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[Blog] Malaga, c'est plus fort que toi

Par dans

Mon passage à Malaga restera à tout jamais gravé dans ma mémoire. Cette période de ma vie fut à la fois la plus belle des aventures et le pire des cauchemars. Le hasard a fait que j'y ai vécu mes émotions les plus intenses, un pan de vie durant lequel mon cœur a battu plus vite et plus fort.

Des débuts chaotiques

J'avais une vingtaine d'années, et sortais d'une année clé à Toulouse. On m'avait vendu l'ESC (École Supérieure de Commerce) comme un paradis, j'y ai trouvé un enfer. Quatre heures de cours de comptabilité par semaine, j’ai vraiment besoin d’en dire plus ? Allez, "Out de tout ça," je me barre. Forcément, ma maman n’a pas été ravie d'avoir payé 10 000 euros pour un tout petit mois d’école. Sans rien à faire de mes journées je me suis retrouvé à regarder la série How I Met Your Mother et à jouer online. Ted Mosby essayait de trouver sa future femme, et moi je saignais les Sit&Go. Je faisais n’importe quoi mais toujours moins que mes advesraires. Au bout de quelques mois, j'avais monté une bankroll de 30 000 euros. J’ai remboursé mes parents, joué deux Heads-up à 5 000 contre Yevgeniy Timoshenko - un très bon joueur online Ukrainien - et me suis retrouvé avec 5 000 euros. L'été est alors arrivé et je suis rentré à Grenoble.

À mes débuts, j'ai eu la chande de découvrir Grenoble Poker, une association composée à 99% d'amateurs. Une belle bande de copains qui se réunissent tous les premiers dimanches du mois pour taper le carton et partager un bon moment. Parmi ceux-là, trois étudiants eux aussi en délicatesse avec les études, et désireux de partir à l'aventure : Léo, Alban et Antoine, étudiants en troisième année de Licence d'Histoire. Mes futurs compagnons de fortune et d'infortune. On s'est réuni une après-midi d'août à la terrasse d’un café, et il ne faisait aucun doute qu'on voulait partir loin, dans un endroit où aucun de nous n’avait jamais mis les pieds. On a d’abord pensé à Malte, avant de choisir Malaga. Je sais plus trop pourquoi à vrai dire, je crois qu'on voulait apprendre l'espagnol. Parti avec la certitude de revenir bilingue, j’y suis au final resté un an… sans réussir à parler ni comprendre le moindre mot !

Nos familles nous ont donné assez vite leur bénédiction, non sans de nombreuses mises en garde. On s'est retrouvés un soir de septembre. C'était un de ces moments étranges où les rires se mêlent aux larmes, où la terreur absolue de ne pas réussir, de laisser derrière toi tout ton cher passé tranche avec l'excitation du départ. J'avais beau dire que j'étais un dur à cuire, j'ai pleuré toutes les larmes de mon corps. Au petit matin, on est parti avec une vieille Honda Civic achetée 500 balles. Un miracle qu'elle ait survécu aux 48 heures de voyage.

Malaga la grande.
Crédit photo : e-sushi.fr

On s'est installés dans une super villa dans une bourgade à vingt bornes de Malaga appelée Alhaurín de la Torre. On était parti avec des bankrolls assez faibles, environ 10 000 euros chacun de notre poche, en plus d’un stacking complémentaire assuré par un gros joueur de cash game Grenoblois. Les premières semaines ont été compliquées, entre formalités administratives qui n'en finissaient pas et sessions perdantes. Un soir, Léo est arrivé pour la troisième fois en demi-finale d'un tournoi Super Deepstack à 22 dollars qui commençait à 20 heures et se terminait à 8 heures du matin. Tous les jetons sont partis sur un flop hauteur Valet. Son As-Valet a perdu contre le Valet-9 adverse et j'ai senti dans ses yeux qu'il avait vraiment peur que l’on n’y arrive pas. On s'est servi un verre de vodka et on est allés contempler le soleil levant. On a parlé longtemps. On était là les uns pour les autres, et en allant nous coucher on avait déjà un peu moins peur.

Des premières victoires au premier amour

Les mois suivants ont été insolents de réussite pour moi. J'ai enchainé les perfs, dont notamment une victoire sur le Main Event de Winamax pour 27 000 euros. En revanche pour Antoine, l'aventure se terminait. Miné par un bad run interminable, il a fini par tout perdre en décembre et a dû rentrer en France. Un autre coloc’ est arrivé, Colin*, qui avait abandonné Sciences Po pour tenter sa chance avec nous sous le ciel andalou. Les fêtes de fin d'années furent joyeuses, ma bankroll était au plus haut et mon moral au beau fixe. Rien ne semblait pouvoir m'arrêter.

De retour à Malaga, j'ai continué à grinder avec sérieux et assiduité. Après avoir gagné un gros tournoi pour 10 000 dollars, on est sorti un soir dans la première boîte venue, qui portait le nom de Sala Wengé. Je suis tombé sur un groupe d'Espagnoles qui fêtaient un anniversaire et j’ai lâché une petite bouteille de Dom Pérignon pour marquer le coup. L'une d'entre elle nous a invités à une soirée le surlendemain, la meilleure que je n’ai jamais faite.

Nous étions environ une quinzaine, dans une pizzeria sur les hauteurs de Malaga avec une vue magnifique. Notre colocation a payé le resto et on s'est ensuite rendu dans une boîte en bord de plage. A posteriori on s'est rendu compte que le lieu était à cinq minutes en voiture de la maison, mais sur le coup on avait l'impression de vivre une aventure incroyable dans un lieu lointain et inconnu. On s’est offert huit bouteilles de Dom Pérignon et autant de vodka. Rapidement, tout le monde était ivre mort. À un moment de la soirée, une des filles me demande d'aller sur la plage avec elle car elle ne se sent pas bien. Un joli bluff, payé en toute détente puisque dix minutes après on s’embrassait sous les étoiles. Le cœur a ses raisons que la raison ignore, j'en suis tombé follement amoureux

À partir de cet instant je n'ai plus pensé qu'à elle. Comme elle travaillait dans une boîte, je trouvais tout le temps des prétextes pour sortir et l'y voir. Forcément, je voulais l'impressionner du coup j'envoyais des salves de mutants… avec de sacrées notes à la clé. Moins de poker, plus de dépenses. Et je me retrouve en bonus en concurrence avec un footballeur international, et non des moindres. J'arrive un mardi dans la boîte et je la vois en train de siroter tranquillement un verre avec Albert Luque, alors tout juste retraité du club de foot de Malaga et ami du défenseur central du Real Madrid Sergio Ramos. Le combat allait être rude.

Le visage de l'ennemi
Crédit photo : lovelfc.com

Décadence et grandeurs

Je déteste perdre, surtout contre un footeux. Pour en rajouter une couche, je sentais que la fille en question fantasmait sur la vie de château qu'elle pourrait avoir, et ça me rendait dingue. Un matin en sortant de boîte, je vais prendre un petit dej’ avec mes colocs et je les croise en train de partir ensemble. Je me souviendrai à jamais de ce moment. Mon cerveau s'est littéralement éteint pendant une fraction de seconde. C'était comme si quelqu’un m'arrachait le cœur de la poitrine et sautait dessus à pieds joints. J'ai titubé dans les rues de Malaga, sonné. Puis j'ai frappé avec mes poings de toutes mes forces contre les murs jusqu'à voir le sang couler. J'ai fondu en larmes comme un enfant dans les bras de mes colocs. J'avais tout perdu. Mes 100 000 euros de bankroll et la fille que j'aimais. Cerise sur le gâteau, Colin s'était connecté avec nos comptes poker et avait réussi à perdre 30 000 euros. On ne les a jamais revus.

J'ai pris un vol retour pour Grenoble avec les derniers 100 euros qui me restaient. Le vol a eu douze heures de retard et a été détourné sur Mulhouse pour je ne sais plus quelle raison. L’avion est arrivé à minuit, le premier train était à 8 heures. Je n’avais plus aucun sou en poche, j'ai dû dormir dans l'aéroport. J'ai eu la chance de ne pas me faire contrôler car je n’avais plus de quoi payer le billet. À mon arrivée, mes parents m'ont pris dans leurs bras. Bien entendu, je ne pouvais pas leur dire que j'étais endetté. Je ne voulais pas qu'ils paient pour mes erreurs. Mais j'ai senti leur amour indéfectible et j'ai su à ce moment que j'allais remonter la pente.

Pierre et Flavien, au Winamax Poker Open 2015

J'ai dit à mes parents que je m'étais inscrit à la fac. Je me levais à 7 heures, prenais mon sac mais au lieu d'aller sur le campus j'allais jouer chez Flavien Guénan. J'ai recommencé à partir de tournois à 20 centimes. J'ai eu la chance de gagner assez vite un tournoi à 150 euros avec des miles qui me restaient pour 5 000 euros de gains, avant d'enchaîner sur un Event des Winamax Series à 10 euros. En décembre, j'étais déjà remonté à 40 000 euros online. Assez pour me lancer dans les Euro Finals of Poker à l'Aviation-Club de France.

Je me suis installé aux tables 5€/5€ le premier jour, et j'ai fini positif de 16 000 euros après une session mémorable où un seul type m'a lâché plus de 10 000 euros. Me sentant dans un bon cycle, je tente alors ma chance sur le Highroller à 10 000 euros. Je me souviens d'un coup mémorable ou je paie un 3-bet avec Roi-10 dépareillés contre un Allemand. Je float sur un flop Dame-5-2 rainbow. Il envoie un deuxième barrel sur l'As au turn. Je me dis qu'il veut me bluffer donc je paie. Rivière Valet. Tout part et il a deux Dames. Je ris encore rien que de repenser à sa tête quand je montre la quinte. Je finirai ensuite troisième pour 70 000 euros. Le premier épisode d'une longue série d'aventures : mon intégration au sein du Team Winamax, le WPO Dublin ou encore l’EPT Monte-Carlo. Alors que débute une nouvelle saison sous les couleurs de Winamax, j’espère qu’il reste encore de beaux chapitres à écrire.

*Le prénom a été modifié


LeVietF0u

L'enfant terrible du Team Winamax a remporté les plus gros tournois W et fait souvent parler la poudre en live. Un talent ravageur, à la table comme sur les réseaux sociaux.

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