Huis clos parisien

Par dans

Des heures et des heures d'ennui ponctuées de rares instants de folie : la vieille maxime souvent évoquée pour définir le Texas Hold'em en No Limit s'est prouvée parfaitement adaptée pour décrire la finale de l'édition 2009 du Grand Prix de Paris.

Il aura fallu attendre trois heures et près de soixante-dix mains pour assister à la première élimination. Trois heures durant lesquelles l'ensemble hétéroclite des six finalistes (deux membres du Team Winamax, deux légendes des cash-games parisiens, un italien sur le retour, et un amateur qualifié pour 50 euros) ont disputé une partie mesurée et prudente. Dans le huis clos étouffant du plateau télévisé fermé au public, pas de place à la rigolade. Ambiance tendue et concentrée. Peu de dialogue : seuls les jetons faisaient la conversation. Une relance pré-flop mettait fin à la plupart des pots – les flops furent rares, les showdowns rarissimes.

Le premier joueur à quitter la table finale fut celui qui s'était montré le plus actif. Mais ce n'est pas un excès d'agressivité qui a forcé Nicolas Levi à se contenter de la sixième place. Juste une banale et inévitable confrontation préflop entre sa paire de Dames et la paire d'As de Fabrizio Ricci, quelques minutes après avoir fait doubler David Pêcheur avec A-Q contre A-6 à la faveur d'un 6 au flop. Aucun regret à avoir pour le joueur du Team Winamax, qui a développé durant trois heures un poker maitrisé, relancant aussi souvent que possible, ramassant de nombreux petits pots, optimisant ses mains en évitant les obstacles avec brio.

S'il a fallu près de soixante-dix mains pour voir le premier joueur sortir, il n'en faudrait que soixante de plus pour voir le tournoi arriver à sa conclusion. Les éliminations allaient se succéder à cadence rapide.


Peu fourni en bonnes cartes, et sans doute intimidé par l'enjeu, David Pêcheur ne grilla guère par sa présence, et fit rapidement ses adieux à la finale d'une manière identique en tout points à ceux Nicolas : avec deux Dames à tapis avant le flop contre les deux As de... Fabrizio Ricci, dont l'inactivité fut largement compensée par sa propension à trouver de grosses rencontres faciles à jouer.


Cinq minutes plus tard, c'est Jan Boubli qui subissait l'élimination en quatrième place, six ans après avoir terminé runner-up de cette même épreuve. Un poil trop serré, « Bibal » a pratiqué la stratégie de l'attente, manquant sans doute quelques occasions de ramasser deux ou trois pots faciles. Il sort finalement avec A-Q contre la paire de Neuf de Jerôme Zerbib, juste après avoir doublé Vikash Dhorasoo avec AK contre KT – un Dix apparaît au flop.


Vikash Dhorasoo, parlons en ! Sans aucun doute LA grande suprise de cette table finale.  Timing, instincts, rythme, fair-play, tenue à la table, et même un peu de réussite sur certains coups : un quasi-sans faute pour le footeux du Team. Avec sa formidable prestation, la plus belle de sa courte carrière pokéristique, l'amateur Vikash a prouvé qu'il avait sa place au milieu des pros du Team Winamax. Après avoir doublé d'entrée de jeu avec As-Valet de coeur contre la paire de Huit de Jerôme Zerbib, Vikash est passé à l'attaque, n'étant battu que par son collègue du Team Nicolas Levi au niveau de la fréquence de ses relances préflop. On l'a vu sur-relancer Zerbib et Boubli avec des mains somme toutes moyennes : Q-J et A-T. Bien vu, les pros étaient en plein vol. On l'a vu éviter le drame avec un brelan contre le full de Zerbib. On l'a vu piéger David Pêcheur avec une paire d'As. Au final, Vikash sort avec les honneurs en troisième place, envoyant ses quinze blindes avec K-9, pour tomber contre le A-Q de Fabrizio, encore lui.


Le tête à tête fut l'affaire d'une vingtaine mains, avec un Jerôme Zerbib assez décevant contre le très weak Fabrizio Ricci. Sans doute assommé par la fatigue – ayant joué près de vingt heures de poker depuis la veille – le français avait pourtant une carte à jouer avec quarante blindes au départ du heads-up. Manquant de profiter de la passivité préflop de Ricci, Zerbib allait lentement laisser fondre son tapis, le coupant carrément en deux avec un bluff mal ajusté contre le jeu max de son adversaire. Sa sortie, en revanche, est « papiers en règle » : deux Dames à tapis préflop contre As-2 qui trouve un As au flop.


Et c'est ainsi que Fabrizio Ricci, un ancien régulier de l'ACF disparu quelques années entre temps après une période de « brokage », est devenu le nouveau champion du Grand Prix de Paris, succédant à Roger Hairabedian. Félicitations au vainqueur, à tous les finalistes, en particulier à nos joueurs du Team Winamax, qui concluent leur saison européenne de fort belle manière avec une deuxième « doublette » en table finale, après Ludovic Lacay et Arnaud Mattern à Varsovie.

De bonne augure pour les World Series of Poker à Las Vegas.... C'est de là bas que je vous retrouverai à partir du jeudi 28 mai, pour couvrir en direct la première épreuve à 40,000 dollars, commémorative des 40 ans des championnats du monde. La première épreuve d'une longue série qui s'étalera sur six semaines. A très bientôt !

Un grand bravo à l'Aviation Club de France pour avoir filmé et mis en ligne la quasi totalité de la table finale quelques heures à peine après sa conclusion. Pour voir ou revoir les images, rendez-vous sur le coverage Winamax !

Résultats
Grand Prix de Paris – 10,000€ - 138 joueurs

Vainqueur : Fabrizio Ricci (Italie) 419,520 €
Runner-up : Jerôme Zerbib (France) 222,870 €
Troisième : Vikash Dhorasoo (Team Winamax) 157,320 €
Quatrième : Jan Boubli (France) 104,880 €
Cinquième : David Pêcheur (France) 78,660 €
Sixième : Nicolas Levi (Team Winamax) 65,660 €

Quelques images de plus














Benjo DiMeo

Triple vainqueur VSOP à Cognac.

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