Space KO : les coulisses d'un succès
dansDepuis son lancement il y a quatre mois, la fusée Space KO n'en finit plus d'orbiter. Deux ingénieurs de Winamax nous racontent ses secrets de fabrication.
Lors des derniers jours de 2024, le format Space KO débarquait sans crier gare sur les tables de Winamax. Seulement quatre mois ont passé, mais cette nouvelle façon de jouer en tournoi fait déjà partie des meubles. Si elle a provoqué nombre de critiques et de débats (c'est toujours comme ça avec la nouveauté), son succès ne se dément pas. Le lobby MTT de Winamax n'a jamais été aussi peuplé qu'en ce début de printemps, et les deux plus gros tournois de la saison, le 3 Million Event des Series et le WSOP-C online, ont été joués dans ce format. En interne, c'est une satisfaction pour tous ceux qui ont œuvré au projet dans l'ombre. À commencer par nos ingénieurs, qui ont dû résoudre pas mal de défis pour contribuer à révolutionner vos sessions.Tiens, si on allait discuter avec les « devs », ceux qui d'ordinaire restent tapis dans l'ombre de vos tables, toujours en train de bricoler sous le capot ?
Vite fait, bien fait... et en petit comité
Benoît est ingénieur “études et développement” au sein de l’équipe Poker Games Services. Florian est “lead développeur” dans l’équipe Poker Clients. Le premier truc qui surprend, en discutant avec eux, est de constater que la grosse fusée Space KO n'a pas nécessité une armée entière d'ingénieurs pour être construite. Si l'on se concentre purement sur l'aspect technique (et donc qu'on fait abstraction du cerveau des concepteurs du format, de la patte artistique des graphistes, etc), un total de « deux développeurs et demie » ont été réquisitionnés du côté de l'équipe de Florian pour gérer l'animation de l'ouverture du Token et repenser l'affichage à la table - le "et demie", c'est parce qu'il a bossé sur d'autres trucs en parallèle. Pendant ce temps, c’est en solo que Benoît a programmé les règles du jeu spécifiques au Space KO. « Un collègue était là pour vérifier le code, et un troisième me 'challengait', c'est-à-dire me remettait en question sur mes choix », précise-t-il.
Et il a demandé beaucoup de temps, ce travail ? Là encore, la réponse nous paraît short : trois mois pour boucler l'affaire. En vrai, on ne devrait pas être surpris. Il y a dix ans, une autre révolution signée Winamax était sortie de nos bureaux en un temps record : moins de cent jours avaient suffi, déjà, pour faire sortir l'Expresso de nos bureaux, en impliquant là aussi un tout petit commando.
Du neuf avec du vieux
Winamax développe ses propres logiciels de poker depuis 2008. La première version proposée au public remonte à l'été 2010, au moment où s'est faite la bascule entre le « point com » et le marché régulé du « point fr ». Bref, cela ne date pas d'hier... alors, vous vous en douterez : en quinze ans, plusieurs générations de développeurs se sont succédé au sein de la boîte. En conséquence, un développeur travaillant en 2025 doit savoir composer avec ce qu’on appelle le “code legacy” : l’héritage technique de toutes ces années de développement ininterrompu.
« En termes de règles du jeu, le Space KO est grosso modo du KO progressif avec une étape d'aléatoire supplémentaire », explique Benoît. « Je me suis donc basé sur le code déjà programmé pour le KO progressif. » Un code ancien, puisque les premiers tournois KO sur Winamax remontent à plus de dix ans, bien avant son arrivée chez Winamax... « Ce code manquait de ce qu'on appelle la 'modularité'. » La modularité : un concept qui décrit le fait de découper la fabrication d'un produit en différentes sections indépendantes, afin de permettre plus de flexibilité pour ajouter ou retirer des fonctionnalités ultérieurement. « Sur l'Expresso, par exemple, on fait régulièrement de nouvelles opés [Monopoly, Koh Lanta, Lingots, etc], donc on est bien rodés, on sait où coder, c'est plus simple. Avec le Space KO, il a fallu reprendre beaucoup de choses, partir des KO progressifs et s'y intégrer... mais sans tout casser ! »
Du côté visible par les joueurs, le défi technique fut différent, mais pas moins difficile, avec la programmation d'une toute nouvelle animation : l'ouverture du Token, qui s'affiche à l'écran à chaque élimination. « On n'avait jamais conçu une animation aussi longue et prenant autant de place », explique Florian. « Il y avait un vrai enjeu de performance, il ne fallait pas que cela ne devienne trop gourmand pour l'ordinateur ou le téléphone du joueur. »
Chez Winamax, on accroche aux murs nos plus beaux caleçons shorts des clubs de Ligue 1 portant notre logo
À l'écoute de la communauté
Chez Winamax, on trouve des joueurs de poker confirmés dans chaque département, ou presque... Les étagères du support sont garnies de “winner pictures” encadrées et de trophées. Certains collègues du marketing ont atteint de très beaux statuts VIP sur les sites concurrents. Et je ne défierais pas en heads-up les mecs de la sécurité, ceux qui passent leurs journées à traquer la collusion et les bots.
Chez nos ingénieurs, il y a peut-être un peu moins de top regs qu’aux autres étages… mais c’est certain : ils passent autant de temps que le reste de la boîte sur les forums et les streams. « ClubPoker, ce sont nos meilleurs testeurs ! » confirme Florian. « Ils ne sont pas tendres, parfois. Mais c'est le jeu. Leurs retours nous permettent de nous améliorer et nous remettre en question. » La communauté est très réactive, chose à laquelle nos programmeurs ne sont pas forcément habitués. « Je n'avais jamais bossé pour une boîte où, le soir de la sortie d'une nouveauté, ton produit a déjà été testé par tout le monde, et où tu peux tout de suite consulter des dizaines de pages d'avis, et regarder un Twitch comme celui de zChance, avec des milliers de viewers dans le chat qui réagissent ! »
L'algorithme, éternelle source de fantasmes
Puisque nos développeurs se tiennent quotidiennement au courant de ce qui se dit au sein de la communauté, l'occasion est trop belle pour ne pas leur demander leur point de vue sur les sempiternelles théories complotistes à propos de l'algorithme des sites de poker en ligne – elles sont aussi vieilles que le poker en ligne lui-même.
« Pour le Space KO, j'ai dû expliquer à la sécurité le code que j'avais programmé, dans les moindres détails, nous explique Benoît. Et ensuite, la sécurité a soumis ce code à l'ANJ [Autorité Nationale des Jeux] pour audit et validation. »
« Sans cette validation, le Space KO ne peut pas sortir. », rebondit Florian. « Pour tout te dire, à la fin, on a voulu faire une toute petite modification au code, qui concernait la répartition des gains et des probabilités, après la validation de l'ANJ. Mais on a laissé tomber. Car on aurait dû reprendre à zéro le process de validation ! » En résumé, à chaque instant nos développeurs sont tenus de travailler en toute transparence vis-à-vis des autorités.
Les audits de l'ANJ sont réguliers, donc. Mais en plus de ça, quand ce n'est pas le régulateur qui contrôle Winamax, c’est Winamax qui fait ses propres contrôles de routine. « Des tests sont régulièrement pratiqués sur notre algorithme », poursuit Benoît. Le test du khi-deux, bien connu de tous les matheux, permet par exemple de vérifier que la distribution des cartes respecte le principe de l’aléatoire. C'est pour ça que, lorsqu'on relaie à un de nos devs ces éternelles théories du complot, ils soupirent… et sourient en même temps : si manipulation et truquage il y avait, on ferait bien vite de le remarquer, que ce soit en interne chez Wina, ou en dehors via l'ANJ.
Nos ingénieurs travaillent la plupart du temps dans l'ombre... mais lorsqu'ils se présentent dans des conférences pro, leur stand est littéralement pris d'assaut ! Exemple la semaine dernière lors du Devoxx Paris
Des délais difficiles à tenir ?
Lorsque le concept du Space KO a été validé à la fin de l'été 2024, un impératif était très clair : il fallait absolument que le produit soit prêt pour les Series de janvier 2025. « Trois mois, c'est plutôt long pour un projet, par rapport à ce qu'on fait d'habitude », estime Florian. Ce qui ne veut pas dire que le Space KO s'est développé tranquillement et dans la sérénité. Car chez Winamax, les nouvelles idées fusent en permanence. Et donc, le cahier des charges est bousculé en permanence. De quoi donner le tournis à ceux chargés de mettre en application les trouvailles des concepteurs. Benoît : « Les deux premiers mois, ça allait : on arrivait à rajouter des fonctionnalités ou changer des choses en fonction de ce qu'on nous demandait. Mais il y a eu un moment où on a dit : 'Là, ça va commencer à faire court... »
Même son de cloche chez Florian. « On a beaucoup tâtonné sur l'affichage, il y a eu beaucoup de versions différentes. » Y compris sur la toute dernière ligne droite, après ce qui était censé être un dernier test public, via un Space KO programmé en catimini dans la grille matinale en milieu de semaine. « La première version de la fenêtre qui s'affiche à table pour donner les infos sur les Tokens, elle n'allait pas. Les retours des joueurs étaient unanimes : 'on ne comprend rien !' » Il a fallu tout refaire en speed, à quelques jours de la deadline.
Pas trop stressant, de bosser ainsi ? La réactivité de Winamax est appréciée des joueurs, mais comment la vit-on en interne ? « La clé, c'est ne pas transmettre le stress aux développeurs, estime Florian. Car le stress, ça fait commettre des erreurs. S'il y a du retard sur un projet, ce n'est pas grave : on sait qu'ils sont talentueux, et vont parvenir à rattraper. »
Certes, on le concède en interne, le projet Space KO fut « tendu du début à la fin. Mais c'est cyclique, ce n'est pas comme ça sur tous les projets. Celui-là était important. En réunion, j'ai entendu 'Si au final on ne sortait qu'une seule nouveauté cette année, ça devait être celle-là. » Et qu’ont-ils entendu, nos développeurs, après la sortie du Space KO ? « On nous a dit que c'est le produit le plus abouti jamais sorti par Winamax. » Un sacré gage de reconnaissance pour nos équipes, après avoir bouclé un projet que certains considèrent comme la première vraie révolution dans le monde du poker en ligne depuis le lancement de l'Expresso...
Les pages à suivre