[ITW] snipour82 : ‘Je tremblais de tout mon corps’
Par Général
dans800 000 € en jeu sur un Expresso à 2 € ? Une bonne montée d'adré pour Jean-Baptiste, qui n'a pas eu peur de jouer la gagne, avec la victoire au bout. On fait les présentations, et on revient sur cette partie irréelle.
Il est 21h07 ce dimanche 1er septembre. Tranquillement assis sur son canapé, téléphone à la main, Jean-Baptiste, alias "snipour82", décide de lancer quelques Expresso à 2 € entre deux freerolls. Il n’aura pas à attendre longtemps avant qu’apparaisse une table à un million d’euros, la seconde de l’histoire de Winamax sur ce niveau de buy-in. Une grosse poussée d’adrénaline plus tard, et le Savoyard était plus riche de 800 000 € sans avoir eu peur de mettre des jetons au milieu, c'est peu de le dire. Juste après avoir enchaîné sur un podium Wina Series, ce fan de ski nous a raconté le géant le plus stressant de sa vie.
Comment t'es-tu retrouvé à jouer pour 800 000 €, alors que tu avais juste lancé un Expresso à 2 € ?
J’étais en mode chill, ma télé allumée, je jouais pour m’amuser. J’étais en train de jouer mes freerolls “Code de la Route” et “Conduite accompagnée”. Et je me suis dit qu'avec mes Miles, j’allais lancer des Expresso à 2 €, j’aime bien en faire de temps en temps. Je perds le premier, je me dis que j’ai le temps d’en refaire un… et là, je vois le million tomber. Je me dis que ce n’est pas possible... Honnêtement, c’est assez incroyable, c’est flippant, c’est excitant, stressant, c’est un peu toutes les émotions d’un coup. En terme de poussée d’adrénaline, je tremblais devant mon écran, d’autant plus que j’étais sur mon téléphone. C’était très dur de cliquer sur les bons boutons tellement je tremblais.
Durant la partie, tu as détonné avec un style de jeu large-agressif qu’on a pas trop l’habitude d’observer sur une table avec un tel enjeu. Ça faisait partie d’un plan ?
Ça fait longtemps que je joue, et je me suis dit : “C’est un gros machin, il faut agresser, car il vont resserrer leur jeu à bloc. T’y es, t’y vas à fond, tu les lâches pas.” C’est ce que j’ai fait, et ça a marché. Dès le début, il faut faire des min-raises, des shoves, il faut jouer vraiment très très agro. Et sur les Expresso, si t’arrives à faire trois-quatre vols de blindes, ça change la donne sur la fin.
On dirait bien que la pression ne t’a donc pas vraiment atteint…
Si, il y avait un gros stress. Mais je me suis dit : “Si tu commences à stresser et à resserrer ton jeu”… Déjà, ce n’est pas mon style alors que jouer agressif, je sais le faire, c’était l’occasion rêvée. J’ai réussi à faire la part des choses. Et quoi qu’il arrive, tu sais que t’a gagné 80 000 balles, c’est juste magnifique. Le but, c’est d’aller jouer la gagne.
Quelle a été ta réaction après ta victoire ?
J’ai hurlé ! “Trop bien !” Je n’y croyais pas. Je tremblais de tout mon corps. J’aime bien l’adrénaline, et là j’ai eu un gros shoot. J’en ai parlé à ma famille, ma mère et mes sœurs, mes meilleurs potes, et ma femme, qui n’aime pas trop le poker. Quand c’est tombé, je lui ai dit : “Viens voir, il se passe un truc de dingue.”
Tu te sens comment depuis quatre jours [interview réalisée le 5 septembre] ?
On sait que c’est fait, j’ai reçu les sous sur mon compte, j’ai réalisé à partir de ce moment-là. Ce gain va entraîner beaucoup de choses. C’est une chance que j’ai. Je n’ai jamais été autant au téléphone avec ma banque ! C’est plutôt que je ne réalise pas ce que ça va impliquer plus tard.
Ce qui est tout aussi incroyable, c’est que dans la foulée de cet Expresso Million, tu enchaînes avec une troisième place sur un KO à 50 € des Wina Series pour 3 500 €. Il s'agit de ta meilleure perf' en tournois chez nous sous ce pseudo, qui efface ton précendent top score établi un mois auparavant. Le good run continue ?
Quand t’es en rush, il faut en profiter, ça n’arrive pas tout le temps ! Il y a aussi le fait de ne plus avoir peur de perdre les sous que tu as engagés. Là, je peux jouer des tournois à 50 € sans appréhension. Quand je dois faire un call difficile, je le fais. Ça doit jouer. Après je suis dégouté car sur ce tournoi, je voulais le logo ! Les tournois à 50 €, j’aime bien. Avec mon niveau de jeu, j’arrive encore à dominer certains joueurs. Mais j’ai aussi fait un petit craquage après l'Expresso Million : j’ai tenté un très gros buy-in, je me suis fait démâter.
"Ça ne donne pas forcément une image de moi de bon joueur, mais plutôt de gros chattard"
Lors de notre prise de contact pour l’interview, on avait l’impression que ça te plaisait d’être un peu sous le feu des projecteurs. Vrai ?
C‘est marrant. Je pense que ça peut plaire un peu à tout le monde. Après, lors de mes dernières parties, c’est vrai que tu as des gens dans le tchat qui te disent “Le million, le million !” C’est assez grisant. Bon, tu as aussi les jaloux, les rageux… Quand même, ça reste un Expresso, ce n’est pas comme si tu gagnais un Wina Series. C’était une chance sur dix millions, n’importe quel joueur aurait pu tomber dessus sur un 2 €. Ça ne donne pas forcément une image de moi de bon joueur, mais plutôt de gros chattard. C’est le cas !
Comment vas-tu utiliser ces 800 000 € ?
Je vais m’investir un peu plus dans le poker. Je n’ai pas fait beaucoup de tournois live. C’est vrai que j’aimerai aller faire le WPO à Dublin... Ah, ça n'existe plus ? Bratislava ? Je ne peux pas rester une semaine, alors peut-être le Main Event [Jean-Baptiste y sera, c'est confirmé]. Sinon, je vais investir. J’ai deux sociétés, et le but serait de commencer à faire des investissements sur des vieilles baraques à rénover et être un peu plus crédible auprès des banques. Comme on dit, il ne faut pas mettre tous ses œufs dans le même panier. Je suis en réflexion. Pour le poker, j’ai une enveloppe pour moi, notamment pour aller faire des sauts en chute libre, car je m’y suis mis l’an dernier. Et mon rêve, ce serait d’aller à Vegas, au moins pour aller faire un Side Event WSOP. En tant que joueur qui aime le poker, faut que je le fasse une fois !
D’ailleurs, peux-tu nous refaire ton parcours dans le poker ?
J’ai commencé quand j’avais 18-19 ans, avec les copains. Je suis moniteur de ski l’hiver, et en saison de ski j’avais mon appart, alors on se faisait des petits Sit&Go à la maison assez souvent. Aujourd’hui, j’ai 42 ans, ça fait donc 24 ans ! Ensuite, j’ai commencé le poker en ligne sur le ".com". Quand le poker ".fr" a débarqué, je suis passé sur Winamax, et sur une autre room en parallèle. On va dire que Wina a été très bon sur la promo, je préfère, le logiciel est plus agréable à utiliser. Mais mon gros problème, c’est que j’ai toujours été un gambleur. J’ai fait beaucoup de perfs, et si j’avais commencé à avoir une gestion de bankroll correcte, j'aurais pu être bon. J’ai gagné le Battle Royale, mon plus gros gain [6 325 € sous le pseudo cest pasmoi], j’ai fait runner-up de la Fièvre, troisième du Cocktail, et je flambais tout en l’espace de quelques jours. Je connais mes limites maintenant.
Quelles sont tes habitudes de jeu à l’heure actuelle ?
Je suis plutôt MTT, et je fais aussi beaucoup d’Expresso à 25 et 50 €. La balance stagne. J’aime bien les tournois, je me suis testé quelques fois au cash game, mais à chaque fois je me suis fait défoncer, car je n’ai pas les skills, et je ne m’y suis jamais vraiment intéressé. Mon rythme de jeu ? Si on écoute ma femme, beaucoup trop. En ce moment, tous les jours. Récemment, je me suis aussi fait deux tournois en casino en Loire-Atlantique, à Pornic. J’ai fait la bulle, et à deux places de la bulle sur l’autre tournoi [photo ci-dessus] ! Mais on lit en moi comme dans un livre ouvert, je dois travailler sur la poker face. J’essaie toujours de m’améliorer, mais il y a des jours où tu prends des bonnes décisions, et d’autres non. J’ai regardé des vidéos, lu des bouquins, je pense que j’ai une bonne théorie, j’ai fait des tables finales, j’ai de bonnes notions par rapport à ça.
Ça fait 24 ans que tu joues, donc. Tu as ainsi pu vivre l’explosion du poker dans le monde. Quels souvenirs gardes-tu de cette époque ?
Je regrette de ne pas avoir eu le niveau que j’ai maintenant lors des premières années du jeu en ligne, car c’est là qu’il y avait de l’argent à se faire. Le niveau a augmenté, maintenant sur les fins de tournoi les gens savent jouer sur les 5/10 €. C’est bien pour le poker, mais pas pour la bankroll. Le niveau augmente, alors si toi tu ne hausses pas ton niveau, tu te fais exploser. D’ailleurs, les vidéos Winamax m’ont beaucoup aidé pour ça, je les ai toutes regardées, certaines plusieurs fois. En prenant des pincettes, car les buy-ins ne sont pas les mêmes que ceux que l'on joue, la manière de réagir en face n’est pas la même.
Tu vis en Savoie... C'est quoi ton rapport à la montagne ?
J’ai grandi en Savoie, où mes parents se sont installés avant ma naissance dans une petite station de ski. J’ai grandi là-haut et maintenant je suis passé dans la vallée d'à côté ou je fais du bâtiment et où je suis moniteur de ski l’hiver, depuis mes 18 ans. Je suis accroc au ski, le boulot en hiver pour moi c’est les vacances. Je fais un peu d’escalade, je ramasse des champignons, je me balade dans la nature. L’an dernier j’ai attaqué la chute libre : une sacré connerie, ça risque de me coûter cher (rires). J’ai fait la formation pour sauter en solo.
Les JO d’hiver dans les Alpes en 2030, ça t’inspire quoi ?
Je les avais déjà vécu en 1992 à Albertville. La station de Pralognan-la-Vanoise avait le curling en démonstration, avant que ça passe en sport officiel. J’avais 10 ans, et à cette époque je faisais aussi du hockey sur glace, j’ai le souvenir d’être avec l’équipe des USA avant le match. En face de chez nous il y a la piste de bobsleigh, on espère la descente à Val d’Isère. L’avantage des JO, c’est qu’il y a beaucoup d’investissement au niveau des infrastructures, même si les nôtres sont déjà performantes.
As-tu d'autres hobbies ?
J’aime bien faire la fête, profiter des copains, de la nature, de mes enfants, certainement ma plus grande passion. Vivre la vie tant qu'on le peut. J’ai aussi beaucoup voyagé entre mes 20 et mes 25 ans. J’avais un camion aménagé, j’ai fait toute l’Europe, l’Amérique du Sud. Quant j’ai rencontré ma femme, on est parti un an en Australie, Nouvelle-Zélande, Asie du Sud-Est. On s'est un peu calmé avec les enfants.
Merci beaucoup Jean-Baptiste et à très vite aux tables !
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