprendre mes erreurs, j’ai carrément vendu ma Switch, pour repartir avec une bankroll de 100 €."
Cette fois, ça y est : le poker, c'est du sérieux. Et l'envie de bien faire est réelle. Sam passe en mode apprentissage : vidéos, théorie, schémas de range, il ponce tout et écoute, pose des questions, démonte ses certitudes. Et surtout, il joue. Beaucoup. "Je grindais presque tous les jours.” Pas pour l’argent, en tout cas pas tout de suite, mais surtout pour apprendre. Pour voir si ça pouvait marcher.
Et petit à petit, ça fonctionne. Le jeu devient plus clair, les décisions plus naturelles. La bankroll grimpe, la confiance aussi. Il commence petit. Puis enchaîne. Des tournois à 2 €, puis 5, 10, 20 €. Jusqu’à 50 € quand le spot est bon. “Je préfère construire sur des bases solides.”
Solide, c’est exactement ce qu’il devient. Pas encore une star, mais un reg fiable des low et mid stakes. Appliqué, régulier, conscient de ses forces... et donc : prêt pour une première vraie perf' ? C'est un fait : deux ans et demi après s'y être mis sérieusement, cette victoire sur la Team Pro Expérience représente un premier sommet en carrière.
Tout avait bien démarré : un Day 1 maîtrisé, le ticket pour la Finale sécurisé, parmi 934 autres qualifiés. Mais la suite se complique. À 120 joueurs restants en finale, Sam touche le fond. Sept blindes. “Je me voyais déjà sauter.” Et puis : un 30/70 qui tient, le momentum revient. Sam grimpe, reprend le lead, et se faufile jusqu'en table finale. “J’étais stressé, mais je savais que je pouvais aller au bout si je gardais la tête froide.” Le heads-up est tendu, les tapis profonds, mais Sam reste calme. Une dernière main. Un dernier call... et tout bascule. Le rêve n'est plus une chimère. Il a maintenant un nom : Las Vegas.
"Rêver, c'est bien. Rêver plus grand, c'est encore mieux..."
Cet été, Sam n’ira pas à Sin City pour faire de la figuration ou jouer les observateurs. Le jeune pro compte bien jouer sa carte à fond. Et n'hésite pas à poser un objectf chiffré. “Je vise les 50 000 € de profit. Si je deep run plusieurs tournois, ça peut le faire. Rien que d’en claquer un, ce serait énorme !”
Qu'on se rassure : notre vainqueur garde les pieds sur terre. Il sait que le poker reste le poker. Et que revenir bredouille ne serait pas un échec. “Même sans un euro, ce ne sera que du positif. Une expérience incroyable.” Alors, il se prépare sérieusement. Parce que le live reste un terrain nouveau. La fatigue, les journées à rallonge, la lecture des tells… “À la Grande Finale du WiPT, j’ai vu ce qu'est le live. C’était génial, mais j’ai fait trop d’erreurs. J’étais mort de fatigue. Et le field était bien plus relevé que ce que j’imaginais.”
Alors cette fois, il veut arriver prêt. Parce que Vegas, ce n’est pas une fin en soi. C’est peut-être un début. Celui d’une vraie carrière. “Je pensais aller aux WSOP dans quelques années. Mais si tout se passe bien cet été, ça peut m’ouvrir des portes. Donner un coup de pouce à mon projet d'en vivre. Pour ça, je vais essayer de m'inspirer d'Adrián Mateos, c'est le meilleur."
Et dans un coin de sa tête, il y a déjà la suite. Plus loin que Vegas. Plus loin que les WSOP. “Vous allez peut-être me prendre pour un fou, mais mon plus grand rêve, ce sont les Tritons. Rêver, c’est bien. Rêver plus grand, c’est encore mieux..."
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