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[Blog] Top 5 : mes pires moments de poker

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Gaëlle Baumann Blog Facebook

En cette étrange période de pénurie de tournois live, sans grand-chose à se mettre sous la dent niveau poker (en dehors des Summer Shots évidemment), je vous propose de vous replonger avec moi dans mes pires et meilleurs souvenirs de poker depuis mes premiers pas en 2006. Histoire de terminer par une note positive, commençons cette semaine par le Flop 5.

5) Les Rois maudits

Dans une carrière de poker, il y a des mains qui vous marquent au fer rouge. C'est l'un des rares jeux ou l'issue d'un seul coup peut changer une vie. Je sais, cette phrase fait très Casino Royale, mais c'est la réalité. C'est d'ailleurs aussi pour ce genre de frisson qu'on aime tellement ce jeu. La main en question, beaucoup d'entre vous la connaissent déjà certainement.

Gaëlle Baumann

Plus tôt cette journée-là.

Nous sommes au Day 5 du Main Event des WSOP 2012. Il ne reste que 30 minutes avant la fin de la journée. J'ouvre une magnifique paire de Rois. Tout en effectuant une relance UTG, je discute avec mon voisin de gauche, le Canadien Timothy Adams. Je ne vois donc pas ce qui se trame de l'autre côté de la table. Après un fold général, la parole arrive à la petite blinde, Andras Koroknai, joueur hongrois qui annonce all-in pour 1,2 million  de jetons, soit un tapis de 40 BB. Je jubile, mais la joie est de courte durée.

Au moment d'annoncer call, je me tourne vers mon adversaire... et vois ses cartes partir dans le muck. Il n'avait pas vu ma relance et pensait être en tête-à-tête contre la grosse blinde qui était short stack. Suite au fold de cette dernière, il pensait simplement avoir gagné le coup. Après la confusion générale autour de la table, le floor finit par prendre la décision de faire payer à Koroknai uniquement le montant de ma relance, et de me remettre le pot de 5,5 blindes. Inutile de dire à quel point la décision est frustrante sur le moment et que j'ai fait des cauchemars de cette main pendant longtemps ! En tout cas, elle a fait couler beaucoup d'encre ce jour-là.

4) My unfair Ladies

Voici une autre main qui m'a fortement marquée. Nous sommes sur le tournoi Ladies des WSOP en 2018. C'est un tournoi que j'apprécie car l'ambiance est différente des autres tournois. De manière générale, les tournois qui comptent le plus d'amateurs sont ceux où les joueurs sont les plus détendus, puisqu'ils ne jouent pas pour les mêmes raisons que les professionnels. Et ce tournoi Ladies compte beaucoup d'amateurs. Avec 696 joueuses en lice, ce n'est pas le plus gros que j'ai eu l'occasion de jouer mais il y a tout de même le fameux bracelet à la clé, ainsi qu'un joli billet de $130 000.

Il reste 34 joueuses et j'ouvre une paire d'As en small blind. La joueuse à ma gauche est agressive mais elle ne m'a pas relancé sur mes limps précédents et j'ai pu remporter plusieurs petits pots en misant après le flop. Dans la dynamique, je m'attends à ce qu'elle commence à réagir et qu'elle me relance si je limp une fois de plus. Le plan fonctionne comme prévu ! Il ne me reste qu'à la sur-relancer, les profondeurs étant parfaites avec plus de 45 BB chacune pour lui laisser la place soit de payer, soit d'envoyer son tapis.

Aylar Lie - Gaëlle Baumann

Aux côtés d'Aylar Lie, avant la désillusion.

Après un long temps de réflexion, elle décide de tout envoyer avec sa paire de 6. Mais le flop 6-10-10 vient sceller mon sort et elle remporte le pot du chiplead pour deux fois et demi la moyenne. La suite est anecdotique : avec moins de 20 BB, je pars à tapis avec deux Valets contre la même joueuse qui m'élimine avec deux As en 31e position. Si ce tournoi m'a affecté à ce point, c'est bien parce que je ne me suis jamais sentie aussi proche d'un bracelet. Le field était vraiment soft et il était très facile de jouer sans variance, ce qui n'est pas le cas dans des fields plus relevés avec des joueurs aguerris. J'ai pourtant accroché une 15e place en 2010 sur ce même tournoi, l'année où la Française Vanessa Hellebuyck a décroché le titre et 192 000 $ devant plus de 1 000 participantes. Mais j'avais beaucoup moins d'expérience à l'époque et mon stack n'était pas comparable. Les perspectives de bracelet me semblaient finalement plus lointaines.

3) En tête-à-tête avec mon tilt

Lorsque j'ai commencé le poker online en 2007, j'ai toujours été très prudente dans ma gestion de bankroll. Quand je me suis mise à réellement grinder le cash game 6-max en NL25, j'ai pu monter environ 1 000 $ en quelques mois. Je jouais également pas mal de heads-up… et souvent tard dans la nuit. Comme tout le monde, il m'est arrivé plusieurs fois d'être en tilt mais de continuer à jouer, car tel ou tel fish était là et je pensais que c'était une erreur de quitter la table. Je jouais donc mon B ou C-game pendant des heures. Avec du recul, si j'avais su m'arrêter au bon moment à chaque fois, j'aurais certainement gagné beaucoup plus d'argent.

Un soir, comme à mon habitude, je joue en HU contre un joueur que je qualifierais de récréatif. Dans ce format peut-être plus qu’avec d’autres, vous avez souvent cette sensation désagréable que le joueur en face de vous est en train d'avoir le run de sa vie. Et malheureusement, c’est contre vous. Il touche tout et vous rien, il attrape vos bluffs, vous ne le payez que lorsqu’il est en value, etc. Forcément, la réalité n'est pas si simple. Toujours est-il que la dynamique n'est clairement pas en votre faveur, mais à force d'avoir ces pensées négatives et pas toujours rationnelles, votre jeu se détériore.

Cette forme de tilt est la pire. Elle est insidieuse, on ne la sent pas venir mais petit à petit, on se met à jouer à l’envers. Par exemple à ne plus bluffer assez (car le fish paye tout dira-t-on) ou à payer trop souvent, pendant que notre adversaire se régale. Le pire dans tout ça, quand vous commencez à remonter la pente et reprendre quelques buy-ins, c’est quand votre adversaire n'est finalement pas si nul que vous le pensiez : lui a l'intelligence de s'en aller quand il sent qu’il perd le momentum. Je pense que beaucoup de joueurs de HU ont dû ressentir cette sensation fréquemment.

Pour revenir à cette soirée. Je ne saurais dire combien de buy-ins j'ai perdu précisément car j'étais déjà en bad run, mais je sais qu'en une nuit, j'étais revenue à la case départ et venais d'anéantir des mois d’efforts et de grind. Ma session s'est terminée à 6h du matin avec un goût amer, une sensation de culpabilité terrible et le sentiment d'avoir été extrêmement faible.

2) Hate et bad run

Gaëlle Baumann 2010 En 2010, j'ai eu la chance d'être choisie par les tout meilleurs joueurs de cash game français pour être coachée et devenir une "protégée" du Team Limpers. Ne vous détrompez pas, cette expérience a été très formatrice, cependant je vais vous expliquer pourquoi elle a également été dure à vivre pour moi. Le challenge Limpers consistait à grinder pendant six mois en cash game en étant suivie par des coaches comptant parmi l’élite des joueurs tricolores et de monter une bankroll de 50 000 $ online.

Le recrutement s'est fait sur dossier puis entretien et session de jeu. Après tant d’efforts, je ne vous dis pas le bonheur et la joie ressentis quand j'ai su que j'avais été choisie ! C'était un rêve pour tout joueur de cash game qui se respecte. Il s'agissait évidemment d'une opération marketing puisque le site Limpers était la première plateforme de coaching française en ligne à l'époque. Je venais de terminer mes études et j'étais dans une période de transition puisque je m'étais pris une année sabbatique à Paris pour voir si le poker pouvait devenir une occupation sérieuse. Tout se passait pour le mieux. Lorsque j'ai été choisie par les Limpers, je me suis décidée à retourner un temps chez papa/maman, car on y est quand même mieux que dans son petit appart étudiant (et la cuisine y est bien meilleure).

Les termes du contrat étaient que je bénéficierai d'un nombre défini d'heures de coaching. En échange, je devais donner des updates régulières à la communauté sur ma progression sous forme de blogs et jouer 600 000 mains de cash game en 6 mois. Dès l'annonce de ma sélection, j'ai dû faire face à quelques haters (il y en a malheureusement toujours) qui se demandaient comment et pourquoi j'avais été choisie. Les commentaires allaient de l'immonde "Mais avec qui a-t-elle couché ?" au classique mais tout aussi triste "C'est parce que c'est une fille, c'est tout".

Pas facile de ne pas s'offusquer un minimum lorsqu'on n'est pas habitué à la médiatisation. Le poker reste une niche en terme d'exposition, mais même dans un si petit milieu, lorsqu'on est au cœur de ce genre de polémiques, cela peut être relativement difficile à gérer. Chaque personne réagit différemment mais en ce qui me concerne je suis facilement affectée par ce genre de critiques. Le départ a donc été un peu mouvementé mais je ne me suis pas démontée. J'ai enchainé les heures de grind sans compter. Je passais mes journées à multi-tabler de 9 à 12 tables.

Gaëlle Baumann 2010 WSOP Malheureusement, les trois premiers mois furent catastrophiques en terme de résultats. J'ai connu le pire bad run de toutes mes années de cash game. Après 300 000 mains jouées en trois mois, je me trouvais 75 buy-ins sous l'EV, les confrontations préflop en ma défaveur s'enchainaient, bref rien ne se passait bien. Les personnes qui me suivaient se demandaient à quel point mes résultats étaient imputables à la variance et certains étaient ravis de me voir échouer, puisque cela les confortait dans les causes de leur propre échec. Il est toujours plus simple d'imputer son échec à d'autres facteurs qu'à soi-même.

Bien sûr, j’étais en plein apprentissage à l’époque (je le suis toujours !) et je savais que j’étais loin de jouer parfaitement. Mais au milieu de ce bad run particulièrement violent, je me disais aussi que la roue allait finir par tourner. Le constat fut sans appel. Au bout de trois mois : je n'étais pas négative, mais tout juste break even. Puis tout a commencé à mieux se passer. Le run est devenu bien plus correct et, sur les trois derniers mois et les 300 000 mains suivantes, j'ai réussi à terminer le challenge à 25 000 $ de gains. L'objectif initial des 50 000 n’était donc pas atteint mais pour moi cela représentait tout de même une belle victoire. J'avais non seulement montré que j'étais une joueuse gagnante, mais j'étais également passée d'être une régulière de NL 50/100 à une joueuse de NL 400+ en 6 mois. En clair, je pouvais maintenant dire que j'étais passée joueuse pro.

Le challenge a vraiment été éprouvant, aussi bien d’un point de vue médiatique que de la gestion du mental et du bad run. En plus des coaches qui m'ont permis de progresser, j'ai reçu durant cette période beaucoup de soutien et ai énormément partagé à propos de mental. Merci donc tout particulièrement à Pe4nuts (fondateur ensuite du site Kill Tilt, devenu partenaire de Winamax) et Nicolas Ragot alias Arctarus qui m'ont aidée à surmonter cette mauvaise passe. Si je n'avais pas été forcée à jouer autant, j'aurais certainement été tenté de baisser les bras plus rapidement ou de faire plus de pauses. Cela aurait peut-être été moins usant psychologiquement mais ma progression aurait également été plus lente et le bad run m'aurait paru sans fin. C'est une épreuve qui m'a donc sans aucun doute endurcie et aidée à passer un cap.

1) Si près, si loin…

Gaëlle Baumann Main Event Bust

And the winner is : sans trop de surprise, mon élimination aux portes de la table finale du Main Event des WSOP en 2012. Je m'incline 10e sur 6 598 joueurs, dernière féminine en course après l’élimination de la Norvégienne Elisabeth Hille en 11e place. La frustration est encore plus grande lorsque je m’aperçois que mon bourreau n'est autre que le joueur hongrois contre qui j'ai eu le litige détaillé plus haut. Je m'en suis voulu d'avoir commis plusieurs erreurs en ce fameux Day 7. Je n'ai pas toujours suivi mon plan de jeu, ce qui m'a peut-être coûté cher.

J'ai mis beaucoup de temps à accepter que c'est simplement mon inexpérience des tournois live qui m'a desservie et que j'ai fait du mieux que j’ai pu à cet instant précis. Évidemment il y a le gain conséquent (590 000 $ tout de même) qui permet de relativiser, mais échouer si proche du Graal qu'est le bracelet du Main Event des WSOP, qui plus est sans faire partie des "October Nine" restera un grand regret pour moi. Mais il n'est jamais trop tard, n'est-ce-pas ?

Maintenant que le plus dur est passé, rendez-vous au prochain épisode pour mes meilleurs moments !

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Une des premières vraies terreurs au féminin de la nouvelle génération. Un talent fou de choc et de charme !

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