Winamax

Londres, Victoria Casino, du 1 au 4 octobre : 596 joueurs

Par dans


Alexia Portal

Quoi de mieux pour fêter mes un an au sein du Team Winamax qu’un petit résultat ?

Le trajet semé d’embuches m’a paru plus court qu’à Monaco, forcément puisqu’on joue un jour de moins, mais les montagnes russes ça épuise, et croyez moi, une fois le tournoi terminé, j’ai dormi de longues heures, complètement vidée par le but en partie atteint.


C’est le premier tournoi dans lequel je fais autant de variations, de chaud et froid, et de descentes aussi vertigineuses.


Je ne vais pas vous raconter toutes mes mains, Benjo et Julien (à qui je dois entre autres d’avoir eu un mp3 chargé chaque jour … - oups le chargeur - de l’eau à volonté, les comptes des petits stacks pendant la bulle … bref une aide dont on ne va plus pouvoir se passer) en on déjà rapporté plusieurs pendant le coverage sur Winamax, mais je vais revenir sur les points sensibles et surtout sur le plaisir que ça a été pour moi de partager une table de poker avec des joueurs aussi prestigieux et enthousiasmants qu'Antony Lellouche, David Benyamine, Annette Obrestad, Vanessa Rousso, et quelques uns des finalistes du tournoi.

Je n’ai eu que très peu de belles mains si je regarde mes 22 heures de jeu à table : deux paires d’As (dont une craquée par KQo et une autre UTG que personne n’a voulu jouer avec moi post flop), une paire de Rois face aux As d’Annette, pas une seule fois AK, très peu d’As jouables en définitive, mais de nombreuses petites paires qui ont respecté les probas en terme de brelans floppés, et de nombreuses fois des broadway JQK que j’ai énormément joué soit en position, soit en resteal.

Les petites paires m’ont surtout permis d’assumer mes moves avec un jeu fait durant le Day 2, ce qui a développé à table une image solide et respectable et je dois l’admettre mes 55/45% ont tenu en règle générale, sauf à la fin de mon Day3.


La seule horreur que j’ai fait subir à un joueur, c’est le deuxième jour, juste après le dinner break :

Je suis short stack avec 9BB au bouton, Un joueur en milieu de parole est absent, la petite blind est absente aussi, et je vois le joueur UTG balayer du regard la table et faire un raise de 3,5 grosses blindes.

Je le mets sur un vol et pousse all in avec KJ assortis. Il me paye avec AKo et j’ai la chance de trouver un Valet à la rivière, ce qui me fera remonter à 20 blindes, un niveau où je peux de nouveau jouer et agresser.

Franchement, après coup, ma lecture était moyenne, c’était un joueur solide, pas le genre de filou à voler les absents avec air. Mais vu les sales coups de mon Day 1, pour une fois que c’était en ma faveur, on n’allait pas se plaindre non plus !


Dès le début de mon Day 1, j’ai une table très active et un joueur très chanceux touche des cartes hallucinantes. On attend tous l’occasion de lui reprendre des jetons, très concrètement, nous tenons le pigeon de la table et il va les redistribuer aussi vite … Quand il limpe 300 en milieu de parole et qu’au bouton je découvre AA, je me frotte les mains.

Je le raise après réflexion et je sais qu’il va pousser les presque 4,000 qui lui restent avec une main marginale. Ce qu’il fait avec KQo. Et vous me croirez ou non mais je ne suis pas du tout rassurée quand le board s’ouvre avec A-J-9 … le 10, je le vois arriver gros comme une maison.

Et paf, la rivière…

Me voilà à moins de 6,000 presque d'entrée de jeu.



Je ne remonte pas grand-chose jusqu’à ma paire de 7, où je call un raise préflop sans la position, de grosse blinde. Ma côte est limite mais j'ai une belle côte implicite contre ce joueur aggressif qui a monté des jetons.

Je trouve un board A-7-2 que je slowplay pour rentabiliser au maximum mon brelan, sûre que mon adversaire lui possède l’As. Je bet petit la turn sur le J, carte possible pour qu’il me mette sur un J ou un vol. Il pousse ses jetons : je paie avec plaisir et ai déjà gagné le coup contre son AQ.


Ainsi, je remonte à la moyenne. Puis à 18,000 en remportant des petits pots.

Annette Obrestad est à ma table et c’est un beau spectacle. Nous sommes quatre filles (en comptant Vanessa Rousso et une asiatique ascète, capable de tenir des bluffs avec une gueule d’ange et qui finira 2ème cheapleader au terme du Day 1). Nous sommes toutes agressives à notre façon (et sans sacs à mains :)).

Regarder Annette jouer est un régal. Parce qu’on lit son intelligence derrière ses lunettes cheap de faux diamants, parce qu’elle a développé un jeu de regards d’une intensité animale, parce qu’elle a une façon très particulière de prendre ses cartes, ses jetons … une vraie mante religieuse.


Elle prend l’habitude de raiser milieu de parole ou UTG, souvent petit autour de 2,5BB, et quand elle relance à 800, qu’un joueur call et que je soulève KK au bouton, je garde la tête froide. Annette est connue pour jouer aussi bien any two que les bombes. Je surelance à 2,800. Elle possède 15,000, moi 18 000 et à priori elle va lâcher une petite paire contre moi. Elle call, l’autre joueur abandonne le coup.

Face à face.

Flop 7-6-2 avec 2 piques.

Annette check, je mise 5,000. Elle envoie son tapis. Je ne pense pas qu’elle ai payé pour un brelan. QQ ? AA ? AK à pique ? Any Two ?

Bien sur que je pense aux As, mais c’est Annette ! Comment ne pas payer ? Je calcule mes chances, la plus forte probabilité étant qu'elle ai une paire inférieure à la mienne. Annette retourne AA et bat aisément mes Rois.

Je retombe à moins de 10BB. C’est vraiment un coup dur, une rencontre inévitable.

Je garde le moral, sincèrement je ne sais pas trop pourquoi mais je m’accroche, j’accepte de tomber à 1,500 sans jouer. Parce que je n’ai que des poubelles et que les agressifs de la table se feront un plaisir de me payer, je le sais. Et j’assiste à ce coup ahurissant entre Annette et Vanessa. Raise d’Annette avec 36o et call de Vanessa avec 23s. Flop 3-10-3. Les tapis volent : un 2 vient sauver Vanessa. Et là encore, j’observe Annette. Parce qu’elle va attendre deux tours avant de pousser ses quelques bb au milieu et elle le fait avec 57o. Et elle sort. Avec sa réputation, dur d’être respectée quand on ne possède plus rien ou presque.

Quant à moi, je remonte avec une petite paire (de 5, je crois) qui tient, puis avec de nombreux petits pots : je joue KJ contre Vanessa Rousso qui fold sur mon reraise en retournant AK sur un flop Jxx, je possède de belles possibilités avec 9Q sur un flop J-T-x …

Bref, tout ça m’amène une heure avant la fin du Day 1 à 25,000 jetons. C’est bien moins que l’average puisqu’un joueur sur trois à sauté mais ça me laisse de quoi me défendre pendant une heure. Voir plus si affinités …


Et je vais finir la journée à 18,400, faute de cartes et surtout parce que l’asiatique très présente fera des coups énormes et monopolisera la table (qui n’a pas entendu parlé de sa relance à tapis Td-3c sur une turn amenant 3 carreaux et un tirage de quinte ventrale ? de là à savoir si elle est du niveau d’une Annette, une pensée très construite ou si elle est un peu fofolle … elle sautera en tout cas trois places avant l'argent)

Enfin, j'ai passé le premier tour, c’est déjà quelque chose :)




Day 2 : blindes 500/1000 ante 100, mon stack : 18400, average :40 000. 158 joueurs


J’ai la chance de me retrouver à table avec le champion français David Benyamine. Je double vite avec le fameux bad beat KJ vs AK. Sorry again !

Puis je raise au bouton avec Ad-9x profitant d’une situation creuse. La bb complète. Joueur sérieux, conservateur, je sais que s’il ne trouve pas quelque chose je peux remporter le pot.

Flop : 378 tout à carreau.

Il check, je check.

Sort le 2 de trèfle. Il regarde ses cartes et check à nouveau.

Je pense qu’il a une bonne carte à carreau peut être Q ou K et au lieu de value beter mon A que je pense gagnant, je check à mon tour. Le pot est petit et si le carreau sort je le laisserai essayer de voler le pot et lui prendrai plus avec mon A de carreau.

Le 5 de carreau sort, belle carte pour moi : je suis max ! Il bet quelque chose comme la moitié pot. Je regarde mes cartes. Si je le raise, il ne me mettra pas sur l’A que j’aurai surement misé avant. Il pensera que je ne le laisse pas arracher et que moi aussi j’ai une couleur mais moins bonne. Diabolique !

Je relance à 11,000 et il paye avec la couleur au K.



Changement de table et aïe, je me retrouve à droite de Guillaume, notre Johny001 du Team Winamax. Je déteste jouer avec des gens que je connais (n’est ce pas Jomannix :) ?) Je cherche des raisons, des messages particuliers, des signes, je perds mes repères c’est fou … il a la position sur moi et j’espère juste de pas trop me faire mal à ses cotés.


Les plus cartésiens d’entre vous vont rire mais j’assiste à un coup où un gros stack à ma droite limp UTG+1, je fold, Guillaume rentre dans le coup et ça limp jusqu’à la bb. Je sens que ce n’est pas le résultat escompté par le premier limpeur. Pourquoi limper, sinon pour piéger …un jeune, plutôt funky, je ne le quitte pas des yeux, il a AA c’est certain !

Ma main à couper (et pourtant je vous jure que vu mon métier, une main en moins ça fait désordre !) je suis sure de ma lecture, du coup je suis bien incapable de vous raconter le déroulement du coup, trop occupée à le zieuter … jusqu’au show down … AA :) On a parfois des éclairs de lucidité … encore faut il avoir suffisamment confiance en soi pour s’écouter !




Je double de nouveau avec Q9, une main qui décidement m’aura rapporté gros sur ce tournois. Je suis de BB et call le raise d’un joueur agressif. Il y a trois joueurs dans le pot.

Le flop s'ouvre J-T-2 avec 2 trèfles. Tirage de quinte par les deux bouts. Nous checkons tous les trois. Si quelqu’un avait misé j’aurai vraisemblablement choisi de faire all-in.

Sort le 4 de cœur. Rien de bouge ! Le rêve de la free card. Pourtant sur de pareilles possibilités, quelqu’un a surement trouvé quelque chose.

Rivière : le 8 de pique. Pas de couleur possible donc juste une autre belle quinte pour moi… Je suis encore max, merci la free card, d'autant que mon adversaire portugais de petite blinde mise 12,000 avec sa double paire slowplayée (JT). Je fais tpais, il paye et je remporte ce coup qu’il a joué en prenant des risques (c’était déjà lui les AA limpés, c’est un joueur qui se prend dans ses propres pièges !)


Je perds ensuite plus de 15,000 contre la jeune femme asiatique sur un coup que je ne joue pas bien. Elle a 77 et j’ai 1010, j’ai la position et je ne la reraise pas alors qu’elle est très active et capable de bluffs monstres. Le flop vient 9-8-6 … puis 5 … bref, un coup qui s’arrête à temps avec la doublette du 8 et elle retourne sa quinte et empoche les jetons que je n’ai pas assez défendus au départ et sans doute trop à la turn.


Les blind augmentent , c’est une boucherie ! Vous étiez bien et vous voilà bientôt short stack.

La bulle de Monte Carlo me revient en tête. Encore là, je sais que je suis bien incapable de folder AA ou KK ou même QQ et AK mais je tremble à l’idée de rencontrer ces mains. Heureusement je ne vois rien, pas de décisions difficiles à prendre, je fold toutes mes poubelles devant la pression des cheap leaders qui font leur boulot, et bien.


J’arrive à 10bb quand on est à la recherche du dernier volontaire pour sauter avant l’argent. Ca ne court pas les rues et le main par main dure longtemps.

Mais alors qu’un joueur est en train de pousser sa dernière blind devant lui pour le prochain coup à jouer, on annonce un tapis payé à une autre table et cette élimination fera de nombreux heureux dont ce joueur sauvé in extremis par la bonne volonté d’un autre. Rentrer dans l'argent avec une seule grosse blinde, c’est la classe quand même !


Je suis "in the money" ! :)


Je vais me retrouver très vite avec des petites paires qui vont tenir, un respect quasi-total à table sur chacune de mes relances (profites-en, dixit manub), ma seconde paire d’As sur un flop hauteur Q checké, puis une rivière K que je bet avec l’espoir d’être payée si le flop a touché mon adversaire mais non rien, je remporte juste le pot, tout de même assez conséquent vu les blinds et ante … je remonte à presque 100,000 et sans presque m’en apercevoir on sonne la fin du Day 2. 32 joueurs encore en course vers la table finale… dont moi pour de nouvelles aventures en day 3 le lendemain !


Dur d’aller dormir direct mais je me force, après avoir récupéré une nouvelle chambre à mon hôtel (ben oui, je n’allais pas le matin garder ma chambre au cas où … je préfère faire dans ce sens là et revenir toute souriante à la réception à 2 heures du mat « do you have any room please ? For one night … or maybe two … but one night sure »)

 



Day 3 : blindes 2000/4000, ante 800, mon stack : 104 000. 32 joueurs


L’excitation du day 3 est immense : photographes, interviews en anglais : mon gros ventre, être une femme au poker, quel est mon plan de bataille... Ils veulent tout savoir !


Je me retrouve à une table sans grosse vedette, avec mon tapis moyen, je suis entourée de short stacks mais très vite on me déplace et je me retrouve à la table des Grands : David Benyamine et Antony Lellouche, la classe incarnée.


Très sincèrement, j’ai vraiment manqué d’opportunités ce troisième jour.

J’ai resteal quand la situation se présentait, j’ai poussé all-in quand je pensais ne pas être payée pour me maintenir à flot et les deux autres fois où j’aurai pu encore voler, mon voisin de droite, aussi short stack que moi, bougeait le premier et on a vu de vraies belles mains chez lui.

Mon tapis avec A9s est discutable surtout que c’était certain que David en blind allait compléter ou raiser. Sentir Antony faible sur ce coup n’était pas suffisant pour m’aventurer ici, même avec la position.

Mais on split à trois ce petit pot donc pas de casse.


Pour tout vous dire, voilà les mains que j’ai joué pendant ces 3 heures : 78o, 98o, 33, A9s, Q9o, KTo et ma seule bonne main JJ, paire UTG que personne n’a voulu jouer avec moi. Autant dire que je suis presque heureuse de partir à tapis avec ce qui fut mon ultime paire du tournoi  (77) avec l’espoir qu’une fois encore mon avantage sur deux over cards sera respecté.

Mais ce n’est pas le cas et je sors proche de la demie finale. Avec le sourire, bien sur !

Très heureuse d’avoir pu jouer avec de si respectables joueurs, d’avoir touché d’un peu plus près ce rêve d’une table finale. Etre ITM sur ce tournoi était très important pour moi, parce que ce résultat confirme Monaco et ma capacité à jouer plusieurs jours de tournois. Je me rends compte maintenant de tous les progrès effectués depuis un an au sein de l’équipe Winamax.


Ma manière d’aborder mes prochains tournois se fera avec une petite dose de confiance en plus dans la poche et avec la certitude de profiter pleinement de la chance que j’ai de jouer ces tournois magnifiques (quoique, concernant la structure … peut faire mieux, Mr le Directeur !)


Je me mets à rêver d’un meilleur résultat encore …




A très bientôt, et mille fois merci pour vos posts d’encouragements toujours plus nombreux.

Je vous embrasse !