Le rêve Américain
Par Tournois Live
dansIl ne reste que quelques jours avant le grand départ, cet envol d’une douzaine d’heures qui nous sépare d’un doux rêve. Las Vegas, un endroit mythique où, pour moi joueur de poker professionnel mais surtout grand passionné de ce jeu, il me tarde chaque année de retourner.
En fait non c'est même plus que ça. Il ne se passe plus une seule journée sans que j’imagine les premières sensations du toucher de jetons, de la vue incroyable sur les centaines de table de l’Amazon Room.
Je me souviens quand j’ai découvert le poker il y a sept ou huit ans, je passais tellement d’heures à regarder un maximum de vidéos sur Internet et notamment celles des épisodes du Main Event, ce tournoi si particulier qui résume à lui tout seul le titre de ce blog. Pour l’anecdote, à cette époque je commençais seulement les petites parties privées à 5 euros mais j’affirmais déjà à mon acolyte Matthias - pour ne pas le nommer - qu’un jour je participerai à ce tournoi a 10 000 dollars l’entrée ! Ce n’était même pas une envie ou une croyance, juste une certitude.
Je n’avais aucun doute, c’était comme un but à atteindre pour moi. Même si j’avais bien conscience du monde qui séparait ma petite partie poitevine du Main Event de Las Vegas.
Prêt au combat
Aujourd’hui je me retrouve à écrire ces mots pour vous transmettre cette petite histoire alors que je m’apprête dans quelques jours à prendre part pour la troisième fois consécutive aux Championnats du Monde et pour la seconde fois à ce tournoi mythique et sa garantie exceptionnelle de 10 millions de dollars au vainqueur.
Certains le savent ou s’en souviennent peut-être mais, l’an dernier, j’avais eu l’immense plaisir de pouvoir aller à Las Vegas accompagné de mes quatre amis de Poitiers, grâce à notre victoire sur le KING5 de Winamax. Une compétition tout à fait incroyable humainement, qui permet chaque année à plusieurs groupes d’amis de gagner des packages live, notamment pour Dublin et Las Vegas, en partant de tournois entièrement gratuits.
C’est donc avec une petite pointe de nostalgie teintée toutefois d’un souvenir violent que je vais vous raconter mon Main Event 2014. Le premier moment important c’est celui on l’on se retrouve au guichet pour prendre son siège. J’avais décidé de faire ça plusieurs jours à l’avance. C’est donc en toute détente que je m’efforce de cacher ma petite émotion au moment de tenir ce ticket dans ma main et de réaliser que je suis à quelques jours d'un vrai rêve.
Nous sommes à la veille du tournoi et j’ai du mal à trouver le sommeil. Je fais des dizaines de scénarii plausibles dans ma tête puis je m’écroule de fatigue… pour quelques heures seulement. Le réveil sonne et je me sens prêt au combat. J’ai pris un maximum d’informations possibles, de conseils à droite à gauche, etc.
J’ai décidé d’y aller seul cette fois. C’est le grand soir, je ne me sens pas comme d’habitude avant un tournoi de poker, l’atmosphère est extrêmement excitante pour moi.
Le Day 1 idéal
Shuffle up and Deal ! Ca y est, c’est parti. Tapis de 30,000, rounds de deux heures, de quoi prendre bien son temps et encore une fois profiter de la chance d’être assis à l’une des centaines de tables du Rio, en lice sur le plus gros tournoi du monde.
Les sensations sont bonnes et je m’apprête à réaliser le Day 1 idéal. Je finis la journée avec 65,000 en ayant eu que très peu de bonnes cartes, mais en réussissant à gagner la grande majorité des mains dans lesquelles je suis rentré. Je n’ai jamais mis en danger mon stack et j’ai eu un très bon taux de bonnes décisions. De quoi entrevoir la suite du tournoi dans les meilleures conditions.
Je vous passe les détails sur ma journée de farniente du lendemain entre repos, piscine, restaurant et rires entres amis. On était complètement au top comme j’ai l’habitude de dire !
Nous voilà donc au day 2. Je me sens à l’aise à ma table mais le départ n’est pas celui espéré. Je perds les premiers pots important. Down à 40,000 mais pas encore de grosses inquiétudes. J’ai un gros mental et je vais me battre !
Après un changement de table j’arrive sur une table ou je retrouve pour la première fois un top player reconnu : Steve O’Dwyer. Tout va néanmoins parfaitement se dérouler et j’ai la chance de recevoir des flops très favorables. Je réussis à monter à plus de 100,000 avec un bon stack imposant comme je les aime ! Le tapis moyen est environ de 65,000 et nous sommes au deux tiers du Day 2.
Je suis vraiment fier pour le moment de ma façon de jouer et je suis en plein dans une phase d’ascension au niveau de mon stack. Je ne perds presque pas un coup dans lequel je m’implique vraiment. Psychologiquement et émotionnellement tous les voyants sont au vert. Quand vient cette main.
A History of Violence
Un premier joueur ouvre en début de parole à 2,500 sur des blinds à 400/800. Un joueur en MP paie et je découvre AK de small blind. Une très très bonne main dans ma range surtout avec mon profil de joueur très actif à la table préflop. Je décide de squeeze a 7,700. L’initial raiser se saisit très vite de ses gros jetons et envoie un bon gros 4bet a 20,000 tout rond. Le joueur en MP passe assez vite et la parole me revient.
Nous avons le même stack tous les deux au début du coup. Je prends une bonne minute pour réfléchir à toutes les options possibles sans pour autant envisager un fold. Je décide donc de payer cette mise et de réévaluer sur le flop tout en me disant bien que si je touche une de mes deux cartes ce sera très très difficile de fold.
Dans ma tête je vous jure que c’est vrai et c’est assez honteux de le dire, j’espérais presque un flop 8-4-2 pour pouvoir check fold gentiment et passer au coup suivant. J’exagère mais pas tant que ça ! Mais le flop en décide autrement et dévoile K42. Je check et mon adversaire envoie très vite 30,000 dans les 45,000 (environ) que contient le pot.
Je vais vous faire la version courte pour la fin. J’ai réfléchi trente bonnes secondes, j’ai pris un grand bol d’air et j’ai annoncé tapis. Il a fait une petite moue, donc le temps d’une seconde j’étais plutôt bien. Puis il a call en retournant deux gros As.
La suite c’est une histoire très violente, un sentiment vraiment très particulier que je ne m’attendais pas du tout à ressentir après un bust sur un tournoi de poker. Cette solitude, ce nuage dans les yeux, cette boule au ventre, cette chaleur de partout. On monte dans un taxi, on rentre dans sa petite chambre d’hôtel et on verse des larmes...