Winamax

Super Jorstad !

- 17 juillet 2022 - Par Fausto

À la suite d'une finale foudroyante, Espen Jorstad s'impose devant l'Australien Adrian Attenborough. Le Scandinave remporte le bracelet de champion du monde, encaisse dix millions de dollars et hisse pour la première fois la Norvège sur le toit du poker mondial.
Main Event 10 000 $ : c'est fini !

Espen Jorstad

Un nouvel éclair dans ce heads-up orageux. Pour la troisième fois en moins d’une heure, Espen Jorstad demande le tapis de son adversaire sur un pot massif. Cette fois, il ne craint rien. Dans un pot limpé, son adversaire, le check-raise alors qu’il touche brelan floppé, 2-barrel sur une brique et check sur une river qui lui donne le full.

HU Jorstad Attenborough

Le Norvégien n’a plus qu’à avancer le tapis. Un nouveau tank d’Adrian Attenborough, plus court cependant que le précédent, celui qui restera dans les annales de ces WSOP. Il hésite, se frotte les mains, se gratte la barbiche, rigole, se reconcentre puis termine par un rapide « OK Fuck ! » en avançant brusquement une pile de jetons et retourner sa double paire. Espen retire alors la figurine Super Mario qui lui servait de porte bonheur et de protège-carte pour afficher son full. Ça y est ! Espen Jorstad vient de remporter le Main Event des World Series of Poker.

« Allo maman, j’ai gagné le Main Event »

Il se lève calmement, fait un signe de prière pareil à celui du Namaste indien en direction de son clan, jette un coup d’œil à la table, puis s’en va rejoindre les siens. Le clan norvégien sert son héros dans ses bras, le congratule quelques secondes, puis Espen s’extirpe pour faire deux choses en urgence. Un : saluer son adversaire, Adrian Attenborough, avec beaucoup de respect. Deux : appeler sa maman, directement depuis le plateau télévisé, à côté du butin et du bracelet qu’il vient de remporter. (A noter : le streaming étant diffusé avec une heure de décalage, maman Jorstad a donc été proprement spoilée par son propre fils !)

Espen Jorstad

Le fiston partage quelques mots avec sa mère, le temps d’un coup de fil où Espen, solide, impassible tout le long de cette finale, ne peut s’empêcher de lâcher quelques larmes. « Elle était en train de pleurer aussi, beaucoup. On a pas réussi à beaucoup parler, confie Espen au moment de l’interview post-victoire. Elle était très fière bien sûr, c’est ma fan numéro 1. C’était assez émouvant comme coup de téléphone ».

Espen se fait mitrailler de photos pendant quelques minutes, puis se prête au jeu des micros, à chaud, pour commenter sa victoire. « Ça fait beaucoup de bien, mais je ne réalise pas vraiment encore, je pense que ça deviendra plus réel dans quelques jours, déclare le joueur, qui embraye tout de suite sur la qualité de son runner-up. J’ai eu un heads-up vraiment difficile, contre un excellent joueur. Adrian m’a causé beaucoup de problèmes, depuis le Day 6 où on a commencé à se jouer. Je lui ai d’ailleurs dit, “peu importe ce qui arrive, j’aimerais jouer le heads-up contre toi » et c’est ce qu’on fait, mais j'ai eu des meilleures cartes que lui aujourd’hui ». 

Le guerrier méditant

Espen Jorstad

Comme chaque vainqueur de tournoi, Espen a eu les cartes en sa faveur. Pendant toute la fin du Main Event, il s’est positionné dans le haut du chipcount grâce à un run favorable, mais aussi grâce à ses qualités de joueur. La technique bien sûr, que le grinder a aiguisée durant des années sur les plus hautes limites des rooms online. Mais aussi la maîtrise de soi, en montrant une attitude exemplaire, caractérisé par un calme, une quiétude presque troublante.

Même quand son adversaire tankait pendant 19 minutes, Espen restait imperturbable, confortant sa stature droite et fière en regardant fixement son adversaire, derrière ses élégantes lunettes rondes. « J’essayais juste de me concentrer sur ma respiration, explique le joueur en revenant sur ce fameux tank. C’était un peu une pratique de méditation. Où on se concentre sur différentes parties de votre corps. Ce doigt là, puis ce doigt là » illustre le joueur. Imperturbable, le Jorstad mêlait à cette froideur un certain enthousiasme, une volonté d’apprécier ces moments de jeux, à l’image de ce sourire en coin, qui ne l’a pas quitté de la partie. Une sérénité et une gaieté qu’on retrouvait jusque dans les T-Shirt arborés par son rail, floqués de cette question improbable « Do you even meditate ? » (Est-ce que tu médites, au moins ?, parodie zen du célèbre meme "Do you even lift, bro ?", "Est-ce que tu vas à la salle au moins ?").

Pourtant, c'était mal barré

Espen Jorstad

Le voilà donc champion du monde. Pourtant, on peut parier que personne n'aurait misé un kopek sur le Norvégien à l'issue du Day 1A : il s'était qualifié pour le Day 2 certes, mais avec seulement le 605e tapis des 630 joueurs restants, soit 17 600 jetons, moins d'un tiers du stack de départ ! Sauf que la courbe s'est radicalement inversée lors du Day 2ABC : Espen terminait la journée avec... 463 500 jetons, en 40e position au chipcount. Sa progression fut ensuite assez linéaire lors des trois jours suivants, durant lesquels il se tint en embuscade, bien calé en outsider derrière les tapis de tête.

C'est vraiment lors du Day 6 qu'Espen sortit de l'ombre, puisqu'il passa de 4,665 millions à 31,175 millions, multipliant donc son tapis par plus de six et terminant en 5e position au classement. Puis il a surfé sur la vague lors du Day 7, atteignant la finale en position de chipleader : une TF où il a mis un peu de temps avant de passer la seconde, puis d'éjecter tour à tour Mathija Dobric (5e) et John Eames (4e). Largement en tête pour le 3-handed, il a laissé Adrian Attenborough se charger du cas Michael Duek, avant de travailler au cerveau l'Australien en heads-up, jusqu'à ce que ce dernier fume ses derniers neurones. Une preuve de plus que la structure du Main Event est définitivement exceptionnelle, et que dans ce tournoi, rien ne sert de courir : il faut surtout partir à point.

Les vikings, encore eux !

Jorstad

Et maintenant ? Que faire après avoir remporté le plus beau tournoi du monde, pour une somme affolante ? D’un point de vue financier, le joueur reste fidèle à la réponse classique des tournois de poker : Jouer plus cher, investir, et acheter des cryptos. « J’aimerais m’installer sur la scène High Stakes. Jouer plus de 25 000 $ par tournoi par exemple », affirme le joueur, qui n’avait jamais ITM en live plus cher qu’un 5 000 $ jusqu’à aujourd’hui. 

Au-delà de l’argent, l’homme qui vient de vivre le premier jour du reste de sa vie aura besoin de temps pour prendre la mesure de son exploit et savoir quelle direction prendre après cet accomplissement.  « Je ne sais pas quoi faire tout de suite, avoue Torstad. Je suis comme un sans abri, j’essaie de comprendre où je veux aller. Je vais prendre un break, et peut être aller à Barcelone pour refaire un peu de poker. Je n’ai pas décidé encore ». 

Espen Jorstad

Peut-être pourra-t-il prendre conseil aux côtés des champions présents dans son rail. Un certain Koray Aldemir, mais ausso Manig Loeser, Dietrich Fast, Jack Sinclair, et bien sur Patrick Leonard, avec qui il remportait le Tag Team Event deux semaines plus tôt, s’étaient glissés dans le kop norvégien. Après avoir célébré en compagnie de leur ami champion, ils auront certainement quelques bons conseils à lui partager.

Avant de penser au futur, il est temps d’apprécier le moment. Espen Jorstad vient de remporter le titre ultime du joueur de poker. Le natif de Steinker, petite commune située dans le comté de Trøndelag, hisse la Norvège sur le toit du poker mondial. Il sera le troisième scandinave à voir son poster afficher sur les murs de l’Event Center, après Martin Jacobson et Peter Eastgate et s’installe directement tout en haut de la All-Time Money List nationale, devant un certain Felix Stephensen, runner-up en 2014… Derrière Martin Jacobson. Jadis, il paraît que les vikings ont envahi l’Europe. Dans l’histoire moderne, leur conquête s’étend jusqu’à Las Vegas.

NB : Voilà pour ce Main Event. Vous voulez du rab ? Il reste encore un 10 000 $ 6-max pour le déssert. On a du Romain Lewis, du Adrian Mateos, du Davidi Kitai et un énorme Pierre Calamusa (en termes de stacks hein), accompagnés de toute une flopée de grinder français, qui, on ne sait pour quelle raison, se débrouillent plutôt bien en format short-handed. Rendez-vous dimanche pour déguster ensemble le der des ders de ces WSOP.

La tête dans les mains

- 17 juillet 2022 - Par Rootsah

Mis sous une pression d'enfer par Espen Jorstad, Adrian Attenborough a fini par craquer
Runner-up, l'Australien remporte 6 millions de dollars, chez lui à Las Vegas
Main Event 10 000 $ (Heads-up final)

Mal de crane
Des maux de crânes, encore et encore : c'est l'image que l'on retiendra d'Adrian Attenborough dans le heads-up final. Pourtant, au début, les neurones ont gentiment chauffé : l'Australien se payait sans douleur le scalp de Michael Duek au bout de 20 minutes de jeu. Cela lui a notamment permis de grappiller de précieux jetons pour l'ultime duel, afin de revenir dans la roue du chipleader Espen Jorstad avec 235,8 millions de jetons contre 284,5 millions. Mais c'est à partir de ce moment que les choses se sont gâtées.

On commence avec une première prise de tête : quelques minutes à peine après le début du HU, Espen raise à 7,5 millions et Adrian 3-bet depuis sa big blind à 26 millions, avec J4. Le Norvégien suit, et paye à nouveau 16 millions sur le flop K108, puis 54 millions sur un turn 4. Adrian choisit de checker la river 8, et entend ce qu'il ne voulait pas entendre : "all-in"

Tank 6
Couvert, l'Australien joue donc une première fois son tournoi, et va hésiter pendant 20 minutes à faire ou non ce hero call. Se parlant à lui-même, se tordant un peu dans tous les sens, devinant même à un moment la main de son adversaire (K-Q), qui reste lui parfaitement impassible, Adrian va cependant finir par lâcher sa main, à raison. Après avoir donc déjà crâmé pas mal de matière grise, Attenborough tombe donc à 132 millions, contre 385 chez Jorstad.

Photographes
Les photographes étaient prêts à dégainer leurs objectifs si le tournoi prenait fin subitement...

Pas de quoi le décourager pour autant : rapidement, le résident vegassien, toujours aussi actif comme depuis le début de la TF, repasse devant grâce à quelques pots savamment gagnés. Mais le Norvégien ne s'en laisse pas compter, et se fait violence pour reprendre un petit leadership. Puis survient cette main.

Espen Jorstad limp sa SB, et Adrian Attenborough check avec J4 pour découvrir un flop 242. Espen mise 4 millions, et Adrian place un check-raise à 12 millions. Mais le Norvégien semble vouloir encore faire grossir le pot : ce sera un 4-bet à 32 millions ! Une mise payée assez rapidement par Attenborough. Le turn est un 8, et Jorstad réfléchit aux différentes options avant d'envoyer une praline à 62 millions. Pas de quoi impressionner son adversaire, qui met une minute à s'acquitter de la somme, avant de checker très vite la river Q. Le Norvégien emploie une nouvelle fois la manière forte, demandant alors le tapis d'Adrian...

Tank 2
Ce dernier nous refait alors un remake de la main racontée plus haut : tentant sans succès de déceler des tells chez un adversaire qui ne bouge pas une oreille, il s'excuse encore de prendre autant de temps à réfléchir, en rigolant même avec son clan. Sourire narquois sur le visage, se refaisant le film du coup à voix haute, essayant d'énumérer les différentes mains que peu avoir son adversaire, Adrian ne sait pas quoi faire. Il peut tout aussi bien être un héros si son adversaire bluffe, où un zéro s'il call avec sa faible main et qu'Espen retourne un meilleur combo... 

Tank 1

Tank 3

Tank 4

Tank 5

Tank 6

Au bout de huit minutes, Adrian lâche un "Fuck it" et prend la décision de payer. C'est la mauvaise : Espen Jorstad retourne Q2 pour un brelan floppé transformé en full sur la river. C'est bien ça qu'on appelle un "fuck call" ?

Adrian Attenborough termine donc runner-up de ce Main Event. À 28 ans, le local de l'étape remporte 6 millions de dollars en récompense des dix jours passés à batailler vers le titre, chez lui, alors qu'il comptait jusqu'ici 1,46 million de dollars de gains sur le circuit, dont huit ITM WSOP. Dix jours qui n'auront pas été de tout repos : on se souvient que lors du premier jour de cette finale, celui qui a appris le poker en famille lorsqu'il était adolescent s'est retrouvé à deux reprises à tapis couvert, alors qu'il avait démarré la dernière table en milieu de peloton.

Adrian
Cet adepte de la Game Theory et des parties de cash game high-stakes aura aussi démontré un bon niveau de jeu durant les derniers jours de l'épreuve. Un Main où il aura pris son envol lors d'un Day 4 stratosphérique, qu'il termina dans le peloton de tête pour ne plus le quitter jusqu'au bout de ce tournoi. Il ne lui aura manqué qu'une marche pour décrocher le titre dont rêvent tous les joueurs de poker de Las Vegas. Mais il va maintenant pouvoir laisser son cerveau prendre un peu de repos...

Espen Jortstad remporte donc le Main Event des WSOP 2022 ! Retrouvez notre post de fin dans quelques minutes.

Ils ont détrôné le Duek

- 17 juillet 2022 - Par Rootsah

Le spécialiste du PLO ne sera pas le deuxième argentin sacré sur le Main Event WSOP
Sorti en moins de 30 minutes lors du plan à trois, il empoche 4 millions de dollars
Main Event 10 000 $ (Finale - 3 joueurs restants)

Duek
Michael Duek a commencé ce deuxième jour de finale comme il avait commencé le premier : mal. Sauf qu'au moins, hier, il n'avait pas craqué, se qualifiant pour le deuxième jouer de la TF après l'élimination de John Eames en 4e place. Malheureusement pour lui, l'Argentin n'a pas réussi à renverser la tendance aujourd'hui, sa chute se terminant au fond du précipice après même pas 30 minutes de jeu.

Duek 3
Il faut dire qu'avec 24 blindes et une configuration en 3-handed où les blindes, justement, tournent à vitesse grand V, Michael allait forcément être contraint de jouer son tournoi, probablement en premier : Adrian Attenborough, deuxième en jetons, était bien conscient que l'ICM démentiel (2 millions de dollars de différence entre la seconde et la troisième place, imaginez la valeur de vos jetons !) lui interdisait de prendre tout risque inutile contre le gros chipleader Espen Jorstad. En joueur de cash game peu habitué à jouer de petites profondeurs, Michael n'a pas su éviter les balles : même s'il est rapidement remonté à une quarantaine de blindes, le grinder de Fort Lauderdale s'est tout aussi vite retrouvé dans un spot bourbax.

Duek 5
L'Australien min-raise à 6 000 000 au bouton, et Michael décide de placer un 3-bet à 23 millions depuis la SB. Attenborough s'aligne, pour voir un flop Q105. Aucune action à ce stade du coup, et nous arrivons donc sur un turn K. Duek dégaine alors une mise de 17 millions, suivie par son adversaire. Sur la river 3, il va cette fois réfléchir deux bonnes minutes avant de miser 52 millions, se gardant cinq millions derrière. Mais l'Australien lui demande vite son tapis, et Michael met le reste au milieu avec K8. Une top paire bien bien insuffisante, car en face, il n'y a rien de moins que les nuts, avec AJ.

Duek Father
Après une très longue accolade avec son clan suite à la main fatidique et un gros câlin de son père, Michael s'est ensuite prêté au jeu de l'interview, malgré une envie évidente de déguerpir le plus vite possible. "Ce fut une grande expérience, bien plus que je ne le pensais. Je suis très heureux, assurait un Michael plutôt au bord des larmes au micro de PokerGO. "Toute ma famille était présente, je vais partager tout ça avec eux." 

Duek 2
Au moment du bilan, on retiendra tout de même l'énorme Day 6 du Floridien, où il était passé de 1,6 million à 22 millions de jetons, son rail toujours prompt aux encouragements qui l'a poussé très très loin dans ce tournoi, et évidemment sa récompense de 4 millions de dollars, qui constitue seulement sa 5e ligne Hendon Mob, lui qui avait tenté sa chance sur deux tournois de Pot Limit Omaha sur ces WSOP avant le Main Event. 

Duek ITW
"Je vais retourner faire du PLO en cash-game, expliquait d'ailleurs Michael. Mais je vais sûrement faire aussi d'autres tournois désormais." Michael Duek ne succèdera donc pas à son compatriote Damian Salas, sacré en 2020. Bon, tout de même, il y a quand même un peu de positif à retenir... 

La dernière bataille

- 17 juillet 2022 - Par Fausto

Les trois derniers prétendants au Main Event ont fait leur entrée dans l'arène. Une dernière cérémonie de présentation, avant de s'engager dans un ultime combat, le plus important de leur carrière.

Ils combattent depuis près de dix jours. Ils ont transpercé un field immense, voyant des milliers d’autres tombe à côté d’eux. Au moment de l’ultime bataille, ils ne sont plus que trois. Trois hommes prétendant au bracelet de champion du monde et aux dix millions de dollars. L’Argentin Mikael Duek, l’Australien Adrian Attenborough et le Norvégien Espen Jorstad - ce dernier avec le grade de large chipleader.

Avant que ne sonne l’Olifant, la tension est palpable. Les premiers supporters chauffent le champ de bataille, prennent possession du territoire, avant d’accueillir leurs héros. Mikael Duek est le premier à pénétrer dans l’arène, évidement suivi de tout un cortège de caméras PokerGo. L’Argentin de Miami est accueilli par une foule de Latinos et d’amis venus de Floride. Déjà ivres avant même les premières bières, tous chantent à la gloire de Mikael. Adrian Attenborough et Espen Jorstad débarquent peu après dans une effervescence plus mesurée.

Bracelet

Les spectateurs curieux s’étalent sur le bord des barrières encadrant anciennement les tables extérieures, ou sur les dizaines de chaises alignées devant le grand écran de l'Event Center. Le bracelet est arrivé, soigneusement essuyé par les assistants joailliers pour qu’il brille de mille feux et les caméras se mettent en place.

Quelques minutes de latence, le temps que tout soit prêt, un dernier répit pour les combattants qui prennent les dernières énergies auprès de leur clan. La stratégie, elle, a été pensée depuis longtemps. 

« Je ne vais pas foncer, affirme Miki Duek. On va voir comment la partie évolue, et j’adapterai ma stratégie en fonction du stack des adversaires. Ce qui est sûr, c’est qu’on a gagné la bataille du rail, les Argentins montrent qu’ils sont présents ».

Adrian Attenborough, lui, ne cache pas ses intentions. Le joueur le plus actif et le plus offensif de la première partie de finale continuera de prendre des risques. « Je joue toujours pour gagner. Mais aujourd’hui, encore plus qu’hier, assure l'homme de Brisbane. On est déjà assuré de beaucoup d’argent, j’ai très envie de jouer au poker, et d’apprécier le moment ». 

Les deux hommes tenteront de bousculer le chipelader Espen Jorstad. Le Norvégien a fait preuve d’une grande solidité hier. Il a montré qu’il avait toute la patience et la technique nécessaire pour asseoir sa domination. À lui de concrétiser de son avantage pour aller chercher sa plus grande victoire, celle qui changera sa vie.

Tandis que les trois joueurs sont assis, Jack Effel prend le micro pour un discours largement étouffé par les cris du rail argentin. On distingue tout de même le fameux "Shuffle-up and Deal" lançant officiellement les hostilités. Deux minutes plus tard, une mise en scène attire l'attention de l'armée médiatique. Un charriot de métal, pareil à celui dans lequel sont réservés les jetons, protégé par un imposant garde du corps qui ouvre la marche... Armé d'un fusil à pompe. Vous l'aurez compris, ce chariot renferme les millions de dollars qui seront exposés sur la table au moment du Heads-up. Bienvenue au Nevada.

Rappel des Pay-outs :

1er : 10 000 000 $
2e : 6 000 000 $
3e : 4 000 000 $

Intéressant à défaut d'être passionnant

- 16 juillet 2022 - Par Benjo DiMeo

Un trio de bons et solides joueurs se qualifie pour la deuxième partie d'une finale qui a jusqu'ici manqué de vrai spectacle
Espen Jorstad conserve le chip-lead acquis la veille au cours des demi-finales
Main Event 10 000 $ (Finale)

Finale Main Event
Cordiale et détendue, l'atmosphère en finale du Main Event des WSOP 2022 l'est restée tout au long d'une première phase de jeu qui s'est étirée jusqu'une heure du matin ce vendredi. Les rires, invectives et punchlines ont régulièrement fusé à table entre des joueurs ayant passé tellement d'heures ensemble au cours des derniers jours qu'ils pouvaient presque nous faire croire qu'ils jouaient un home game entre potes pour quelques euros, et non la finale du plus gros tournoi de poker du monde avec un enjeu de dix millions de dollars. Mais une ambiance décontractée ne se traduit pas forcément par une partie à ne pas rater : les téléspectateurs connectés aujourd'hui pour observer des passes d'armes légendaires et autres bluffs de haute volée en seront pour leurs frais. Certes, sur le plan technique, rien à reprocher aux dix finalistes, qui, si ce n'est pour quelques déviations par-ci par-là, ont suivi la partition que l'on attendait eux. Aucun n'a flanché de manière spectaculaire. Aucun n'a sur-performé non plus. Chacun s'est montré digne de l'enjeu. Mais tous nous ont rappelé combien l'absence de quelques-uns des grands animateurs des journées précédentes a pénalisé la qualité du spectacle aujourd'hui. Devant le show, correct mais sans plus, qui nous a été offert aujourd'hui, difficile de ne pas laisser son esprit divaguer et s'imaginer ce qu'aurait pu être ce cru 2022 avec un Karim Lebei, un Alexandro Loco ou un Kenny Tran à table. Ces regrets ainsi exprimés, revenons sur les prestations des dix joueurs qui se sont présentés au casino Paris en début d'après-midi.

Espen Jorstad (Norvège)
298 millions (99 BB)

Espen Jorstad
Chip-leader au départ, chip-leader à l'arrivée d'étape : Espen Jorstad n'a déçu personne aujourd'hui. Sens du timing impeccable, sourire omniprésent sur le visage, il n'a pas toujours été au sommet du classement mais n'a jamais été en danger non plus. Ce n'est qu'en fin de journée qu'il a signé ses premières éliminations, mais elles lui ont permis de s'installer de nouveau dans le très confortable fauteuil de leader. C'est lui qui aura le plus à perdre samedi.

Adrian Attenborough (Australie)
149,8 millions (50 BB)

Adrian Attenborough
40 mains gagnées aujourd'hui, soit 21 % du total des coups joués : incapable de tenir en place, l'Australien fut de loin le joueur le plus actif de la journée... et ce sans éliminer un seul adversaire, tut en ayant subi l'épreuve du tapis couvert à deux reprises : il lui a fallu d'abord gagner avec Roi-Valet contre le As-Dame d'Espen Jorstad, puis trouver le miracle avec 99 contre les Dames de Matthew Su. Bref, un miraculé. Aussi bien positionné en fond de tableau et au bord de l'élimination que tout en haut du chip-count, il pourra terminer demain à n'importe laquelle des trois dernières positions.

Michael Duek (Argentine)
72,1 millions (24 BB)

Michael Duek
A causé la première élimination de la journée en gagnant un flip contre Asher Conniff, mais s'est ensuite retrouvé short alors que personne d'autre n'avait sauté : il lui a fallu passer par la case "tapis payé" et gagner avec As-9 contre le Dame-6 de Matija Drobic. S'est ensuite de prendre les quatre dernières blindes d'un Aaron Duczak qui avait perdu un pot énorme la main d'avant. À ensuite piqué son chip-lead à Adrian Attenborough en rentrant une quinte par le ventre. Une dernière heure catastrophique, durant laquelle il a perdu tous les pots importants, le contraint à entamer le dernier virage du Main Event avec seulement 24 blindes.

Les prix restants
Vainqueur : 10 millions de dollars
Runner-up : 6 000 000 $
3e : 4 000 000 $

Ils nous ont quittés aujourd'hui

Rail
4e : John Eames (UK) 3 000 000 $
Deux Rois qui le font doubler contre les 9 de Michal Duek... Deux As qui le font doubler contre le tirage couleur d'Aaron Duczak... Puis un As-Valet qui le fait sauter contre Espen Jorstad : peut-être parce qu'il l'a jouée comme si elle était aussi bien que les As ou les Rois ? Dommage : le pro Anglais, si solide et sérieux tout au long du Main Event comme il est dans sa carrière de pro depuis 2007, est parvenu à éliminer deux joueurs aujourd'hui et s'est un temps rapproché du chip-lead : il y avait sans doute mieux à faire.

5e : Matija Dobric (Croatie) 2 250 000 $
Premier joueur à passer la barre des 100 millions grâce à une confrontation flush vs flush face à Adrian Attenborough, le Croate a conservé son avance de longues heures avant de céder un peu de terrain en faisant doubler Jeffrey Farnes. L'élimination de Philippe Souki, via un craquage d'As, sera son dernier vrai coup d'éclat : la seconde moitié de la finale le verra lentement degrind avant de perdre le flip de la surive contre Espen Jorstad.

6e : Jeffrey Farnes (USA) 1 750 000 $
Le dernier Américain du Main Event s'est sans doute montré un peu trop timide et prudent pour représenter une vraie menace en finale. On retiendra tout de même ce gonflé donk-bet all-in avec pocket paire de 2 sur un flop 6-6-5 en guise de dernière main.

7e : Aaron Duczak (Canada) 1 350 000 $
Seulement 6 pots remportés sur les 122 mains durant lesquelles il était assis à table. La plus importante d'entre elles ? Un tirage couleur max joué à fond alors que John Eames l'attendait avec les As.

8e : Philippe Souki (UK) 1 075 000 $
Double up sur son premier coup à tapis préflop. Double up sur son second coup à tapis préflop. Les As craqués sur le troisième ! Mais pour quelqu'un qui possédait 11 blindes à dix joueurs restants, ce n'est pas un si mauvais résultat... L'Anglais a même eu le temps d'éliminer un joueur.

9e : Matthew Su (USA) 850 675 $
Le chip-leader à la reprise (à égalité avec Espen Jordstad) fut le finaliste le plus malchanceux du jour. Et de loin.

10e : Asher Conniff (USA) 675 000 $
N'a pas eu le temps de gagner un coup. Dès la septième main, ses 15 BB ont perdu le flip de la survie contre Michael Duek.

La finale reprendra vendredi à 14 heures, heure locale (23 heures en France). Bien entendu, on jouera jusqu'à la remise du bracelet suprême, et du tas de 10 millions de dollars en (faux) cash. Bonne journée à tous !