Winamax

La panoplie du joueur de MTT

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J’ai décidé de partager avec vous quelques-unes des clés de mon succès en MTT sur Winamax. Je me suis remis intensément aux tournois aux alentours de mars 2013, soit il y a presque un an, après une mauvaise période en cash-game. En préparation de mon défi « Ultimate Grinder » d’avril 2013, j’ai commencé à faire des sessions de multitabling massif pendant lesquelles je jouais quasiment tous les tournois du site le dimanche. Lors du premier jour de mon défi, alors que les Winamax Series battaient leur plein, j’ai joué près de 90 tournois en une journée et eu la chance de remporter un Event des W.Series le soir même.

J’ai depuis affiné ma préparation et ma méthode pour les sessions dominicales. Et les résultats ont suivi ! Voici mon graphique Sharkscope : ma reprise des MTT commence peu avant le 1500e tournoi. Mon ROI (Return On Investment) global est de 66% pour 94 000 euros de profits : c’est évidemment satisfaisant mais que je pense pouvoir encore m’améliorer.

J’ai déjà parlé de cette approche à plusieurs reprises, notamment dans ce blog. Cependant, des questions et remarques reviennent en permanence :
« Mais comment tu fais pour savoir comment jouent les autres? »
« Tu ne peux pas connaitre les dynamiques à table ! »
« Toutes ces tables, ça doit donner mal à la tête et tu dois missclick tout le temps ! »
Etc.

Ces questions soulèvent des obstacles légitimes mais aucune n’est sans réponse ni solution.

Voici, sans ordre particulier, cinq raisons qui expliquent ces résultats plutôt positifs :

1) L’organisation de ma session

J’ai un rituel quasiment immuable qui me permet de démarrer dans de bonnes conditions :

  • Chaque dimanche, je me lève avec la faim au ventre !  Je ne joue qu’occasionnellement en semaine pour éviter de me burn out.
  • Je me lève vers midi, déjeune léger et sors faire une balade dans Londres, souvent avec des amis, pour m’aérer la tête et refaire le plein de vitamine D (autant que possible dans la grisaille londonienne) avant de m’enfermer chez moi pendant plusieurs heures de grind.
  • J’ai des heures préférentielles pour le démarrage de ma session et connais déjà mon programme : je commence à 15, 17 où 19 heures (16, 18 et 20 heures en France). Je m’assois devant mon PC une petite demi-heure avant le départ. Je ne lance aucune table et me contente de m’inscrire aux tournois qui vont commencer plus tard. .
  • Je pense qu’il est important d’investir dans du bon matériel pour ces sessions « marathon » : j’ai un ordinateur de bonne facture que je change tous les trois ou quatre ans et deux écrans 30 pouces qui me permettent de jouer confortablement en mosaïque pendant la majorité de la session. J’ai également investi dans une bonne chaise de bureau qui tourne sur son axe, afin de pouvoir ajuster ma position à loisir et faire face aux écrans sans avoir nécessairement à tourner la tête.
  • Je prépare une playlist musicale, des petits trucs á grignoter et de l’eau, pour éviter de me sentir gêné pendant la session et d’avoir à me lever. Concernant la musique, je pense qu’il est important d’écouter quelque chose qu’on aime, quelque chose qui nous donne envie de chanter ou de fredonner, idéalement un son rythmé, entrainant ou mélodieux. La musique adoucit les mœurs et limite le tilt ! Cela dépend évidemment des goûts de chacun. J’écoute souvent de l’électro, du rock, parfois du hip-hop. Bien que grand fan de jazz et de classique, j’évite ces styles musicaux car leur grande complexité nécessite de l’attention pour les apprécier réellement et ils peuvent finir par sonner comme du bruit de fond. Je coupe ma playlist au moment du démarrage du Multiplex Poker, que j’écoute dans son intégralité. La radio de Winamax joue un rôle important dans mes sessions : elle me motive et me fait rire, que des émotions positives !
  • Je ferme mon navigateur internet (très important !) mais laisse Skype tourner pour pouvoir suivre le reste du Team durant leur session. Je pense qu’il est primordial de ne pas se sentir totalement « seul » quand on joue au poker en ligne, de savoir qu’on sera soutenu dans le rail en cas de deep run intéressant, et de partager le frisson et l’excitation de celui d’un pote. Toutes ces émotions contribuent à limiter le tilt et l’ennui.
  • Il est temps de commencer á jouer ! Pendant le break lié à la fin de l’heure en cours, je m’inscris tardivement à tous les tournois intéressants des deux heures précédentes ainsi qu’à plusieurs satellites, ce qui me permet de commencer ma session avec 7 à 8 tables. Dont certaines avec assez peu de profondeur et donc la nécessité d’être attentif tout de suite.
  • Au fur et à mesure de la journée, j’organise mes tables de la façon suivante :
  1. Sur l’écran de gauche, les tournois réguliers les plus importants : High Roller, Grand Tournoi, Satellite EPT, XTREM, XTASE, XPERT, Main Event etc. J’essaie de rester à 6 tables en mosaïque afin d’avoir la meilleure visibilité possible.
  2. Sur l’écran de droite, j’insère tout le reste, avec une section à part pour les satellites (qui nécessitent une attention particulière).
  3. Si un tournoi à droite commence à être intéressant (approche de la bulle par exemple), j’échange sa place sur l’écran de gauche avec celle d’un tournoi moins avancé.
  • Pour éviter d’être déconcentré et tirer le meilleur parti du logiciel, j’optimise les options du mon client Winamax :

2) Le Tracker

Cela fait maintenant près de dix ans que nous sommes entrés dans une phase « scientifique » du développement du poker. Les outils d’analyse sont un prérequis vital pour tout joueur sérieux qui se respecte. Il est indispensable d’utiliser un tracker quand on multitable beaucoup. J’utilise Hold’em Manager 2 depuis sa sortie et j’en suis globalement satisfait (même si je pense que je préférais la première version du point de vue interface).

Si vous ignorez à quoi un tracker est utile, celui-ci permet d’afficher des statistiques de jeu en surimpression par-dessus chaque table. Je prends la grande majorité de mes décisions grâce à ces informations. Leur emploi est loin d’être évident car :

  • Cela nécessite beaucoup d’expérience pour interpréter les chiffres correctement et permettre d’estimer en quelques secondes à peine les ranges adverses (et donc des % de fold equity, bluff et value dans le spot en cours, qui, rapportés à la cote du pot, me permettent d’en déduire les actions ev+ à accomplir)
  • Il y a de nombreux pièges d’interprétation : par exemple, un joueur peut être très loose preflop mais ne jamais bluffer à la rivière. Un joueur peut être très serré préflop mais faire tout de même des resteals agressifs. C’est pour cela que le tracker ne remplacera jamais l’observation pure et simple de ce qui se passe à table.
  • Le nombre de mains jouées contre un adversaire en particulier est le facteur le plus important pour savoir si les informations sont crédibles. Un joueur qui joue 8 de ses 15 premières mains n’est pas forcément un maniaque, il a peut-être simplement bénéficié d’un bon run de cartes. J’estime que les statistiques commencent à être fiables à partir d’une centaine de mains et le deviennent encore plus après quelques milliers. Mais elles n’expliquent certainement pas tout : elles permettent au mieux de se faire une idée moyenne du style de jeu adverse.

Un tracker est hautement configurable. Voici les infos que je décide d’afficher en ce moment :

La première ligne donne des informations de base et de fiabilité :
- le nom du joueur
- le total de mains jouées contre lui (ce qui permet de définir la fiabilité des statistiques suivantes)
La deuxième ligne donne des informations sur l’agressivité du joueur :
- Le VPIP total : quel pourcentage de mains le joueur joue-t-il volontairement préflop ?
- le PFR : dans quel pourcentage de mains le joueur est-il le relanceur initial ?
- Le % de 3bet, de 4bet et de C-bet effectués par le joueur
La troisième ligne donne des informations sur la combattivité du joueur :
- Fold to 3bet : ce joueur va-t-il contre-attaquer souvent s’il se fait sur-relancer avant le flop?
- BB fold to steal : ce joueur défend-il souvent sa grosse blinde?
- Et enfin, Fold Fold to CB : ce joueur passe-t-il souvent sur une mise de continuation ?

Comme il est possible d’attribuer des codes couleurs aux chiffres en fonction de leur valeur, on peut ainsi se faire une idée extrêmement rapide et intuitive du style de jeu adverse. Si vous pensez que j’utilise ces chiffres en faisant des calculs tout le temps, détrompez-vous ! Cela me prendrait bien trop de temps et d’énergie. J’utilise le tracker pour brosser un portrait rapide et concis du problème que j’ai à résoudre. L’expérience fait le reste et le jeu se déroule de manière bien plus intuitive.

Mais il est aussi possible, lors de cas particulièrement tendus, d’aller chercher des informations bien plus précises, comme par exemple des pourcentages relatifs à la position. Un joueur peut par exemple avoir un faible pourcentage de 3-bet dans toutes les positions excepté depuis la grosse blinde ou le bouton. Dans ce cas, la moyenne ne veut plus rien dire et peut induire en erreur. Si j’ai besoin de ces informations détaillées pour un gros coup, je passe ma souris sur le chiffre en question et elles apparaissent.

Pour résumer, le tracker ne remplace pas l’observation, mais il permet de conserver un niveau de jeu élevé tout en maintenant un volume de jeu important, ce qui est crucial pour vaincre la variance sur le long terme.

3) Le Sharkscope HUD

Je me suis récemment remis à utiliser le Sharkscope HUD. Lié à la célèbre base de données de tournois en ligne, ce logiciel permet de connaitre les résultats financiers et certaines habitudes de jeu des adversaires, et de les afficher à côté des informations données par le tracker.

Les informations révélées par le S-HUD sont parfois cruciales :

  • Elles permettent par exemple de déterminer quel type de pression on peut mettre sur un joueur qui joue plus haut que sa limite habituelle.
  • Elles permettent de confirmer ou d’infirmer les impressions données par le tracker. Il y a des joueurs gagnants avec tous les styles de jeu possibles et imaginables, et inversement, un joueur qui affiche de « bonnes statistiques » dans le tracker peut être perdant pour d’autres raisons.
  • Elles précisent le portrait en donnant des informations concernant le volume, le buy-in moyen et les % d’ITM.

Voici les infos de mon Sharkscope HUD :

La fonction « ability » est un nombre calculé par Sharkscope censé représenter le niveau de jeu global. Cela ne veut pas dire grand-chose en soi, mais me permet de configurer mes codes couleurs de manière plus précise.

Je ne lance le S-HUD qu’en milieu de session en général, quand il me reste une quinzaine de tournois, dont les plus importants. Cela nécessite de relancer Winamax pendant un break, ce qui permet aussi de réorganiser un peu les tables.

4) La gestion des fins de session

C’est le moment où l’on doit être au maximum de sa concentration, c’est là qu’on atteint des tables finales et qu’on fait réellement du profit. Une session peut démarrer de manière catastrophique et finalement se terminer par une victoire à quatre heures du matin…
Le problème, c’est également le moment où l’on est le moins performant : fatigue, énervement lié aux coups précédemment joués, nombre de tables peu élevé et donc rythme de jeu moins soutenu. Il m’est souvent arrivé dans le passé d’avoir envie de « tout balancer » et d’aller me coucher ! Même si j’arrivais à résister à ça, il est clair que la qualité de mon jeu se dégradait.

J’ai donc pris quelques mesures pour améliorer ça:

  • Pas d’excès le samedi soir ! Si je dois sortir, c’est plutôt le vendredi (mais idéalement pas en fin de semaine).
  • Alerte automatique quand il me reste six tables : je n’utilise à ce moment-là plus que l’écran de gauche. Si je me sens en tilt, je mets de la musique. Si je m’ennuie profondément, je lance un film ou une série sur l’écran de droite, que je regarde distraitement pour ne pas « trouver le temps long » (je le déconseille à ceux qui ne sont pas déjà de gros multitableurs).
  • Le fait d’avoir un peu plus de temps pour gérer mon attention me fait souvent démarrer un ou deux débats sur des mains disputées le soir même dans le canal Skype du Team dédié á cet effet. Cela me permet de garder mon cerveau en éveil et de profiter dans le même temps de la réflexion de haut niveau de mes coéquipiers.

5) Des objectifs à long terme

Un élément indispensable à ma motivation et à la qualité de mon jeu est d’avoir un objectif á accomplir.
Encouragé par les succès de 2013, j’ai donc décidé de consacrer mon activité de grinder pour cette année 2014 aux tournois en ligne de Winamax (principalement le dimanche, mais également un soir de semaine).

Mon premier objectif est financier. Je veux essayer d’afficher 100 000 euros de profit d’ici la fin de l’année ! C’est très ambitieux, car même en conservant mon ROI actuel, cela nécessiterait un volume et une discipline importante à coté de mon programme de tournois live. Je ne m’en voudrai pas si je manque cet objectif, mais je vais faire de mon mieux pour l’atteindre.

Je suis parti sur les chapeaux de roues avec un profit de près de 37 000 euros sur les deux premiers mois de l’année. Mais en toute objectivité, j’ai run good ! Cela ne va sans doute pas durer éternellement et la variance va finir par me rattraper !

En anticipation de ces difficultés à venir, j’ai décidé de mettre toutes les chances de mon côté :

  • Je veux améliorer ma connaissance des adversaires réguliers, savoir qui se cache derrière chaque pseudo (très difficile avec désormais la possibilité de changer son pseudo) et prendre des notes plus précises.
  • Je veux reprendre le travail technique. Mes derniers blogs sur la pyramide des connaissances m’ont fait prendre conscience que j’avais un peu choisi la facilité ces dernières années. Heureusement, sur une impulsion de Mikedou, le Team s’est mis à organiser des revues de sessions en visio-conférence, pendant lesquelles nous rejouons l’intégralité un tournoi en ligne en commentant toutes les décisions. C’est évidemment une mine d’or pour gagner en finesse technique !
  • Je vais mettre à jour mon matériel informatique et réorganiser mon espace de grind pour qu’il soit moins encombré et plus accueillant. Je vais aussi m’équiper correctement pour pouvoir jouer lorsque je suis en déplacement, une idée que j’avais un peu abandonné mais qui est en train de me revenir à l’esprit.
  • J’ai aménagé mon calendrier de tournois live pour faire un peu moins de tournois et optimiser mes déplacements afin d’être capable de grinder chez moi la plupart des dimanches. Par exemple, mon escapade aux WSOP sera plus courte cette année, mais je jouerai des tournois un peu plus chers et éviterai ceux à 1000 ou 1500 dollars.

Second objectif : je veux gagner tous les tournois réguliers du site au moins une fois ainsi qu’enrichir mon palmarès d’un second titre Winamax Series. J’exclus les tournois comme le Sunday surprise, le Multiplex ou le Main event, qui comportent un peu trop de joueurs pour en faire un objectif réalisable en un an.
C’est plus un objectif de volume que de performance quand on y réfléchit, mais cela veut aussi dire gagner en précision dans le jeu en ultra short-handed et en heads-up.
J’aimerai bien finir dans le Top 10 du Grand Prix annuel (un classement purement honorifique), mais je ne peux pas vraiment lutter face aux joueurs qui font un volume bien plus important que le mien en jouant quasiment tous les jours. Je me contenterai donc d’en faire un souhait.

Troisième objectif : je veux être plus performant mentalement. Je viens de refaire appel aux services d’un coach pour être un meilleur compétiteur. Cette démarche est principalement liée au live, dans lequel je rencontre plus de difficultés, mais elle m’aidera surement aussi pour mon jeu en ligne.  J’en parlerai peut-etre dans un prochain blog.

Des objectifs ambitieux, des moyens clairs, et une grosse envie de réaliser de belles performances et de progresser ! Let’s grind !