[Blog] Une bankroll, presto !
Par Tournois Online
dans[Note de la rédaction] Début décembre, notre Top Shark espagnol Borja Gross s'est lancé un défi à sa mesure : le Nitrometro. En partant d'un capital de 100 € (plus un extra de 100 € en cas de banqueroute), Timotyy devait ainsi monter la plus grosse bankroll possible en jouant des Expresso Nitro, tout comme LeVietF0u l'avait fait en MTT dans son challenge Make Your Bankroll Great Again cet été. Il disposait pour cela d'une session journalière durant une semaine, diffusées en direct sur notre chaine Twitch ibérique (si vous parlez espagnol, les vidéos des sessions sont disponibles ici).
Et clairement, ce n'était pas une mince affaire pour un joueur spécialiste des tables High-Stakes sur ce format, dont il est l'un des plus gros réguliers de Winamax et dont l'enveloppe de départ pour ce défi constituait un seul buy-in des plus petits Expresso qu'il joue la plupart du temps. Celui qui a décroché en mars dernier l'un des sept Expresso 1 Million déjà tombés en 2020 revient pour nous sur les tenants et les aboutissants de ce challenge, nous révélant les pièges à éviter dans ce format si spécifique et la ligne de conduite qu'il a suivie pour terminer dans le vert.
S'il y a bien une chose qui me motive plus que tout, ce sont les défis. J'aime trouver des challenges qui me mettent sous les feux de la rampe et me poussent à donner le meilleur de moi-même. Alors si c'est un défi concernant le poker, et en plus diffusé en streaming, c'est encore mieux ! Justement, au début du mois, nous en avons lancé un sur le site espagnol de Winamax : le Nitrometro. Le principe était simple : durant sept jours consécutifs, je devais jouer un maximum d'Expresso Nitro et monter la plus grosse bankroll possible en partant de 100 €, ce qui revient à commencer quasiment de zéro. Évidemment, je me doutais que le challenge apporterait son lot d'émotions...
Tout le monde sait que que les Expresso Nitro sont une variante dans laquelle je me sens à l'aise. Sauf que cette fois, je devais jouer en micro-limites. Voilà qui s'annonçait excitant ! De plus, le défi consistait également à analyser en direct mes performances et partager mes impressions avec mes viewers.
Une semaine après la fin du défi, c'est le moment de débriefer tout cela à froid. Au début, j'étais un peu inquiet, car j'étais finalement le seul à pouvoir vraiment évaluer mes performances. Après tout, je joue ce format tous les jours, et je connais donc les ROI estimés de chaque limite, la variance associée, les swings, les probabilités de faillite...
La première chose que j'ai faite, et que je conseille à tous ceux qui veulent se fixer des objectifs au poker, est d'étudier tous les scénarios possibles, sur un plan théorique. Je me suis ainsi posé certaines questions indispensables : dans quelle mesure étais-je à l'aise avec 100 € de bankroll si je devais commencer en 1 € et que je ne pouvais pas descendre de limite ? Quelle était la probabilité de faillite ? À quelle fréquence pouvais-je monter de limite ? Quelle serait la corrélation swings – ROI ? Comment pouvais-je optimiser ma stratégie pour maximiser les profits ?
Une fois tous les calculs effectués (avec l'aide de Swongsim, un simulateur estimant la variance et les bénéfices envisageables, ce qui vous aidera dans votre pré-analyse), je savais à quoi m'attendre. Ce que j'attendais, c'était de pouvoir multiplier mon capital par 2 ou 2,5, car je n'allais pas jouer plus de 20 heures et ce sur un nombre de tables réduit, afin que mes viewers puissent suivre facilement l'action. Je savais que je ne pourrais pas faire de miracles, même si j'étais prêt à tout donner pour empocher le maximum.
Expresso Nitro, mode d'emploi
Fort de toutes ces projections inscrites dans un coin de ma tête, je débute mon défi le dimanche 6 décembre. Je veux commencer doucement : il y a toujours la possibilité de prendre plus de risques par la suite, mais pour moi la clé est d'être patient et d'essayer de monter cette bankroll petit à petit. Le premier jour, je ne joue quasiment que des parties à 1 € et je profite d'un bon run : je termine avec une bankroll de 135 € à la fin de la journée, soit une hausse de 35% !J'étais conscient que je ne pouvais pas me permettre de gaspiller mon argent, mais tant que j'étais positif et que je pouvais descendre de limite si les choses tournaient mal, je voulais adopter une gestion de bankroll agressive : de par mon expérience, je savais que c’est une dynamique qui peux s’avérer gagnante, et en tant que gros reg des Expresso, je n'aurai aucun doute ou incertitude au moment de passer au niveau supérieur. J'ai donc essayé de me focaliser sur les parties à 2 € mais aussi à 1 € au cas où il me faudrait revenir à des buy-ins moins élevés.
Les Expresso, et surtout les Nitro, sont un format où le court terme peut nous faire croire que nous faisons des erreurs, alors même que nous sommes en train de développer notre meilleur poker. Et cette variance doit être prise en compte : il convient de se laisser une marge de sécurité pour éviter les surprises. Ainsi, bien que je commence le troisième jour avec une bankroll de près de 200 €, je sais alors qu'un matelas de 100 buy-ins est encore trop juste pour ce genre de parties, où les swings peuvent être brutaux même si vous êtes largement gagnant. C'est pourquoi je vous recommande de vous lancer en Nitro avec une très grande marge de manœuvre si vous le pouvez, pour ne pas vous effondrer si les choses tournent mal et que la malchance frappe à votre porte. Car oui, nous sommes tous sous la menace de la malchance, et j'ai pu l'expérimenter en direct lorsque j’ai encaissé quelques bad beats au cours des deuxième, troisième et quatrième journées.
Au coup d'envoi du Day 5, j'avais la même bankroll qu'à la fin du Day 1, après deux journées sans pertes ni profits. Mais je me suis toujours efforcé de prendre les meilleures décisions, d’améliorer ma capacité d’adaptation au jeu de mes adversaires et de mesurer les risques avec justesse. À la fin de la journée, mes buy-ins oscillaient entre 2 et 5 € : la variance m’avait souri, et j’avais réussi à doubler ma bankroll, qui se montait alors à 403 €.
Je me suis aussi rendu compte que les Day 4 et 5 avaient été très similaires en termes d'EV, mais radicalement différents en terme de résultats. Un jour, je me retrouvais dans le rouge (presque à -5 €) et puis le lendemain, j'avais doublé (+ 210 €). Tout cela m’a donné une grande leçon : accepter la variance. Car vous avez beau jouer aussi bien que vous le pouvez, vous dépendrez aussi de facteurs impossibles à contrôler : les multiplicateurs que vous obtenez, ceux que vous gagnez, un lancer de pièce sur le multiplicateur principal, ou encore un cooler qui tombe selon le nombre de blindes qui vous reste peut stopper votre run alors que vous vous étiez sur le point de grimper de limite.
J’ai pu terminer les deux derniers jours en prenant plus de risques quand je pouvais me le permettre, et en ayant beaucoup de patience quand les choses tournaient mal. Au final, j’ai joué quelques Expresso à 10 € et j’ai bouclé le sprint final avec une bankroll de 576 €, en jouant le dernier Nitro en 25 € pour faire plaisir au public.
La stratégie globale a été claire : il fallait être patient, en essayant de ne pas trop perdre chaque jour et en prenant plus de risques quand j’avais plus de marge de manœuvre. J’ai réussi à terminer la semaine et le défi de manière très cohérente et avec un résultat très positif : 576 € de bankroll. J’ai ajouté 476 € aux 100 €, soit un rendement de 476% ! La folie !
Mes 10 commandements finaux
1. Tout d'abord, je voudrais dire que j'ai beaucoup aimé partager cette semaine avec les viewers sur le stream. Je me sens de plus en plus à l'aise aux commandes de la chaîne et j’ai kiffé chaque minute. Merci à eux !
2. Il y aura des jours perdants. Toujours. Et peu importe vos qualités. Si nous ne perdions pas au poker, ce jeu ne serait pas aussi kiffant qu'il ne l'est, car ce serait toujours les mêmes qui gagnent et beaucoup de gens arrêteraient de jouer. Seuls ceux qui ne lâchent pas finissent par gagner.
3. Si vous savez que vos décisions sont bonnes et que vous êtes un joueur gagnant, la meilleure chose que vous puissiez faire est de consacrer des heures au jeu, et d'être patient, très patient. Il faut travailler cette patience.
4. Le fait de connaître un minimum les statistiques et de planifier à l'avance les scénarios possibles permet de comprendre ce qui peut se passer, et vous aide à accepter à l'avance des situations défavorables.
5. Regarder le cashier ou le graphique de vos gains ne vous apporte que de la frustration, car tout ne dépend pas de vous. La meilleure chose à faire est donc de se concentrer, d'analyser ses adversaires et d'oublier les notions de pertes ou de gains au cours de votre session. Concentrez-vous uniquement sur le fait de prendre les meilleures décisions.
6. Le mieux pour gagner de l'argent est de relativiser son importance, de se dissocier de ce qu'il représente et d'apprendre à l'appréhender par rapport à notre bankroll.
7. Il faut vous rendre compte que votre bankroll est votre assurance-vie au poker, comme dans n'importe quel jeu vidéo. Il faut donc s'en occuper : jouer raisonnablement dans les limites que vous autorise votre BR vous aidera à mieux gérer les bad beats. En bref, donnez moins d'importance à chaque main jouée. À long terme, cela représente beaucoup d'argent gagné.
8. Descendre de limite quand il le faut est une décision courageuse et intelligente. Vous devez ravaler votre ego, le nivellement par le bas n'est pas un problème. Si vous ne le faites pas quand c'est nécessaire, votre bankroll risque de passer de mauvais moments.
9. Une gestion de bankroll dynamique mais responsable est la clé pour ne pas "buster".
10. Nitros, Expressos, ou tout ce que vous voulez : il est possible d'y gagner de l'argent de façon constante et durable sans HUD ou statut VIP. Il suffit d'avoir une bonne stratégie, d'étudier le jeu et de faire preuve de patience.
Vous pouvez le faire ! Bonne chance.